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Docteur TRAORE Ibraïma : « Les élèves et étudiants burkinabè ont une attitude défavorable à l’égard du besoin d’indépendance et d’autonomie et de la prise de risque »

mercredi 26 septembre 2012.

 

Il est docteur en sciences de gestion. Il vient de soutenir son Doctorat de troisième cycle sur l’entrepreneuriat. Avec mention très honorable à l’université d’Ilci Paris-Ville (France). De retour au pays, il répond à certaines de nos préoccupations à travers cette interview.

Nous savons que vous avez travaillé sur plusieurs thèmes concernant l’entrepreneuriat. Cependant pouvez-vous nous donner des précisions sur le titre de votre dernier thème ?

Le titre du travail de recherche qui vient d’être fait paraît complexe. Il revêt en effet de multiples aspects et nécessite une réflexion pertinente, notamment en ce qui concerne l’emploi et l’éducation d’une part et l’entrepreneurship des élèves et étudiants d’autre part. Il est intitulé : « Emploi, éducation et entrepreneurship : cas des diplômés des enseignements secondaire et supérieur au Burkina Faso ».

Pourquoi un tel thème ?

Nous avons choisi de travailler sur l’entrepreneuriat compte tenu de l’enjeu que cette activité indépendante représente dans notre pays qui est confronté à un véritable problème d’emplois. Le chômage des jeunes diplômés, toutes spécialités confondues, est aujourd’hui un phénomène qui va crescendo eu égard à l’essoufflement de l’administration publique et la faiblesse des structures privées à créer et offrir des emplois.

A titre illustratif, cette année, plus de 405 000 candidats se sont présentés aux concours directs d’entrée à la Fonction publique alors que 5 400 postes seulement sont à pourvoir. Ce qui correspond à un taux de couverture de 1.33 %. Au travers de ce déséquilibre, apparaissent en filigrane toute l’ampleur et toute l’urgence du défi qui s’offre à l’autorité burkinabè, au secteur privé, au système éducatif et de façon générale à l’ensemble des familles burkinabè qui doivent absolument réagir afin de sortir les jeunes de cette spirale négative.

Comment réussir l’entrepreneuriat quand on sait qu’il y a des caractéristiques entrepreneuriales à acquérir ?

Au fond, la motivation, les aptitudes et les attitudes entrepreneuriales sont celles qui rendent l’action efficace. Le terme « action » devant être entendu non pas dans un sens technique ou spécialisé, mais dans un sens personnel, comme la capacité d’une personne à atteindre les buts qu’elle poursuit. Ces caractéristiques entrepreneuriales ainsi mises en avant, l’entrepreneur potentiel, après l’assimilation d’un savoir et d’un savoir-faire technique, aura plus de chances de mener à bien son projet. Nous pouvons donc dire que l’acquisition des caractéristiques entrepreneuriales permet en partie de contribuer, « à priori », à la réussite de l’affaire qui va être créée. L’éducation formelle est la source d’acquisition la plus importante des caractéristiques entrepreneuriales des jeunes même si le niveau d’acquisition reste en deçà des attentes. Malheureusement le système d’éducation actuel est trop normé et situe en son cœur l’abstrait et non l’expérimentation, c’est-à-dire l’esprit d’entreprise.

Dans ces conditions, comment l’école avec son organisation actuelle, ses programmes et ses enseignements peut-elle contribuer à l’émergence de l’entrepreneuriat ?

Il est vrai qu’à travers le paradigme pédagogique classique, la transmission des connaissances se fait par le biais des méthodes basées sur la rationalisation, le cartésianisme etc. Les aspects comme les initiatives personnelles n’ont pas leur place. Cependant, nous pensons que le paradigme pédagogique traditionnel est toujours nécessaire car il permet à travers la transmission de connaissances et de certaines valeurs de développer la capacité d’esprit de synthèse et d’analyse, lesquelles sont indispensables aussi à l’entrepreneuriat.
L’esprit d’entreprendre, quant à lui, permet de commencer une affaire, et s’intéresse plus à l’initiative, à la perception d’opportunité, à la création et la prise des risques dans les affaires. Aussi, en dehors des pédagogies traditionnelles, l’éducation doit inclure des pédagogies de l’action, basées sur l’enseignement par expérimentation des attitudes et des aptitudes entrepreneuriales

A travers ce nouveau paradigme pédagogique de l’action, comment pourrait-on donner aux élèves le goût d’entreprendre ?

