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CHRISTIANISME AU BURKINA : L’arrivée des Missionnaires catholiques en pays Lyela

mercredi 8 août 2012.

 

Les Lyela constituent une sous ethnie du groupe appelé Gourounsi. Localisé au Centre-Ouest du Burkina Faso, le pays Lyela, administrativement épouse les limites de la province du Sanguié. Le pays Lyela fait partie des régions du Burkina Faso, qui a connu très tôt le christianisme dans son expression catholique. En effet, c’est en mars 1912, que les missionnaires Pères-Blancs, fondèrent le poste missionnaire de Réo en pays Lyela. Cet article a pour but, de retracer l’historique de l’implantation de la mission catholique chez les Lyela. Ce travail de reconstitution de l’itinéraire des Pères de la société des Missionnaires d’Afrique jusqu’en pays Lyela a été possible, grâce aux archives des Pères-Blancs que nous avons consultés à Koudougou et Ouagadougou et par les enquêtes orales que nous avons également menées dans la région.

L’arrivée des missionnaires Pères –Blancs dans l’actuel territoire du Burkina Faso est étroitement liée à la colonisation française.A la fin de l’année 1898, la majeure partie de ce territoire, a été plus ou moins conquise conformément aux grandes décisions du congrès de Berlin. Dès 1900, l’occupation de la future colonie de Haute- Volta était effective et les colonisateurs français, pour mieux asseoir la domination coloniale dans tous ses aspects, s’attelaient à y introduire les formes de leur administration.

Cette situation permit aux Pères de la société des Missionnaires d’Afrique fondée par le Cardinal Charles Lavigerie, basés à Ségou depuis la conquête du Soudan, de réaliser un de leurs vœux à savoir la fondation d’une mission catholique en Haute-Volta. Ainsi le 22 janvier 1900, Monseigneur Augustin Hacquard fonda le premier poste de mission à Koupèla et une année plus tard, en juin 1901, le Père Templier inaugurait la mission Notre-Dame de l’Immaculée Conception de Ouagadougou.

C’est à partir du poste missionnaire de Ouagadougou, qu’un projet de fondation d’un nouvel établissement missionnaire en pays Lyela fut envisagé.

Au début de l’année 1902, le supérieur du poste missionnaire de Ouagadougou le Père Templier, effectua un voyage de reconnaissance dans le cercle de Koudougou et s’aperçut que « la population est tellement dense qu’on peut être certain de trouver de l’ouvrage en s’établissant n’importe où ». Dès son retour à Ouagadougou, la fondation d’une station de missionnaires catholiques dans ce cercle et précisément dans le village de Réo fut décidée.

Les premières démarches de mise en œuvre du projet d’évangélisation des Lyela commencèrent véritablement au cours de l’année 1904.

En effet, à cette date Monseigneur Hippolyte Bazin, nommé de Vicaire apostolique du Soudan en 1901 en remplacement Monseigneur Augustin Hacquard, chargea le Père Templier depuis la mission catholique de Ouagadougou, d’adresser une demande aux autorités administratives de l’A.O.F (Afrique occidentale française), pour solliciter l’autorisation d’ouvrir une station de missionnaires dans le cercle de Koudougou.

Le 7 septembre 1904, le Père Templier télégraphia au Gouverneur général de l’A.O.F, Merlin, pour lui demander d’approuver l’envoi de missionnaires catholiques en résidence dans le cercle de Koudougou. Le même jour Merlin transféra le télégramme au Délégué de Kayes William Merlaud Ponty, pour lui laisser la décision à prendre. Celui-ci répondit le 9 septembre 1904 à la demande du Père Templier par la négative.

Il convient en effet de savoir que le projet de l’ouverture d’une mission catholique en pays Lyela intervint malheureusement à une période où, l’anticléricalisme, marqué par une collusion dans les relations entre l’Eglise et l’Etat faisait rage en Europe. En 1904, les luttes anticléricales ont abouti à la séparation de l’Etat et de l’Eglise en Métropole. Ainsi, toute nouvelle fondation, était interdite par l’administration coloniale jusqu’à nouvel ordre. Celle-ci refusait ainsi de signer les demandes d’autorisation, qui étaient systématiquement mises aux archives.

