CARNET SANTÉ : Une guéguerre à la tête du Fonds mondialLe départ annoncé la semaine dernière du directeur exécutif du Fonds mondial de lutte contre le SIDA la tuberculose et le paludisme, Michel Kazatchkine, est en passe d’être le plus grand coup de tonnerre de l’année dans la Genève internationale. Créé en 2002 avec les fonds du multimillionnaire Bill Gates, le Fonds est à ce jour, la plus importante source de financement internationale pour la lutte contre le SIDA, la tuberculose et le paludisme. Au total et au titre de ces trois maladies, ce sont des millions de vies qui ont été sauvées grâce aux traitements, à la prévention, au renforcement des systèmes de santé dans les pays les plus pauvres du monde. Malheureusement, de nos jours, les engagements financiers s’effritent. Quel paradoxe ! Car c’est à ce moment même que nait la polémique autour de la décision du Pr français, Michel Kazatchkine, pourtant réélu en 2011 de quitter la tête de la direction exécutive de ce fonds. En effet, dans une missive adressée la semaine dernière « aux personnels, partenaires et amis » du Fonds, il indique qu’il quittera son poste le 16 mars 2012. Il a tenu à préciser que « c’est là, ma décision, même si elle a été difficile à prendre ». Dès lors, les observateurs dans la capitale suisse n’hésitent pas à parler de « putsch ». Car selon certaines sources, les administrateurs américains du Fonds, mécontents de ses liens avec Carla Sarkozy/Bruni cherchaient à écarter Michel Kazatchkine. Cependant, le conseil d’administration du Fonds dément tout lien entre la démission du Pr Kazatchkine et ses liens avec Carla Bruni-Sarkozy, ambassadrice bénévole du Fonds, accusée d’avoir intercédé auprès de l’institution au bénéfice d’un de ses proches. Deux chefs, c’est un de trop « Ma décision de quitter le Fonds mondial n’a rien à voir avec cette campagne média », a dit de la façon la plus ferme, le Pr Michel Kazatchkine. « Le conseil d’administration a pris la décision de nommer un administrateur général du Fonds auprès de moi qui rapporterait directement au conseil d’administration. Pour moi, c’est une question de principe, il ne peut pas avoir deux têtes dans une organisation », a-t-il déclaré dans une interview accordée à une radio française. « C’est un prétexte », s’insurge la prix Nobel, Françoise Barré-Sinoussi, de l’équipe du Pr. Luc Montagnier ayant découvert le virus du SIDA au début des années 80. Au-delà de cette péripétie, Françoise Barré-Sinoussi constate et déplore que certains pays donateurs réduisent leurs aides. En Europe, c’est le cas de l’Italie, de la Suède et de l’Allemagne. Au contraire, le Royaume-Uni et la France maintiennent leurs efforts. Il n’a eu de cesse d’aider le Fonds mondial à mettre en œuvre une vision d’un monde sans SIDA, sans tuberculose et sans paludisme. Bilélé BENIN Pr Michel Kazatchkine, un homme engagé Chez nous, l’on a reproché aux acteurs de la lutte contre le SIDA de perdre parfois plus de temps à se quereller qu’à lutter efficacement contre l’épidémie ; il en va peut-être de même en ce qui concerne la guéguerre suite au départ de Michel Kazatchkine de la direction exécutive du Fonds mondial. Pour les uns, c’est un forcing des Américains, engagés depuis 2010 pour se débarrasser de ce professeur français, jugé « trop indépendant ». Pour les autres, il s’agit d’en finir avec la résistance de Paris, après l’échec en novembre d’un vote de défiance contre Michel Kazatchkine, un directeur exécutif certes, visionnaire mais aux décisions parfois très contestées. « Une fausse affaire Carla Sarkozy/Bruni » (Ndlr : jetant la suspicion sur un contrat confié à un ami proche de la première Dame.)a même été livrée à la presse. Dans sa missive « aux personnels, partenaires et amis » du Fonds, le Pr Michel Kazatchkine exprime sa "fierté" d’avoir présidé aux destinées de cette institution qui est sur « une longue route encore à parcourir ». B.B.J. Sidwaya |