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Célébration de la nuit du Destin : Le CERFI entre prières, adorations et réflexions

samedi 26 juillet 2014.

 

Les musulmans du Burkina ont célébré la nuit du Destin, le jeudi, 24 juillet 2014 sur l’ensemble du territoire national. A Ouagadougou, plus précisément sur le site du SIAO, le Cercle d’études de recherches et de formation islamiques (CERFI) a, une fois de plus, convié ses membres et sympathisants autour de prières, adorations mais également de réflexions sur le système éducatif au Burkina.

C’est dans une salle (pavillon du soleil levant) pleine que s’est déroulé le contenu de la nuit du Destin au CERFI en collaboration avec l’association des élèves et étudiants du Burkina (AEEMB). Lecture du Coran, communication sur divers thèmes, remise de prix du concours régional de récitation coranique, projection vidéo sur la Zakat ont été entre autres points forts de cette importante nuit du mois de ramadan. « Organiser la commémoration de la nuit du Destin pour le CERFI, ce n’est pas un choix ; c’est une exigence de notre foi », a déclaré le président du CERFI, Moussa Nombo. Selon lui, cette nuit est un moment au cours duquel tout le monde souhaite être reçu à l’audience divine. « Au cours de cette nuit, il est décrété le destin de l’humanité, le destin de chaque homme et chacun souhaite être-là aux prières pour solliciter le créateur, sa bienveillance, sa sollicitude, sa miséricorde sur la création, sur l’humanité. C’est donc un moment exceptionnel pour le genre humain. Moment exceptionnel, parce que c’est le moment au cours duquel a été révélé le Saint Coran… », a expliqué M. Nombo. Ce qui oblige, affirme-t-il, le CERFI a commémoré « cette nuit qui est meilleure que 83 années d’adoration, soient mille mois ». « Quand on connaît l’espérance de vie d’un homme, 83 ans c’est beaucoup. Si au cours d’une nuit, vous bénéficiez donc de la valeur spirituelle de 83 années d’adoration, vous pouvez remercier Dieu pour cette occasion qu’il vous donne ; c’est une grâce divine ».

Maintenir la constance dans l’adoration

L’occasion a été belle pour rappeler aux fidèles musulmans que les comportements prescrits au mois de jeûne doivent demeurer, même après le Ramadan. Pour Ibrahim Kaboré, formateur au CERFI, les perdants dans ce mois de jeûne, sont ceux-là qui ont trouvé très lourd le jeûne et ont considéré les prières comme une préoccupation. Par contre, sont bénéficiaires, ceux-là qui ont jeûné la journée et passé la nuit en adoration, prières et autres invocations, qui ont su retenir leur langue de mauvais propos, multiplier la lecture du Coran, purifier leur cœur de toutes ‘’maladies’’ de haine, rancune, envie, vengeance, d’orgueil, médisance, de calomnie et qui ont œuvré dans le sens de l’amour, de la compassion, la paix et la tolérance, la modestie, la bienfaisance, le pardon. Ils ont retenu le reste de leur organe contre tout ce qui déplaît à Dieu. « Ramadan tire vers sa fin mais ce n’est pas la fin de l’adoration. Les prières ne se limitent pas non plus au mois de ramadan. Tout comme les œuvres de fraternité et de solidarité établies pendant le ramadan… » a-t-il rappelé. Selon lbrahim Kaboré, il serait dommage pour le musulman, de passer un mois dans le jeûne pour retomber dans la débauche dès que le ramadan est terminé. C’est pourquoi, a-t-il invité chaque fidèle à toujours observer les exigences et valeurs qui fondent l’islam.

Le système éducatif au Burkina : responsabilité et contribution des musulmans

L’un des plus grands axes de cette nuit est sans nul doute la conférence sur le système éducatif au Burkina. « Système éducatif au Burkina Faso : Responsabilité et contribution des musulmans », tel est le thème qui a été ausculté par l’imam Tiégo Tiemtoré sous la modération de Khalid Ilboudo. Un thème largement diagnostiqué par les communicateurs et qui a suscité de nombreuses réactions. Pour introduire le sujet, Khalid Ilboudo a fait remarquer que la société est le reflet de l’éducation. « Aucune nation ne peut amorcer un développement véritable tant que la majorité de ses populations resteront analphabètes, ne sachant lire ni écrire », a souligné M. Ilboudo pour qui, s’il est vrai que l’éducation demande de grands investissements (donc chère), l’ignorance est encore plus chère. Scrutant le monde de l’éducation au Burkina, il est parvenu au constat que malgré les efforts déployés, l’éducation est en difficulté (manque d’infrastructures, de ressources humaines à certains niveaux, etc.). « Il y a donc beaucoup à faire et la question se pose sur la partition que nous, musulmans, devront jouer, tout en sachant qu’étant les plus nombreux, nous sommes les plus grands demandeurs », a-t-il.