Dès 1910, le rapprochement de l’Eglise et de l’Etat, eut pour conséquence la normalisation des relations entre les deux parties. Il n’était plus désormais question de refuser aux missionnaires, l’autorisation d’ouvrir de nouveaux postes missionnaires.
En 1911, Monseigneur Alexis Lemaitre, nouveau Vicaire apostolique, profita de l’amélioration des relations entre l’administration coloniale et la mission catholique, pour mettre à exécution le projet de fondation du poste missionnaire de Réo. Il entra ainsi en contact avec le Commandant de cercle de Ouagadougou, Henri d’Arboussier, qui ne fit pas d’opposition à la fondation d’un poste missionnaire en pays Lyela. Cependant, pour rester en conformité avec la procédure administrative, le Commandant de cercle de Ouagadougou ne laissa pas partir les missionnaires à Réo, sans une autorisation expresse du Gouverneur général de l’A.O.F.

L’autorisation fut immédiatement demandée au Gouverneur général, qui renvoya la lettre de demande au Lieutenant gouverneur basé à Bamako « qui régla définitivement cette question ».
Partis de Ouagadougou le 9 mars 1912, les Pères Thevenoud et Francois, arrivèrent à Koudougou le dimanche 10 mars où, ils furent reçus au poste militaire par le Commis des « Affaires indigènes » Ferron.

Le 11 mars 1912, les Pères de la société des Missionnaires d’Afrique, arrivèrent à Réo où ils furent reçus par le chef de canton, Pyo Ognini Bassoule. Celui-ci leur réserva un accueil chaleureux. Le 12 mars 1912, les missionnaires Pères-Blancs visitèrent le village de Réo et fixèrent l’emplacement du poste missionnaire. Selon nos sources orales, c’est dans le quartier Essosso, actuel secteur n°1 de la commune de Réo qu’ils ont choisi le terrain de la mission. Le 16 mars 1912, une chapelle fut rapidement construite, et les travaux de construction de la maison d’habitation des missionnaires, commencèrent aussitôt.

Adresse
Bazie Joel Appolinaire
Professeur certifié d’Histoire-Géographie
en service au lycée Song-Taaba
à Ouagadougou
Tél. (226) 76-40-99-85 ;
70-48-18-87

Sidwaya



Vos commentaires

  • Le 8 août 2012 à 10:47 En réponse à : CHRISTIANISME AU BURKINA : L’arrivée des Missionnaires catholiques en pays Lyela

    Félicitation Mr Bazie ! Je me suis précipité à lire cet article. En votre qualité d’historien, je vous encouragerais à mettre du temps pour écrire une histoire du peuple lyel ! C’est un besoin urgent ! Faites-le ! Ecrivez et publiez : c’est mémoire des jeunes générations car on n’a plus de repères ! Même nos "vieux" n’en savent pas assez ! Profitez encore d’une "tête" comme l’Ab. Nicolas BADO pour asseoir une vraie et credible histoire du lyolo ! yi b’an sèn mô !

  • Le 8 août 2012 à 11:35 En réponse à : CHRISTIANISME AU BURKINA : L’arrivée des Missionnaires catholiques en pays Lyela

    Beau boulot !!! Que Dieu bénisse le Lyolo et le Burkina tout entier

  • Le 8 août 2012 à 12:08, par JINAZOUM En réponse à : CHRISTIANISME AU BURKINA : L’arrivée des Missionnaires catholiques en pays Lyela

    Bonjour mon frère,
    Comme mon prédéceseur, je voudrais vous féliciter pour ces recherches que vous avez effectuées. Je vous exhorte à faire de nombreuses monographies. Il est vrai qu’une bonne partie des personnes ressources qui ont vécu cette implantation du christianisme dans le Lyolo a disparu. Mais, il existe encore, au fonds des cases, des vieux et des vielles, aux voix presqu’inaudibles érodées par le temps qui, s’ils sont approchés peuvent encore nous dire de nombreuses choses de la christianisation du pays lyela.Aux versions des Pères-blancs et des religieux actuels, il faudra confronter celles de ceux qui ont vécu ces moments (catholiques, musulmans ou anismistes). Au département d’histoire et archéo de l’UO vous trouverez certainement des monographies et des pré-mémoires et des mémoires de compatriotes à partir desquels vous pourriez peaufiner vos recherches. Cela m’intéresserait que vous analysiez les stratégies d’approche de l’Eglise à cette époque. C’est une question qui m’avait toujours intéressée tout comme le "christianisme noir" que nombre de Chrétiens pratiquaient.Egalement, la nature des liens ou les rapports entre les Pères-Blancs et l’administration locale.
    Du courage et bien à vous ! Ibrahim

