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RECHERCHE DE LA NUIT DU DESTIN : Un moment de ferveur religieuse

mardi 23 août 2011.

 

Une nuit meilleure que mille mois d’adoration. C’est la nuit du Destin. Nous sommes dans la dernière décade du sacré mois de Ramadan où les fidèles musulmans sont appelés à redoubler d’efforts dans les bonnes actions pour l’obtention de cette nuit glorieuse. Le Cheick Abdoul Aziz Ouédraogo de Tansalga, président de l’Union fraternelle et de la solidarité islamique du Burkina Faso, nous cite des actes à poser dans l’obtention des bienfaits de cette fameuse nuit durant laquelle Dieu change le cours du destin de chaque croyant. Heureux sont donc ceux qui, pour cette cause, vont sacrifier leur sommeil. Mais, prévient l’imam de Tansalga, attention à la fuite de responsabilité familiale à travers des retraites spirituelles dans les mosquées au nom de la recherche de cette nuit durant ces dix dernières nuits. Elles s’étendent du 20 au 30 août 2011.

Selon le Cheik Abdoul Aziz de Tansalga, le jeûne musulman est un acte d’adoration et de crainte de Dieu. Il a laissé entendre ces propos à travers lesquels Dieu a dit au prophète Mohammad (Saw) : « Toute œuvre du fils d’Adam lui appartient sauf le jeûne qui est à moi : c’est moi qui en accorderai la récompense ». Le jeûne a une dimension sociale. C’est sa rupture collective le soir, dite « If tar ». D’où l’appellation de mois de solidarité. Un tour dans une famille nous a permis de toucher du doigt l’importance de cette rupture collective. Outre les bénédictions divines, le jeûne permet aux riches de jeter un regard compensateur sur les pauvres.

C’est pour cela que le prophète de l’Islam, dans son discours sur le jeûne, a incité les fidèles à faire rompre le jeûne d’un croyant même si c’est à l’aide d’un morceau de datte. Pour cause, un morceau de datte peut permettre à un croyant d’entrer au paradis. « C’est dans ce cadre que j’ai invité des frères musulmans à venir rompre le jeûne chez moi », nous a confié Mohammad Tao au secteur 22, Tampouy.

Le temps de la générosité

Mohammad Tao, théologien de formation, a cité un propos prophétique qui dit que celui qui fait rompre le jeûne des musulmans a la récompense de son jeûne et celle de ces derniers sans rien en diminuer. Si la générosité se fait selon les moyens, il a déboursé environ 120 000 FCFA pour satisfaire ses convives. « J’économise pour pouvoir faire ce genre d’invitation parce que je vois que c’est le moment le plus propice pour se rapprocher de Dieu », a-t-il dit. Pour la préparation de cette rupture collective, madame Tao née Sawadogo Awa s’est fait aider par des voisines. Avec deux moutons abattus, elles ont cuisiné plusieurs mets. "C’est à partir de 13h que nous avons commencé les préparatifs. Nous nous sommes reparti les tâches. Pendant que certaines faisaient des frites, la salade, le thé, d’autres préparaient les coquillettes, la bouillie, le bissap, le zoom-koom, etc. Tout se passait dans une bonne ambiance.", a-t-elle dit.

La rupture du jeûne

Chez Mohammed Tao, Nous avons assisté à deux séances de rupture de jeûne. Une avant la prière de Maghrib (coucher du soleil) et l’autre après cette prière. Pourquoi ? Le verset 187 du chapitre 2 du Coran dit : « Accomplissez le jeûne jusqu’à la nuit ». Malgré la clarté de ce verset les interprétations ne manquent pas. Pour certains, il faut se hâter de rompre parce que parmi les propos prophétiques, Sahl Ibn Sa’d rapporte que « la foi des gens ne cessera pas de bien se porter tant qu’ils hâteront la rupture de leur jeûne ». Parmi les arguments avancés par d’autres, il y a le fait que lorsque Aïcha, une des épouses du prophète, a été interrogée sur le fait de se hâter ou de retarder la rupture , elle a porté son attention sur le fait de se hâter à faire la prière de Maghrib et à rompre le jeûne. « C’est justement ainsi que faisait le messager de Dieu », a-t-elle dit (Mouslim, Jardin des vertueux, p. 365)

Rembourser le jeûne

Etant un des piliers fondamentaux de l’Islam, jeûner est une obligation pour tout musulman majeur jouissant de ses facultés mentales. En sont donc exemptés les enfants. Mais ils doivent s’y exercer afin de ne pas avoir des difficultés dans son accomplissement quand ils seront majeurs. Si Dieu n’impose à aucune âme ce qu’elle ne peut supporter, les personnes âgées n’ont pas à jeûner. Mais elles doivent pour chaque jour de jeûne non observé offrir 1kg de céréales en aumône. Les malades, les femmes en période de menstruation ou de lochies doivent rompre le jeûne pour le rembourser jour pour jour manqué, après Ramadan. Mohammad Tao a indiqué que les voyageurs doivent rompre le jeûne si leur distance à parcourir aller-retour est d’au moins 44km et s’ils doivent séjourner 10 jours au lieu de leur destination. Ils doivent également réduire les prières de 4 unités à 2 unités. Mais celui dont le voyage est une profession doit jeûner.