Autant, l’école peut donc donner le goût d’une matière, de la même manière elle peut donner le goût d’entreprendre. Pour ce faire, l’école doit faire pratiquer les attitudes favorables à l’entrepreneurship à travers des projets entrepreneuriaux. En pratiquant ces attitudes et en appliquant à la lettre les règles y afférant, le pratiquant finira par développer des reflexes liées à l’entrepreneurship, lesquels lui permettront de résoudre de plus en plus avec aisance des problèmes entrepreneuriaux de plus en plus complexes.

Quelles recommandations faites-vous en direction de l’Etat pour l’émergence de l’entrepreneuriat des jeunes diplômés ?

Hormis l’association des pédagogies de l’action au paradigme pédagogique classique, nous recommandons :
- la poursuite de l’amélioration des conditions structurelles avantageuses et le renforcement d’un environnement social favorable basé sur les valeurs et la culture entrepreneuriales dont l’école sera chargée de faire partager, accepter, apprendre, pratiquer et transmettre ;
- la promotion de la culture entrepreneuriale de façon générale dans toute la société et en particulier en milieu scolaire à l’aide de l’introduction de cours d’entrepreneuriat et de pratiques des attitudes entrepreneuriales à tous les niveaux d’études ;
- la mise en place d’une formation liée à la culture entrepreneuriale en direction des enseignants et des établissements d’assistance financière ;
- le rapprochement des écoles et des universités des entreprises en vue de permettre aux élèves et aux étudiants de vivre souvent des expériences concrètes liées à l’entrepreneuriat ;
- Pour les besoins du moment, l’identification des jeunes élèves et étudiants présentant les attitudes les plus positives vis-à-vis de la prédisposition générale à l’entrepreneurship afin de les aider financièrement à créer leur propre entreprise.

Que pouvez-vous dire au sujet de l’acquisition des prédispositions générales à l’entrepreneurship des jeunes diplômés ?

Les élèves et étudiants burkinabè ont une attitude défavorable à l’égard du besoin d’indépendance et d’autonomie et de la prise de risque. Cependant, ils possèdent dans une certaine mesure les prédispositions générales vis-à-vis de l’entrepreneurship. Il est à noter d’une part que plus le niveau d’éducation est élevé, plus cette prédisposition générale à l’entrepreneurship est appréciable et d’autre part que le type d’entrepreneuriat prédominant chez ces jeunes est l’entrepreneuriat-opportuniste.

L’Express du Faso



Vos commentaires

  • Le 27 septembre 2012 à 10:04, par autre-façon-de-voir En réponse à : Docteur TRAORE Ibraïma : « Les élèves et étudiants burkinabè ont une attitude défavorable à l’égard du besoin d’indépendance et d’autonomie et de la prise de risque »

    Merci au Dr Traoré pour cet état des lieux.
    Entreprendre est une œuvre assez complexe. Il faut avoir les idées, avoir un environnement favorable au développement et la mise en œuvre de ces idées et des ressources (matériel, financière et intellectuelles). Cela demande souvent des sacrifices.
    Mais quant on regarde comment les gens s’enrichissent au Burkina actuellement, personne ne veut faire de sacrifices et on privilégie les courtes échelles. Je pense qu’il faut s’attaquer à cela aussi. Il ya des entreprises qui demandent plus de 5 ans avant que l’entrepreneur ne puisse se relever, alors qu’au Burkina, on est dans la logique de l’argent sap sap. Pas de base solide, d’où la chute rapide soit du vivant du promoteur, soit juste après son décès.
    Dr qu’avez-vous à dire de cet aspect ? L’avez-vous abordé dans votre rapport de thèse ? Où peut-on avoir votre rapport ?

