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Moctar Barry : arrêté puis libéré au nord du Mali

mercredi 5 décembre 2012.

 

Parti au nord du Mali pour réaliser des reportages pour le compte de la webtélé Droit Libre TV, notre confrère Moctar Barry fut arrêté à son retour à Sévaré par la gendarmerie malienne. Gardé et interrogé pendant des jours, le journaliste Barry fut finalement libéré et il a pu regagner Bamako où il réside. Dans l’interview qui suit, il revient sur les circonstances de son arrestation et les conditions de sa détention par la gendarmerie malienne.

1) Pourquoi es- tu allé au nord du Mali ?

Je suis allé au nord dans le but de toucher du doigt les réalités que vivent ces populations, mais surtout effectuer des reportages pour la webtélé Droit Libre TV que je représente à Bamako. C’est un défi que j’ai voulu relever car à chaque fois que l’on parle du nord Mali, on voit les mêmes images. Donc j’ai voulu proposer de nouvelles images du nord.

2) Comment s’est passé ton reportage sur le terrain ?

J’ai travaillé avec une facilité déconcertante, si bien que je disais à mon chef que j’y reviendrai car c’est la peur qui m’a empêché de m’y rendre avec du matériel approprié. Seul bémol, quand j’ai vu le chef de la hesba (police islamique) débarquer sur les lieux, puis ces hommes, j’ai eu quelques sueurs froides.

3) Quel est le sentiment général des populations du nord ?

La population se sent oublié dans les négociations. Elle ne comprend pas que les rebelles du MNA (au lieu de MNLA, ils se collent à la première appellation) soient conviés à Ouagadougou et d’autres lieux et pas eux. Ils disent attendre de voir où va s’installer le MNA et leurs familles après les accords. Ils n’ont pas digéré le fait de voir des gens avec qui ils ont grandi, les trahir au jour de la chute de Gao, et surtout détruire leur bien. Ce qui leur fait le plus mal, c’est la destruction de l’hôpital. Ils pensent que les tamasheqs sont des racistes mais ne pouvant rien avant le MNA, jouaient aux hypocrites jusqu’à la chute de Gao où ils montrent leurs vrais visages. Ils ne sont pas prêts à le pardonner.

4) Qui t’a arrêté ?

J’ai été arrêté le jeudi 15 novembre par la brigade mixte (gendarmerie, militaire et police)

4) Quelles sont les raisons qu’ils ont avancées pour t’arrêter ?

Ils m’ont dit que mes papiers (ordre de mission attestant que je suis le correspondant de DLTV au Mali et mon passeport) n’étaient pas valables.
Pourtant j’ai franchi à l’aller les 5 postes de contrôle avec ces mêmes documents. Au retour j’ai franchi 3 postes avant de me voir arrêté. Je note que les postes sont mixtes donc supposés répondre au même commandement. Si mes papiers n’étaient pas en règle, pourquoi m’avoir laissé partir ?

6) Quelles ont été tes conditions de détention ? Y a – t- il eu des tortures ?

Pour un détenu, le fait d’être privé de liberté déjà constituera forcement un obstacle et cet obstacle est une mauvaise condition. Je n’ai pas été torturé.

7) Qu’est-ce qui les a motivés à te libérer ?

C’est ma franchise, les raisons qui m’ont motivé à aller à Gao, c’est aussi la mise en garde de mes supérieurs de DLTV, de mes parents, de mes amis. Parce qu’après avoir épluché mes sms et mails, ils ont vu que j’avais été prévenu. Personne ne m’y a encouragé car ils m’accusaient d’être un espion au service d’une puissance étrangère (la France). Ils ont, comme ils aimaient me le répéter, su que j’ai été un têtu.

8) Quelles sont tes perspectives à présent ?

Les perspectives, c’est d’abord tirer les leçons de ce fâcheux incident, et ensuite voire avec DLTV, les nouvelles orientations.

9) Un mot de remerciement

Je remercie Son Excellence Monsieur l’Ambassadeur TOPAN, il a été la première personne que j’ai pu appeler avant que l’on me confisque mon téléphone. L’ensemble de Semfilms et DLTV, Lombar Barry, Gidéon Vink, Bakary Ouattara, K. Gabriel Kambou qui n’ont ménagé aucun effort pour obtenir ma libération et aussi l’ensemble des journalistes burkinabé. Je n’oublie pas mes promotionnaires de Communication et Journalisme, et Serge Daniel, Alpha Barry, Newton Ahmed, Sadjo Lamine Sow, le gouvernement malien et son chef. Je n’oublie pas Boukary Sangaré, Madame Absatou Barry et Abdoulaye Barry à Bamako.

Interview réalisée par Koundjoro Gabriel Kambou



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