  • Le 8 août 2012 à 12:54, par unouagalais En réponse à : CHRISTIANISME AU BURKINA : L’arrivée des Missionnaires catholiques en pays Lyela

    merci à vous Mr Bazié, tous mes encouragements. voilà ce qu’on demande à un intellectuel. cette année marque donc l’année du centenaire de l’installation des missionnaires dans le Sanguié

  • Le 8 août 2012 à 13:27, par terra seydou En réponse à : CHRISTIANISME AU BURKINA : L’arrivée des Missionnaires catholiques en pays Lyela

    je ne suis pas specialiste du pays lyela,mais j ai tout de meme trouver son ecrit laconique et peut documenter : si on se refere a l oeuvre de joseph ki zerbo notamment son livre sur la vie de ALFRED DIBAN on se rencontre que les dates fournies ici ne concordent pas avec la chronique du vieu DIBAN ALFRED sur le pays lyela au debut du siecle dernier

  • Le 8 août 2012 à 16:32, par indjaba En réponse à : CHRISTIANISME AU BURKINA : L’arrivée des Missionnaires catholiques en pays Lyela

    Ce qui m’intrigue avec ces religions dites révélées, c’est que les plus hauts intellectuels et théologiens à travers le monde n’arrivent même pas à s’accorder sur les concepts des livres saints (d’où différence entre Chiites et sunnites d’une part et entre protestant et catholique d’autre part). Qu’est ce qui est réservé alors à la pauvre dame de Réo ou de Boura qui n’est jamais allée à l’école, qui ne sait pas lire et à qui on a fait jeter les fétiches pour épouser une religion où ceux qui sont aller à l’école n’y comprennent pas grande chose ? Mais indjaba si les gens pensent que le Dieu de tout le monde est méchant au point de rendre son message difficile à coder à travers une langue étrangère.

  • Le 5 septembre 2017 à 16:58, par Patricia En réponse à : CHRISTIANISME AU BURKINA : L’arrivée des Missionnaires catholiques en pays Lyela

    Bonjour,
    Pour vous donner une idée du travail effectué par les missionnaires catholiques au Burkina Faso au milieu du siècle dernier( années 1950-1968), de leur regard sur les usages et coutumes qu’ils y ont découverts, de leur présence dans ce pays si vaste au climat déroutant si riche d’une faune exceptionnelle, je vous invite à lire un témoignage qui vient de paraitre aux éditions chapitre.com
    une Foi, un homme, une histoire.
    J’ai trouvé intéressant de lire comment ces hommes occidentaux, sortant d’une guerre qui a fait trembler l’Europe, ont aimé ce pays passionnément.

  • Le 16 janvier 2020 à 11:03, par gautier-Allarousse En réponse à : CHRISTIANISME AU BURKINA : L’arrivée des Missionnaires catholiques en pays Lyela

    Bonjour
    Je suis petite-fille d’un métis qui a été reconnu par son père français de métropole le 01.09.1919. J’ai l’acte de reconnaissance où il est précisé qu’il n’y a pas eu d’acte de naissance. Je peux vous l’envoyer mais ne sais pas comment faire ..?

    J’aimerais en savoir plus sur les personnes qui peuplaient cette région et sur qui pouvait être la mère ?
    Je pense que mon grand-père Georges Henri ALLAROUSSE né le 27.07.1916 à Bougoulma et décédé à Toulon en 1949 a du être recueilli par les missionnaires.

    Mais pourriez-vous m’en dire plus. Me dire si les missionnaires ont conservés des archives qui me permettraient de retrouver l’identité de la mère.? Quand receviez-vous des enfants ?

    Je cherche mes racines et je compte beaucoup sur vous pour m’aider quand je vois le beau travail que vous avez fait..

    J’ai lu aussi dans un livre que dans cette région on parlait de la "vente des fillettes" qu’est-ce que c’était ?

    Je vous remercie bien vivement à l’avance

    bien cordialement
    MARTINE