La nuit glorieuse

C’est dans les dix derniers jours de Ramadan que les musulmans redoublent d’ardeur dans la recherche de la nuit glorieuse dite « nuit du destin » ou « lailatoul qadr ». Qui gagne cette nuit garantit son année sur tous les plans. Donc, on dort moins. Citant un passage coranique, le cheick Abdoul Aziz Ouédraogo a indiqué que cette nuit est meilleure que mille mois d’adoration. D’où le constat de cette ferveur religieuse chez les musulmans. « Le prophète redoublait d’efforts dans sa recherche durant les 5 nuits impaires de ces 10 derniers jours : 21e, 23e, 25e, 27e, et 29e nuit », a dit le Cheick Ouédraogo. Parmi les actes à poser dans la recherche de cette nuit, il a cité le Zikr ou l’invocation. Par exemple, la demande de pardon à Dieu. Selon le Cheick, il n’est pas bon de jeûner en gardant rancune contre ses proches parents, sa famille, ses voisins et amis. Pour lui, les gens doivent se pardonner avant que Dieu ne leur pardonne. Sinon, a-t-il relevé, notre jeûne perd sa valeur. Il y a la lecture du Saint Coran ; les prières surérogatoires et les actes de bienfaisance comme l’organisation de rupture de jeûne collective ; faire l’aumône ou sadaqat. C’est faire vivre la joie dans le cœur des orphelins et des veuves. Entre autres, s’occuper de leur nourriture, santé, habillement et assurer la scolarité des pauvres et orphelins.

La retraite spirituelle

Une des meilleures façons de rechercher les bienfaits de cette nuit est de se retirer complètement dans une mosquée. C’est la retraite spirituelle ou « It- tikhâf ». Ce que font certains. Pour le Cheick, c’est très bien, encore faut-il rappeler aux responsables de famille que cela nécessite le remplissage de certaines conditions. On n’abandonne pas sa famille pour une retraite spirituelle sans assurer leur provision alimentaire en disant qu’on les confie à Dieu. On doit se soucier de sa famille, surtout si on a des enfants majeurs. Sinon qui va s’occuper d’eux à votre absence de 9 à10 jours ? S’est interrogé le Cheick. A défaut, on fait sa retraite chez soi à domicile dans la mesure de ses possibilités. « Si une femme fait cette retraite sans le consentement de son mari en rentrant à la maison la veille de la fête où le jour de la fête, elle aura commis un péché », a dit l’imam de Tansalga.

L’impôt de rupture du jeûne

Après un mois d’abstinence, les croyants sont encore soumis à l’impôt de rupture de jeûne, dit « zakat oul fitr ». C’est au chef de famille qu’il incombe de le prélever pour toutes les personnes vivant sous son toit, et ce, sans distinction d’âge et de confession. Selon le théologien Mohammed Tao, il correspond à environ 3 kg de céréale, par personne. Il peut être donné en espèce. Exemple : 900 F CFA par personne pour 3 kg de riz à 300 f le kg. Pour permettre aux musulmans pauvres de sentir la joie de cette fête, l’impôt de rupture de jeûne doit être donné la veille de la fête ou le jour de la fête avant midi.

La fête de remerciement

Après avoir été les convives de Dieu un mois durant, les fidèles musulmans lui rendent grâce pour tous les bienfaits qu’Il leur a accordés ou qu’Il leur accordera. C’est ce jour qui marque la fête du mois de Ramadan ou « Ide al fitr ». Selon le Cheik Abdoul Aziz, ce jour est un grand jour de remerciement au Créateur. Il ne doit pas se traduire par un retour à Sa désobéissance à travers des actes qu’Il nous a déjà interdits comme servir ou consommer l’alcool. « Le musulman ne doit sous aucun prétexte servir le jour de la fête ce qui est illicite en Islam », a souligné le Cheick avant d’ajouter que la réjouissance doit se faire dans la joie à travers ce que Dieu nous a permis. Pour lui, la fête ne signifie pas que le jeûne est fini donc on peut retourner à nos mauvaises habitudes comme la consommation d’alcool ou de la viande de porc, la fornication, l’adultère, l’usure, le vol. Cela signifierait que non seulement le jeûne mais aussi les prières et invocations faites n’ont pas porté fruit. Ne pas retourner à nos mauvaises habitudes témoigne donc de la réussite d’un mois de dévotion. « Au sortir de ce mois de pénitence, le musulman doit, en principe, pouvoir s’abstenir de commettre des actes interdits en Islam de peur que quelqu’un ne lui dise que son jeûne n’a pas été agréé », a relevé le Cheick.

Source : Discours du prophète sur le mois de Ramadan


Dimension sociale du jeûne

Interrogé sur la raison de la prescription du jeûne, Al Houssein, petit-fils du prophète a répondu : « C’est afin que le riche ressente la difficulté de la faim, et soit de ce fait compatissant envers le nécessiteux ».

Hamadi BARO (Collaborateur)

Le Pays