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Suspension du directeur général des douanes : Lui qui disait n’avoir pas d’état d’âme face à un fraudeur…

vendredi 6 janvier 2012.

 

Le poisson pourrit par la tête. Quelque temps après la publication du rapport 2010 du Réseau national de lutte anti-corruption (RENLAC), classant la Douane au 1er rang des services les plus corrompus au Burkina Faso, l’on se doutait bien de ce qu’on découvrirait : l’inculpation du désormais ex directeur général des douanes, Ousmane Guiro, dans la nuit du 31 décembre 2011, pour possession de près de deux milliards de F CFA en liquide. En attendant que la justice établisse clairement les faits, contre ou en sa faveur, l’on peut se rendre compte, et avec amertume, que certains n’aient pas tiré leçon de la crise du premier trimestre de l’année.

La crise qu’a traversée le Burkina Faso au début de l’année 2011 avait pour facteurs favorisants, entre autres, la mal gouvernance et la corruption à grande échelle. Il s’en est suivi une panoplie de mesures parmi lesquelles la valse de certains directeurs jadis considérés comme indéboulonnables. Le Gouvernement du Premier ministre Beyon Luc Adolphe Tiao, en donnant ainsi le ton, pensait sans doute sonner le tocsin comme pour dire, « désormais, plus rien ne sera comme avant ». Et cela a marché, ou du moins jusqu’à cette nouvelle affaire indescriptible impliquant Ousmane Guiro, directeur général des douanes jusqu’à sa suspension par décret présidentiel le lundi 2 janvier 2012.

Il est clair que le Gouvernement de Tiao, malgré sa bonne foi, ne pourra pas tout de suite dissuader les mauvais serviteurs de l’Etat de leurs forfaitures. Mais ce qu’on avait cru, un instant, c’était bien le fait que les citoyens véreux, de quelque niveau de l’échelle sociale que ce soit, se donneraient le bon conseil de faire désormais attention à leurs pratiques honteuses. Faire attention ne signifiant pas se cacher pour continuer de subtiliser les ressources de l’Etat ou s’enrichir des fruits de la corruption, mais simplement d’y mettre un terme.

2012 : mauvais signal ou plutôt bonne amorce ?

Que le présumé coupable dans cette affaire de détention d’objets de valeurs et de billets de banque soit reconnu coupable ou pas, on pourrait traduire cette histoire de véritable bombe de début d’année. Faut-il y voir un bon signe annonçant une bonne année contre la corruption, ou un oiseau de mauvais augure ? Fin 2012 nous permettra certainement d’y répondre plus clairement. Mais en attendant, il faut saluer la collaboration réussie entre les forces de sécurité, en l’occurrence la gendarmerie, et les populations qui a permis qu’un scandale de ce type soit révélé au grand jour. Ce qu’il convient d’ajouter, c’est que tout a une fin, et que rien n’arrive jamais avant son heure. L’institution douanière au Burkina Faso a toujours traîné une mauvaise réputation, et ce n’est pas l’affaire Ousmane Guiro qui dira le contraire. Au cas où l’ex directeur des douanes serait jugé coupable, ce serait un véritable soufflet à la Douane burkinabé dans son entièreté. Mais qu’à cela ne tienne, il n’y a pas de corrompus sans corrupteurs. L’autre vérité est que tous les agents de la douane ne sont pas corrompus, contrairement à ce qu’on pourrait penser. Heureusement d’ailleurs !

Là où il y a l’homme, il y a l’hommerie

Le feuilleton judiciaire auquel on s’attend inévitablement après les événements de la nuit de la Saint-Sylvestre 2011 conduira à la barre un individu et ses complices, tous présumés coupables des faits à eux reprochés. Evitons donc de cristalliser les débats sur une institution, à savoir la douane. Car il n’y a pas qu’à la douane qu’il existe l’ivraie. Dans tout groupe social ou toute institution regroupant des humains, il y a toujours du bon grain comme du mauvais grain. L’affaire Ousmane Guiro vient relancer la question de la corruption et des abus de tous genres constatés ça et là au Pays des Hommes Intègres. Combien d’autres cantines d’argent ou autres biens précieux mal acquis sommeillent dans le silence de certains comptes bancaires, dans certains domiciles ou autres endroits insoupçonnés du pays ?

Combien de malfrats dépensent au jour le jour sans vergogne des richesses volées, et qui malheureusement ne peuvent être appréhendés pour telle ou telle raison ? L’enjeu dans l’affaire Guiro réside dans le fait que tout le monde doit se rendre à l’évidence que la loi est faite pour tous et que par voie de conséquence, nul n’est au-dessus d’elle. Quel que soit le temps mis, justice est toujours rendue dans ce bas monde. Que chacun de nous fasse sa propre introspection et se dise qu’il est corrompu ou corrupteur, et surtout qu’il peut, avec dignité, éviter d’être l’un ou l’autre.

Christophe TAPSOBA

www.wikiburkina.info



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