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Expulsés des résidences universitaires : Non à l’aide du gouvernement

lundi 12 août 2013.

 

C’est sans conteste le dossier de ces vacances 2013 : celui des expulsés des résidences universitaires de Ouagadougou : En tout, elles sont plus de 7000 personnes selon des sources étudiantes, et que la solidarité citoyenne tente de secourir dans l’urgence. Un tour dans quelques points de relogement nous a donné l’occasion de nous rendre compte du difficile quotidien de ces étudiants qui acceptent parfois de parler de la réalité avec colère et émotion.

Ce matin, nous décidons donc de retourner dans un premier temps au niveau des structures d’accueil mises en place par le gouvernement dans le cadre de la prise en charge des étudiants expulsés.

Ainsi que nous le faisions savoir dans nos précédentes éditions, seules une dizaine de personnes avaient effectivement répondu à l’appel des autorités. Notamment celles du ministère de l’action sociale et de la solidarité nationale.

Mais contrairement à notre premier passage au niveau du stade du 04 août et de l’Institut national de la jeunesse et des sports (INJEPS), les agents commis à la tâche n’ont cette fois, pas daigné en dire plus sur les derniers développements liés à cette actualité.

Qu’à cela ne tienne, nous nous rendons donc sur l’un des sites de recasement qui se trouve être le siège d’un parti politique (d’opposition), le Front des forces sociales, FFS. Lequel a ouvert ses portes aux demandeurs.

Situation de crise

Arnaud Somé, le responsable du site « siège du FFS » ne fait pas dans la langue de bois :
Le nombre ne cesse de croitre dit-il. Puis d’ajouter « au début, nous étions une trentaine, mais hier, on était à 82 personnes, tous de la cité chinoise »

Dans ces conditions «  pour dormir on a un sérieux problème. Tout le monde ne passe pas la nuit ici. Certains sont logés dans des familles mais viennent se restaurer à midi et le soir ici, puis repartent dormir chez leurs tuteurs pour revenir le lendemain », poursuit-il.

Pour ce qui est de la restauration, la situation est que jusque-là, les réfugiés doivent leur subsistance à des personnes de bonne volonté qui laissent parler leurs cœurs, ainsi qu’à des structures associatives.

30 à 40 personnes dans un trois pièces

Le local en lui-même comprend trois pièces, un séjour et un auvent, que se partagent 30 à 40 personnes.

Dès les premiers instants, nous fait-on savoir, «  il y avait des filles avec nous, mais elles sont allées en province pour composer les concours de la fonction publique avant de revenir ».

Quid de l’opération d’enrôlement initiée par le ministère de l’action sociale ? « Nous n’avons pas épousé cette idée, affirment les étudiants  ». Ils vont même plus loin : « On s’est dit que la cité est un cadre estudiantin. Mais le stade et l’INJEPS c’est pour les sportifs. Il ne faut pas mélanger les choses ».

S’ils affirment avoir vu les communiqués, les déguerpis se veulent donc fermes : «  C’est une insulte. C’est le même gouvernement qui nous chasse et qui veut nous récupérer. » La main sur le cœur, ils laissent entendre que sur la question, « Il y a même des gens à qui on a proposé de l’argent pour se faire enrôler. On a été là-bas pour constater. Ils ont eu quelques individus, mais ce ne sont pas des résidents déguerpis des cités, mais ce sont des étudiants riverains. Ils leur ont même donné de l’argent pour qu’ils figurent sur la liste afin qu’ils puissent se présenter à la presse pour dire que les étudiants expulsés des cités ont été récupérés et relogés dans d’autres locaux.  »

Qu’en est-il alors de l’accusation portée contre certains groupes qui empêcheraient d’autres étudiants, selon les sources du ministère de l’action sociale, d’aller s’inscrire ? La réponse des étudiants : « On n’empêche pas les gens de s’inscrire, seulement on essaie de leur expliquer afin qu’ils comprennent la portée de la chose. C’est ce qui fait que le nombre croit à notre niveau. Quand on leur explique, ils préfèrent venir dans notre local ici plutôt que d’aller au stade du 4 août ou à l’INJEPS  ».

Solidaires entre eux, ils préfèrent donc se débrouiller comme ils le peuvent. Et pour cause, pour eux, une situation de crise appelle forcément des conditions adaptées. Même si comme on le devine aisément, le moral a pris un coup avec la situation actuelle.

Pour autant le fait d’être logés provisoirement dans le siège d’un parti politique, fut-il de l’opposition, ne les dérange pas. L’important, c’est, comme ils l’ont fait savoir, qu’ils ne parlent pas de politique en ce moment. Le plus urgent est sans doute ailleurs.

Ce n’est pas Ramdé Poulmassida Abdoul Aziz, étudiant au département d’Anglais, délogé de la cité chinoise, qui dira le contraire :

«  Nous avons compris que nous sommes victimes d’un système oppresseur et nous essayons de faire avec. C’est la mentalité actuelle qui prévaut en notre sein  » dit-il.

Très remonté il met en garde « ceux qui sont chargés de juger leurs camarades emprisonnés : si toutefois, il y a des condamnations, qu’ils sachent que ça ne passera pas comme ça. Nous serons dans la rue encore et nous allons témoigner notre mécontentement » prévient-il.

Ouattara Korotimi, elle, est étudiante en 2e année Anglais, expulsée elle aussi de la cité chinoise, a trouvé un autre moyen d’expression : Par solidarité avec ses camarades dit-elle, elle vient les aider à faire la cuisine. Elle « qui a la chance d’avoir quelques parents ici  ».

Juvénal Somé
Diallo Moussa

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