Pour Imam Tiégo Tiemtoré, communicateur principal sur le thème, il y a une crise de valeurs partout. Elle trouve sa source dans le système éducatif et a pour conséquence la prolifération de certains maux tels que le chômage, les crises de l’éducation familiale, les violences. Abordant le chapitre des insuffisances sur l’éducation, imam Tiégo Tiemtoré a cité entre autres insuffisances, le manque de matériels adéquats, l’inadéquation entre le contenu des enseignements des établissements coraniques et le monde de l’emploi (difficulté pour les diplômés de ces écoles à s’insérer dans le tissu socioéconomique). Il s’est ensuite interrogé de savoir ce que peuvent apporter l’Islam et le musulman à l’éducation et ce, au nom de leurs valeurs. Pour lui, il faut avoir une vision prospective de sorte à former des hommes pourvus de valeurs pour la société. A l’en croire, l’éducation est l’affaire de tous les membres de la société et chacun doit y mettre du sien. Car, « Lire, c’est savoir. Savoir, c’est pouvoir », a-t-il repris Laurent Bado (enseignant à l’Université de Ouagadougou, ndlr) pour montrer la place de l’éducation dans l’élan de développement national et dans la construction d’une société telle que souhaitée par tous.

Un élan de solidarité envers les familles éprouvées par le « crash »

La nuit du destin se tient à moment où l’ensemble des Burkinabè pleurent la disparition de plus de vingt personnes de leurs « frères et sœurs », suite au « crash » de l’avion algérien dans la nuit du mercredi à jeudi 24 juillet 2014. La célébration de cette importante nuit a été saisie par les musulmans du CERFI, à travers leurs premiers responsables, pour marquer leur solidarité et partager leur peine avec les familles éprouvées par la situation tragique. « Depuis ce matin, cette triste nouvelle nous est parvenue. J’adresse toute ma compassion, les condoléances de l’ensemble des musulmans à l’ensemble des familles éplorées. C’est tout le peuple burkinabè qui est concerné. Nous sommes un peuple, nous sommes une collectivité, une nation et quand une partie de cette nation a mal, tout le reste de cette nation a mal. Aujourd’hui, le Burkina a mal du fait que des familles burkinabè sont tristement atteintes parce qu’un avion n’a pas pu arriver à bon port. Nous renouvelons nos prières pour que Allah soulage l’ensemble de ces familles et nous préserve de cette calamité », a déclaré Moussa Nombo, invitant l’ensemble des Burkinabè à la solidarité dans cette situation pénible.

Oumar L. OUEDRAOGO

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Encadré :

Extrait du discours du président du CERFI, Moussa Nombo :

En ce moment précis du cours de notre histoire et de la marche de la société à laquelle nous appartenons, je voudrais m’exhorter et vous exhorter à faire individuellement et collectivement, le bilan des efforts déployés par notre communauté, afin qu’ensemble nous prenions des engagements nouveaux pour l’édification d’une société de paix et de prospérité.
Nos associations se font le devoir d’interpeller régulièrement les musulmans de notre pays sur leurs obligations à porter non seulement les défis de la foi musulmane, mais aussi à être, en tant que communauté de foi majoritaire, la solution du mieux vivre des Burkinabè. Parce que nous sommes les plus nombreux, les problèmes sociaux sont naturellement plus ressentis dans nos rangs. Et donc, de ce fait, nous devons être les plus concernés par toutes les initiatives ayant pour but de répondre aux besoins des Burkinabè.
Nous, intellectuels musulmans du Burkina Faso, sommes davantage interpellés par rapport au rôle et aux responsabilités que la Oummah doit porter. Il est léger, l’argument qui consiste à imputer les difficultés de notre communauté à la faiblesse de l’éducation de ses membres, leur indigence et leur ignorance.
Aujourd’hui, l’on assiste à l’avènement d’une intelligentsia musulmane décomplexée à tout point de vue, qui s’assume, qui s’affirme et se construit.
C’est le lieu donc de souligner que nous avons non seulement les moyens, mais nous avons surtout le devoir de soutenir les actions publiques et privées pour l’amélioration des conditions de vie des populations. Le musulman est au moins, comme tout autre Burkinabè, très intéressé par la qualité des politiques publiques, dans leur contenu et dans leur mise en œuvre.

L’éducation est la voie par excellence par laquelle les sociétés se délient du joug du sous-développement et des maux de tout genre. C’est pourquoi le devenir de tout pays dépend pour une large part de son système éducatif, étant entendu que c’est l’appareil qui construit l’homme et le met au service de sa société.
Cependant, force est de reconnaitre que nos systèmes éducatifs souffrent de beaucoup d’insuffisances structurelles. Le Burkina Faso ne fait pas exception à cette règle. C’est pourquoi cette année, nous plaçons la grande conférence de cette nuit sous le thème « Le système éducatif : responsabilité et contribution des musulmans ».

Oumar L. OUEDRAOGO

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