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Non-loti de Koua : « 40 ans après, nous continuons d’avoir peur de la pluie » dixit Awa Sidibé

jeudi 29 août 2013.

 

Perdu entre les secteurs 25, 17 et Ouezzin-ville de Bobo-Dioulasso, le non-loti de Koua est atypique. Isolé au milieu de quartier loti, cet espace à la particularité d’avoir été pendant longtemps la tanière des Bobo et des peuhls. Rattrapé par la démographie et l’expansion de la ville de Bobo-Dioulasso, Koua a vu ses alentours viabilisés. Alors que les « ancêtres » des lieux demeurent encore dans les affres de la vie des quartiers non-lotis. Ici, l’on a en commun un ennemi, la pluie.

Il ne fait pas beau être à Bobo en saison pluvieuse. Pire encore dans un quartier non-loti. A koua, vieux quartier de Bobo-Dioulasso, les yeux sont toujours dirigés vers le ciel. Pas pour implorer dame nature d’ouvrir ses robinets, bien au contraire. On ne veut pas de pluie, en tout cas pas de façon successive. Parce qu’à l’évidence, la saison pluvieuse rime avec angoisse et inquiétudes à Koua.

L’air soucieux, Barakissa Kaboré s’exprime : « A la moindre pluie, nous ne pouvons plus dormir. Ma maison est dans un bas-fond et l’eau entre de partout.Tout est détruit à l’intérieur. Les enfants sont toujours malades à cause des moustiques. Personnellement, c’est à cause de la pauvreté sinon je ne vais jamais accepter de vivre ici  ». Il affirme prier jour et nuit pour qu’il ne pleut pas. Tandis que Moussa Sidibé laisse entendre de son côté : «  moi je suis né ici, j’ai vu tout changer sauf notre quartier. Aujourd’hui, j’ai 30 ans et Koua est encore un quartier non loti. Impossible de dormir quand il pleut, on reste débout jusqu’à la fin. Vivement que les autorités viennent lotir notre quartier ». On l’aura compris, il impute sa galère à la non viabilisation de Koua.

Quarante (40) ans de vie dans un non-loti

A la lumière des témoignages, l’on se rend compte de la spécificité de Koua. Pendant longtemps, les peuhl étaient les seuls à tenir compagnie aux bobo. L’urbanisation aidant, la ville s’est agrandie et Koua a été isolé par des quartiers nouveaux.

Mais l’on retrouve toujours peuhl et Bobo sur les lieux. Des personnes qui se sentent lésées par leur sort. Pour Madi Sidibé, 30 ans de vie dans un non loti c’est trop : « Je suis né ici, dans une maison en banco et je dors toujours dans une maison en banco. Aujourd’hui, j’ai 30 ans. Nous sommes nombreux dans la cour. Mais on ne peut rien faire parce qu’on ne peut pas construire. C’est un calvaire que de vivre dans un quartier non loti laisse-t-il entendre. A chaque fois, des politiciens viennent faire du verbiage et on ne voit rien venir. »

A quelques mètres de lui, Awa Ouattara, trentenaire et fille mère se lance sans protocole dans notre discussion «  On ne sait pas ce que Koua a fait mais on souffre ici. On est né ici, on a grandi ici et on n’a pas vu un maire s’intéresser à Koua. Vivre dans un non-loti pendant 30 ans, c’est dur à supporter. Cet état de fait explique même le comportement des filles qui préfèrent aller vivre avec leur copain dans les quartiers lotis avec tout le risque que cela comporte. »

Comme pour enfoncer le clou, la vielle Aoussatou Sidibé, mère de quatre filles se lance dans la danse. « Avant, c’était les bobo et nous les peuhl que l’on retrouvait ici. Moi je suis ici depuis 40 ans et j’ai peur à mon âge. Parce que Koua est un quartier dangereux à cause de l’absence de voie » lasse-t-entendre pour finir.

Ousséni Bancé

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