  • Le 27 septembre 2012 à 10:51, par bolé En réponse à : Docteur TRAORE Ibraïma : « Les élèves et étudiants burkinabè ont une attitude défavorable à l’égard du besoin d’indépendance et d’autonomie et de la prise de risque »

    toutes mes félicitations au grand frère traoré. il donne un exemple de persévérance à tout le monde. vivement que ce diplôme lui apporte le bonheur escompté.
    encore félicitation

  • Le 27 septembre 2012 à 10:57, par Kelguinka En réponse à : Docteur TRAORE Ibraïma : « Les élèves et étudiants burkinabè ont une attitude défavorable à l’égard du besoin d’indépendance et d’autonomie et de la prise de risque »

    Mon cher nouveau Docteur chapeau à vous ? Je vous félicite pour avoir décrocher brillamant votre doctorat. Que Dieu vous benisse et benisse votre diplôme afin que vous en tirez énormement profit. Monsieur TRAORE, avec tout le respect que je vous dois en tant que intellectuel de ce pays, je pense que c’est beaucoup la manière de conduire la politique dans ce pays qui porte atteinte à l’entreprenariat des jeunes plus que le système d’enseignement. Il n’ya aucune volonté poltique de faire du jeune burkinabè un entrepreneur de l’avenir. Non au Burkina on fabrique des soi-disants entrepreneurs qui ne sont autres que des prêtes-noms de nos môgôs puissants. Ce que vous dénommer entrepreneuriat-opportuniste découle de cette politique. Puis qu’au Burkina, on a compris que ce n’est pas l’effort ni les idées qui payent mais c’est l’homme ou le système auquel tu es endossés. Des nouveaux riches venus de nul part poussent comme des champignons dans ce pays alors qu’ils ne sont pas les plus intelligents ni les plus entreprenants. Pour encourager les jeunes à entreprendre au faso, il faut que l’on assainisse le milieu des affaires : que le jeune dynamique prospère dans ses affaires sans des crocs en jambes même s’il est du bord politique opposé. Le jeune ne croit même plus à la réussite car il pense que cela dépend de la volonté des politiciens qui se mèlent de tout. Certes c’est dommage mais pour l’instant, les jeunes n’ont pas tort de penser ainsi. Mais loin d’être une excuse, la jeunesse doit oeuvrer pour un changement de politique à l’égard des jeunes. Il m’arrive souvent de me dire qu’au Burkina on s’en fou de la rélève à tel point ce pays dans l’avenir ne sera au Burkinabè.

  • Le 27 septembre 2012 à 11:07, par autre-façon-de-voir En réponse à : Docteur TRAORE Ibraïma : « Les élèves et étudiants burkinabè ont une attitude défavorable à l’égard du besoin d’indépendance et d’autonomie et de la prise de risque »

    Merci au Dr Traoré pour cet état des lieux.
    Entreprendre est une œuvre assez complexe. Il faut avoir les idées, avoir un environnement favorable au développement et la mise en œuvre de ces idées et des ressources (matériel, financière et intellectuelles). Cela demande souvent des sacrifices.
    Mais quant on regarde comment les gens s’enrichissent au Burkina actuellement, personne ne veut faire de sacrifices et on privilégie les courtes échelles. Je pense qu’il faut s’attaquer à cela aussi. Il ya des entreprises qui demandent plus de 5 ans avant que l’entrepreneur ne puisse se relever, alors qu’au Burkina, on est dans la logique de l’argent sap sap. Pas de base solide, d’où la chute rapide soit du vivant du promoteur, soit juste après son décès.
    Dr qu’avez-vous à dire de cet aspect ? L’avez-vous abordé dans votre rapport de thèse ? Où peut-on avoir votre rapport ?

  • Le 27 septembre 2012 à 11:19, par autre-façon-de-voir En réponse à : Docteur TRAORE Ibraïma : « Les élèves et étudiants burkinabè ont une attitude défavorable à l’égard du besoin d’indépendance et d’autonomie et de la prise de risque »

    Merci au Dr Traoré pour cet état des lieux.
    Entreprendre est une œuvre assez complexe. Il faut avoir les idées, avoir un environnement favorable au développement et la mise en œuvre de ces idées et des ressources (matériel, financière et intellectuelles). Cela demande souvent des sacrifices.
    Mais quant on regarde comment les gens s’enrichissent au Burkina actuellement, personne ne veut faire de sacrifices et on privilégie les courtes échelles. Je pense qu’il faut s’attaquer à cela aussi. Il ya des entreprises qui demandent plus de 5 ans avant que l’entrepreneur ne puisse se relever, alors qu’au Burkina, on est dans la logique de l’argent sap sap. Pas de base solide, d’où la chute rapide soit du vivant du promoteur, soit juste après son décès.
    Dr qu’avez-vous à dire de cet aspect ? L’avez-vous abordé dans votre rapport de thèse ? Où peut-on avoir votre rapport ?

