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Santé animale : Le CICR et ses partenaires au chevet des éleveurs de l’Oudalan

mardi 17 juin 2014.

 

Avec la crise malienne et l’afflux massif de réfugiés, la province de l’Oudalan a vu le nombre de son cheptel s’accroitre considérablement. Cette concentration a rendu les animaux plus vulnérables aux risques d’épidémie. Le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) et la Croix-Rouge burkinabè, en collaboration avec le ministère des ressources animales et halieutiques ont décidé de jouer leur partition. Ainsi, une campagne gratuite de vaccination contre la Péri pneumonie contagieuse bovine et la pasteurellose a été initiée en décembre 2013 pour réduire ces risques. Six mois plus tard, la 2e phase de la campagne a été lancée le 09 juin 2014 et devrait prendre en compte 130 000 bovins et 160 000 petits ruminants. La campagne devrait s’étaler sur deux mois.

Au Burkina, l’élevage constitue l’une des principales activités des populations rurales. Ce secteur contribue à hauteur de 12 à 20% à la formation du PIB, procure 25% des recettes d’exportations et emploie avec l’agriculture plus de 80% de la population active. Dans la province de l’Oudalan, plus de 90% de la population active vit de cette activité. Malheureusement, les changements climatiques, la recrudescence des nouvelles maladies, les pesanteurs socio-culturelles, la pratique de la transhumance… fragilisent de plus en plus les animaux mettant ainsi à mal l’élevage. Au regard de ces réalités, chaque acteur devrait jouer pleinement sa partition afin que de nouveaux comportements et de nouvelles pratiques soient adoptées pour permettre la survie de cette activité. Et, la Croix rouge a décidé de jouer pleinement la sienne, à travers la campagne gratuite de vaccination et de déparasitage du cheptel de la province de l’Oudalan. Aussi bien le bétail des autochtones que celui des réfugiés maliens.

Déou, village de la province de l’Oudalan, est situé à quelques dizaines de kilomètres de la frontière Burkina-Mali. Cette commune a accueilli un nombre important de réfugiés maliens depuis le début de la crise malienne en février 2012. Avec eux, des dizaines de milliers d’animaux (petits et gros ruminants) ont fait leur entrée sur le territoire burkinabè. Avec cet afflux massif de bétail, les risques de maladies se sont accrus. Pourtant, l’élevage constitue de très loin la première richesse des populations, plus de 90% vivant essentiellement de cette activité.

Aider les éleveurs à préserver leur richesse

De ce fait, l’on ne saurait faire mieux pour un éleveur que de l’aider à entretenir et préserver son bétail. C’est pourquoi, en décembre 2013, le Comité international de la Croix rouge (CICR), en collaboration avec la Croix rouge burkinabè et le ministère des ressources animales et halieutiques ont lancé une campagne de vaccination gratuite du cheptel. A l’occasion, ce sont 200 000 animaux (petits et gros ruminants) qui ont été vaccinés. Certains petits ruminants ont été également déparasités.

La présente campagne de vaccination (contre la péripneumonie bovine et la pasteurellose) et de déparasitage est la suite logique de la première. De ce fait, le chef du bureau de CICR-Ouaga, Moussa Ouattara, a souhaité que « toutes les populations bénéficiaires puissent s’approprier cette campagne de vaccination animale, en facilitant le travail des équipes en regroupant leur troupeau pour la vaccination afin que tous ensemble, nous puissions aboutir à un résultat optimum à savoir la préservation et la bonne santé de leur cheptel ».

290 000 doses de vaccins

Six mois plus tard, ces différents partenaires lancent la 2e phase de la campagne. La cérémonie officielle a eu lieu le 09 juin 2014 à Déou. Dès le lendemain, les agents vaccinateurs étaient dans les différents parcs. Si pour la phase 1, ce sont 100 000 petits ruminants et autant de gros ruminants qui ont été vaccinés, cette fois-ci, l’opération concernera 130 000 bovins et 160 000 petits ruminants. Aussi, 40% des animaux seront déparasités (bovins de 4 à 6 ans et petits ruminants de 4 mois à 2 ans). Ce déparasitage ciblé concernera les animaux malades, en gestation ou encore les jeunes animaux.

Comme la première campagne, ce sont trois communes (Déou, Tinakoff et Oursy) de la province qui sont concernées. Et, elle est pilotée par le vétérinaire mandataire de la province, Dr Ben Idrissa Ousséni. Il y aura « une équipe pour les petits ruminants et une équipe pour les gros ruminants », assure-t-il. Compte tenu de l’importance de la vaccination du cheptel, il lance un appel aux éleveurs de la zone : « Faites passer l’information, sensibiliser vos camarades. Quel que soit le lieu où se trouve l’animal, il faut le faire venir parce que la santé n’a pas de prix ».

S’adapter aux mouvements du cheptel


Ainsi, pendant deux mois environ, Dr Ben et ses équipes vont sillonner les villages de Déou, Dibissi, Tin-Ediar, Forage Christine, Gandafabou, Tinakoff, Oursy… pour administrer les doses de vaccins aux animaux. L’accroissement du nombre est une doléance des éleveurs qui n’avaient pas pu bénéficier de la première campagne. « Pendant la première campagne, certains éleveurs n’étaient pas suffisamment informés, d’autres étaient en déplacement. Ils nous ont mentionné qu’ils étaient aussi intéressés par cette campagne parce que tous les animaux vaccinés et déparasités se portent très bien par rapport à ceux qui n’ont pas pu être vaccinés », soutient Benoit SEI, le responsable du programme sécurité économique du CICR/Ouaga, par ailleurs chef du projet de la vaccination. Parce que ça y va de la vie de l’économie du Nord du Burkina et particulièrement de la province de l’Oudalan, le CICR a décidé de donner suite à ces doléances. Ainsi, cette campagne permettra de renforcer les acquis de la première.

