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MENACES DE DEGUERPISSEMENT A LINOGHIN : Des habitants en colère

jeudi 22 mars 2012.

 

Des habitants de Linoghin, (ex-Aménagement des vallées des volta (AVV), zone de l’Oubritenga, sont exaspérés. Il s’agit selon ces désespérés, d’un système ségrégationniste d’expropriation de terres mis en place par des groupements d’agriculteurs qui se réclament propriétaires terriens. Humiliations et xénophobie seraient le vécu quotidien de ces mécontents. L’administration aurait, à en croire ces agriculteurs, tourné le dos au problème. Aussi disent-ils ne plus faire confiance à ces dépositaires de l’autorité de l’Etat. Pour ces autorités, c’est une tempête dans un verre d’eau car, soutiennent-elles, « il n’en est rien du tout ». Du reste, nous avons assisté, dans cette localité, à une réunion de crise au cours de laquelle des intervenants ont versé des larmes. Nous avons également approché toutes les personnes incriminées dont les autorités locales.

Pour mémoire, la cécité des rivières avait poussé les populations riveraines des fleuves des Volta et de leurs affluents à migrer vers d’autres zones pour se mettre à l’abri de la « simulie » agent causal de la maladie des yeux, appelée l’onchocercose. Après la grande sécheresse de 1970, le gouvernement de Haute Volta, par l’appui technique et financier des organismes internationaux comme l’OMS, la FAO, et le PNUD, a initié le projet agricole d’Aménagement des vallées des volta(AVV). L’AVV avait pour mission précise d’organiser le repeuplement de ces terres hostiles et la promotion du développement socio-économique des populations qui y vivent.

C’est dans ce contexte que des populations se sont installées dans la zone de Linoghin, dans le Plateau Central à une cinquantaine de kilomètres de la capitale du Burkina Faso. Après ce projet et quarante années écoulées, ces populations sont laissées à elles-mêmes sans aucune garantie en matière de terres qui leur ont été données par le gouvernement. Aussi, ces dernières n’ont plus de référent technique dans le domaine de la production ni de textes qui leur confèrent la propriété des terres qu’elles occupent. Ce qui peut être considéré comme une démission de la part de l’Etat n’est pas sans conséquence pour la population. Ces paysans, venus des quatre coins du Burkina, ont lutté contre les intempéries pour dompter la nature agressive à la vie humaine.

Aujourd’hui, elles disent vivre dans un climat d’angoisse et de haine avec la peur d’être expulsées un jour comme de rats de leur terroir par d’autres paysans qui se réclament autochtones, c’est-à-dire, propriétaires terriens. « Nous avons toujours saisi les autorités administratives tant au niveau départemental que provincial chaque fois que de besoin, mais aucune solution définitive et satisfaisante n’a été trouvée », a expliqué Casimir Zoungrana, conseiller municipal de Linoghin. Les démons de la discorde et du mépris se sont installés entre l’administration et les administrés de cette zone. « En réalité, il n’en est rien car j’ai été maintes fois dans cette zone », rétorque Amidou Balima, Haut-commissaire de la province d’Oubritenga. Le casus belli a été la construction par un opérateur privé, d’un établissement secondaire dans cette zone.

Les participants protestent contre la construction d’une école dont la superficie aurait englouti des champs. « Mais à notre grand étonnement, ces autorités se sont rangées du côté des bourreaux, usant de toutes formes de dissuasions et de menaces à notre endroit pour nous faire plier mais sans succès », s’offusquent les responsables des Comités villageois de développement (CVD). Face à ce qu’elles appellent mépris de la part des autorités à son endroit, la population révoltée se dit prête à tout pour empêcher l’ouverture de cette école. Aussi se réserve-t-elle le droit de boycotter le double scrutin législatif et municipal de décembre prochain si l’administration ne tranche pas en sa faveur.

« Nous ne parlerons pas d’élections tant que nos problèmes ne seront pas réglés et c’est la décision prise par l’ensemble des habitants de nos villages concernant le scrutin de décembre 2012 », a déclaré Mathieu Compaoré, responsable des jeunes de Linoghin. Nous reviendrons dans les détails sur les dessous de ce conflit qui mérite qu’on y prenne garde.

Armel ILBOUDO

Le Pays