  • Le 27 septembre 2012 à 11:22, par unouagalais En réponse à : Docteur TRAORE Ibraïma : « Les élèves et étudiants burkinabè ont une attitude défavorable à l’égard du besoin d’indépendance et d’autonomie et de la prise de risque »

    pour poursuivre dans la même lancée que Kelguinka, le problème est juste politique

  • Le 27 septembre 2012 à 12:41, par JYGUIYA En réponse à : Docteur TRAORE Ibraïma : « Les élèves et étudiants burkinabè ont une attitude défavorable à l’égard du besoin d’indépendance et d’autonomie et de la prise de risque »

    Toutes mes félicitations au Dr. TRAORE pour ce travail bien accompli

  • Le 27 septembre 2012 à 12:48, par Hamado de blog.ayesbo.com En réponse à : Docteur TRAORE Ibraïma : « Les élèves et étudiants burkinabè ont une attitude défavorable à l’égard du besoin d’indépendance et d’autonomie et de la prise de risque »

    Félicitations Docteur.

    Les commentaires appuient vos conclusions :"Les élèves et étudiants burkinabè ont une attitude défavorable"

    Certes il ya des difficultés à entreprendre au Faso compte tenu de l’implication de la politique dans l’économie.
    Mais l’attitude entrepreunariale voudrait que l’entrepreneur se lance malgré les difficultés et essaie de les resoudre une à une jusqu’à la réussite et non attendre que la situation soit favorable avant de se lancer.

    PS : Moderateurs, il ya un problème dans la zone de commentaire. Elle se vide lorsque l’on quitte la zone et on y revient. Ce qui fait que mon commentaire sera tronqué. Repris plus de quatre fois.

  • Le 27 septembre 2012 à 13:30 En réponse à : Docteur TRAORE Ibraïma : « Les élèves et étudiants burkinabè ont une attitude défavorable à l’égard du besoin d’indépendance et d’autonomie et de la prise de risque »

    Je crois que notre nouveau docteur fait du faux cul parceque pour entreprendre dans un pays,il faut avoir un modèle.Par exemple aux USA,tout le monde veut devenir comme Bill Gates,Mark Zuckerman,Steeve Jobs ou pourquoi pas Michael Jackson,Rhihanna etc...!Mais chez nous qui ?Alizèta gando ?Pifffffffff...elle est là par effraction et cela démontre bien qu’on ne peut pas entreprendre dans un milieu malsain puisque tous ceux qui réussissent,ils passent par des raccourcis en bafouant toutes les règles.Dans ces conditions comment voulez-vous qu’un gros ou un petit investisseur risque de tout perdre alors que même s’il a raison,vu que la justice est corrompue,il peut se retrouver à poils ? suis pas un spécialiste mais pour que les affaires marchent,il faut une JUSTICE LIBRE alors qu’au Burkina,il n’y a pas de justice,c’est le far west..Nos gouvernants l’ont voulu ainsi,alors la fonction publique restera le numéro 1 des entrepreneurs au Faso mais il ne faut pas qu’ils viennent trafiquer les chiffres pour dire que le taux de chomage au Burkina est de 2,3% alors que les vrais chiffres du chomage dans ce pays c’est entre 81 et 87%

  • Le 27 septembre 2012 à 14:39, par BASSAN BAGNON ROMARIC En réponse à : Docteur TRAORE Ibraïma : « Les élèves et étudiants burkinabè ont une attitude défavorable à l’égard du besoin d’indépendance et d’autonomie et de la prise de risque »

    Bonjour Monsieur TRAORE ! J me nomme Bassan Bagnon, titulaire d’une maitrise en droit option privée et je viens d’etre admis au concours d’entrée à l’Institut International des Assurances de Yaoundé. Je partage votre point de vue car n’ayant pas peur de le dire ni la honte de l’affirmer rares sont ceux des etutiants burkinabè qui prennent le risque d’entreprendre. Notre regard est tourné vers la fonction publique croyant y trouvé notre salut ? Mais en fin de compte ce ne sont que de maigre salaires qui ne parviennent pas à couvrir le mois.
    Cependant avec courage et determination on l’etudiant burkinabè pourra lever ce voile noir qui l’empeche de risque.
    J’aimerais Mr. Traoré solliter auprès de vous des informations sur le leadership managerial.
    Merci pour vos consils à la jeunesse burkinabè !