Certes, la vaccination du cheptel est appréciée par les bénéficiaires (autochtones et réfugiés). Mais tous posent le problème de déplacement du bétail. Le manque d’eau et de pâturage ne permet pas de trouver les gros ruminants sur place pour la vaccination. Mais, les initiateurs de la campagne devraient trouver des solutions à cette problématique qui préoccupe les éleveurs. « Il fait chaud, les animaux ont faim et soif, on comprend et on va s’adapter », rassure le vétérinaire mandataire, Dr Ousséni.

« Nous sommes tout patients dans cette zone. Les petits ruminants ne sont généralement pas en mouvement comme les gros ruminants. Ils sont en grand nombre, ils sont même trois fois plus nombreux que les gros ruminants et là, nous allons passer de village en village, de quartier en quartier en attendant que les gros ruminants reviennent. Après deux ou trois pluies dans cette zone, tous les gros ruminants vont retourner au bercail et je pense qu’en ce moment, on pourra tous les avoir et on aura atteint notre objectif », assure pour sa part Benoit SEI.

Moussa Diallo

Lefaso.net

Propos de quelques bénéficiaires

Hamadou Al-Oussein, éleveur à Déou

En décembre passé, ils sont venus vacciner gratuitement nos animaux et nous n’avons eu aucun problème de santé avec nos animaux cette année. C’est pourquoi cette fois-ci encore, nous sommes là. Nous espérons qu’après la vaccination, ils vont nous aider à avoir des aliments pour bétail, car actuellement, nos animaux ont faim. Il nous manque également de l’eau. Nous espérons que si nous faisons vacciner nos animaux, la Croix rouge va nous aider à avoir de l’eau et des SPAI.

Dicko Boubacar, éleveur à Déou

J’ai envoyé 5 bœufs et 25 petits ruminants. J’ai fait vacciner en décembre dernier et depuis ces six mois, je n’ai eu aucun problème avec mes animaux. C’est pourquoi, j’ai fait venir mon bétail cette fois-ci aussi. Je n’ai pas pu faire venir un grand nombre parce que mes animaux sont en transhumance dans d’autres villages pour chercher de l’eau et des aliments. S’il plait à Dieu, les prochains jours, je vais les faire revenir pour recevoir les doses de vaccins avant de repartir. Et dans les prochaines années, je compte faire vacciner mes animaux tous les semestres parce que j’ai vu l’importance de la vaccination.

Le Représentant des bénéficiaires (réfugiés)

Nous exprimons notre grande satisfaction à l’endroit du CICR et de la Croix rouge burkinabè pour les efforts fournis pour le bien-être des réfugiés notamment la distribution des kits, la vaccination des animaux et bien d’autres.

Mais, la situation actuelle est défavorable pour le cheptel sur le plan alimentaire et nutritionnel. Donc, nous sollicitons l’indulgence du CICR et la Croix rouge burkinabè pour qu’il nous aide à sauver nos animaux qui sont affamés du fait du manque d’aliments pour bétail conjugué au manque d’eau. Nous demandons votre appui pour l’acquisition des Sous-produits agro-industriels (SPAI) afin de pouvoir nourrir les animaux en attendant la période hivernale qui tarde à s’installer ici.

Amadou Sambo, président de l’union départementale d’éleveurs dénommé Dewral de Déou

Pour la campagne passée, j’ai fait vacciner 46 gros ruminants et 117 petits ruminants. J’ai vraiment apprécié les vaccins du CICR. Ce matin, j’ai fait vacciner 21 gros ruminants et actuellement j’ai 200 têtes de petits ruminants qui sont au parc en attente de vaccination. Mais, j’ai aussi quelques têtes de gros ruminants en brousse qui ne peuvent pas se déplacer pour rejoindre un parc. Donc, ça me préoccupe. Je ne peux pas les chasser pour amener à Déou ou les ramener à Dibissi où ils étaient, alors que j’ai envie de les faire vacciner.

Cette période est un moment difficile pour tous les éleveurs de la zone. On peut vacciner les animaux qu’on peut trouver sur place. Mais déplacer les animaux d’un village à un autre pour la vaccination, c’est impossible puisque les animaux n’ont pas la force pour faire le déplacement.

Si le CICR pouvait repousser un peu le délai de la vaccination pour que les animaux puissent avoir un peu de force pour pouvoir se déplacer. En ce moment, chaque éleveur pourra déplacer son troupeau pour rejoindre le parc le plus proche. Mais, en ce moment, ce n’est pas parce que les éleveurs ne veulent pas déplacer leurs animaux, mais c’est parce que les animaux ne peuvent pas. Si non, tout le monde est intéressé par la vaccination et ils ont vu l’impact de cette vaccination. Mais, actuellement, le problème c’est la faiblesse des animaux.

Propos recueillis par Moussa Diallo

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