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Corruption : Après les discours, les actes ?

mercredi 19 mars 2014.

 

Ce mardi 18 mars, une réunion de concertation entre le Premier Ministre, Luc-Adolphe Tiao et les corps de contrôle d’Etat avait lieu au Ministère des Affaires étrangères. Les débats se sont tenus à huis-clos et peu d’annonces ont été formulées. Pourtant, les cas de mal-gouvernance et de corruption sont encore trop nombreux au Burkina Faso et les citoyens attendent des mesures fortes de la part des autorités, notamment en terme de sanctions.

À peine trente minutes, c’est le temps consacré, ce matin, par les corps de contrôle et le Premier Ministre a leurs échanges. Réunion « éclair » dont le seul intérêt consistait finalement à entendre les doléances des corps de contrôle présentées par Henri Bruno Bessin, Contrôleur général d’Etat, au gouvernement. Celles-ci se résumaient en trois points, à savoir l’adoption d’un statut des inspecteurs techniques des services, la motivation des corps de contrôle et la mise à disposition de moyens nécessaires à l’exécution de leur mission. En ce qui concerne le Premier Ministre – qui n’a pas souhaité parler à la presse -, on ne peut que saluer le travail de ses « plumes » capables de produire des discours de cinq pages dépourvues de la moindre information importante. Que dire également des cinq minutes accordées par M. Bessin à la presse ? Pas grand chose si ce n’est qu’à écouter ses réponses, on se demanderait presque si ce n’est pas lui qui écrit les discours du PM !

Réponse de Normand

Au sujet de la concrétisation des recommandations des corps de contrôle au gouvernement, M.Bessin nous a, en effet, gratifié d’une superbe réponse de Normand : « Certaines recommandations sont mises en œuvre mais d’autres prennent plus de temps », a t-il déclaré, ne laissant absolument rien filtrer des conclusions de la réunion avec le Premier Ministre. Interrogé au sujet de l’avancement du rapport sur la corruption qu’il avait promis pour le mois de mars, le Contrôleur général d’État a certifié que lui et ses équipes travaillaient dessus. « Nous sommes toujours en mars », a t-il justement rappelé.

Toujours est-il que dans ce contexte, on se demande un peu quel est l’intérêt de convier la presse à une réunion dont elle est exclue et à l’issue de laquelle les journalistes ont le droit de poser seulement trois questions...

Des sanctions qui se font attendre

Bien heureusement, les responsables du Réseau National de lutte anti-corruption (Ren-Lac) se montrent un peu plus volubiles sur le sujet. Contacté par lefaso.net, l’un d’eux a déploré le manque de moyens mis en œuvre par le gouvernement burkinabè en matière de sanctions. En effet, de nombreux cas de corruptions ont été mis en instance mais dorment toujours dans les placards des tribunaux depuis plusieurs années. Par ailleurs, le Ren-Lac, soutenu par plusieurs parlementaires, avait introduit en 2012 un projet de loi anti-corruption que le gouvernement avait promis d’adopter au plus tard fin 2013. Jusqu’à présent, il n’en est rien.

Des malversations de plus d’un milliard de F CFA

Selon le classement de l’indice de perception de corruption publié le 3 décembre dernier par l’ONG Transparency International, le Burkina Faso se place au 83e rang mondial, à égalité avec le Libéria. Si le « pays des hommes intègres » n’est pas au niveau de la Libye ou de l’Ouzbékistan, il n’en demeure pas moins que les détournements de fonds sont encore courants dans certains secteurs, en témoigne le rapport de l’Autorité supérieure de contrôle d’État (ASCE) rendu public le 4 décembre dernier. Ce document faisait, en effet, état de malversations financières relevées notamment dans le département de la Santé qui comptabilisait, à lui seul, un « total à recouvrer » de près de 400 millions de F CFA sur un total général de plus d’un milliard.

Au regard de ces chiffres, les Burkinabè attendent donc des mesures concrètes de la part des autorités car, comme l’a bien rappelé M. Tiao en conclusion de son discours, « la culture de la responsabilité, de l’imputabilité, de la discipline, de la rigueur et de la transparence doit être portée par tous. »

Pierre Mareczko

Lefaso.net



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