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lefaso.net

Mutineries dans les garnisons du Burkina : 566 militaires radiés dont 217 déjà en prison

vendredi 15 juillet 2011.

 

Rien ne sera plus comme avant dans la grande muette au Faso. En tout cas, c’est ce message de fermeté qu’a livré ce jeudi à la presse le chef d’état-major général des armées, le Général Honoré Nabéré Traoré, entouré des principaux responsables des Forces armées nationales (FAN).

Pour ce faire, le Général Traoré a annoncé des mesures visant à rompre avec les cycles de mutineries dans le pays.
Au nombre de ces actions de salubrité militaire figure la résiliation de contrats de personnels de l’institution. Au total, 566 militaires sont concernées par la mesure. 217 d’entre eux, qui font actuellement l’objet de poursuites judiciaires, sont déjà transférés à la Maison d’arrêt et de correction de l’armée (MACA) et à la Maison d’arrêt et de correction de Ouagadougou (MACO). La liste des militaires à radier ou à punir pourrait s’étendre dans les jours ou semaines à venir parce que les enquêtes se poursuivent pour identifier tous les éléments qui ont pris part aux mutineries dans les différentes garnisons.

A travers ces sanctions, la hiérarchie militaire a voulu, à écouter le Chef d’état-major général des armées, prendre sa responsabilité.
« Elles constituent un signal fort à l’attention de la communauté nationale quant à la ferme volonté des Forces armées nationales de demeurer toujours une armée républicaine respectueuse des lois et intimement liée à la Nation », a indiqué le Général Traoré.
Et d’expliquer que la répétition du phénomène des mutineries de plus en plus rapprochées dans le temps (1978, 1999, 2006 et 2011), avec une violence grandissante, constituait une source d’inquiétude et un problème majeur autant pour la démocratie que pour l’armée. D’où son interpellation de la conscience nationale, au regard notamment des effets induits des revendications qui sont la destruction de l’équilibre social et la fragilisation de l’économie.

Les FAN ne pouvaient laisser impunis

Il est reproché entre autres aux militaires sanctionnés les fautes contre l’honneur, la morale, la probité et les devoirs généraux du militaire avec incitation au désordre.
« Les FAN ne pouvaient laisser impunis des actes déshonorants, contraires à l’éthique et à la déontologie du métier des armes. L’Armée nationale ne peut tolérer des actes de vandalisme, l’utilisation du matériel militaire à des fins autres que la défense de la Nation et de l’intégrité du territoire. Rien ne justifie de prendre les armes pour des revendications corporatistes.

Rien ne peut justifier non plus surtout, que le militaire retourne son arme contre les populations qu’il doit défendre en tout temps et en tous lieux ; ces vaillantes populations qui lui donnent gîte et couvert, habillement et solde, ainsi que l’arme avec laquelle elles ont été menacées et spoliées », s’est expliqué l’ancien président de la fédération burkinabè de football.
Dans son entendement, les présentes mesures ne sont pas prises de gaieté de cœur, mais par devoir, par responsabilité.

Pas de panique pour la sécurité des populations

Face aux inquiétudes des journalistes par rapport au problème de sécurité que pose la décision de radier autant de monde rompu au maniement des armes des effectifs de la grande muette, le chef d’état-major s’est voulu rassurant. « Des instructions ont été données concernant la sécurité des populations. Pas de panique » rassure t-il.
A ce niveau, le patron de l’armée a également dit que les armes pillées par les mutins ont été récupérées.

Des éléments du Régiment de sécurité présidentielle (RSP) font-ils partie des sanctionnés ?
Sur cette question, la réponse est affimative.
En dehors des sanctions disciplinaires et pénales, quelles les autres mesures envisagées pour redorer véritablement le blason de la grande muette. Concernant cette préoccupation, le Chef d’état-major général des armées a laissé entendre que le commandement avait pris conscience de ses manquements et allait se ressaisir, que des mesures allaient être prises au niveau des recrutements et de la formation pour que les FAN puissent désormais jouer pleinement et dignement leur rôle dans le renforcement de la démocratie et de la République.

Par rapport au bilan de la mutinerie de Bobo, il reste à 6 morts.
L’estimation financière de l’ensemble des dégâts causés à l’armée du fait des mutineries, sans être exhaustive, se monte à plus de quatre milliards de francs CFA, rien qu’à considérer les habillements volés ou bousillés dans les magasins.

Grégoire B. BAZIE
Ph. Bonaventure PARE

Lefaso.net


Déclaration liminaire du chef d’état-major général des armées a l’occasion de la conférence de presse du jeudi 14 juillet 2011 sur la résiliation de contrats de personnels militaires des forces armées nationales

Mesdames et Messieurs les Journalistes,
Je voudrais tout d’abord saluer la présence des différents organes de presse de notre pays à cette conférence et leur adresser mes sincères remerciements.

La circonstance qui nous vaut de nous rencontrer aujourd’hui est liée aux récentes mutineries qui ont essaimé les différentes garnisons de notre pays et au cours desquelles des militaires se sont illustrés de manière négative, portant un coup sérieux aux liens Armée-Nation.

Je voudrais encore une fois, présenter mes condoléances aux parents de toutes les victimes, pour ces pertes que nous ne cesserons de déplorer, exprimer ma compassion à l’endroit des blessés et formuler de manière générale mes sincères regrets à l’endroit de toutes les victimes ainsi que des populations qui ont vécu dans la peur et l’angoisse durant ces moments difficiles.

Mesdames et Messieurs,

Il vous souviendra que durant toute cette crise, les autorités au premier rang desquelles se trouve le Président du Faso, Chef Suprême des Forces Armées Nationales (FAN), ont privilégié l’écoute et le dialogue. Elles ont fait preuve de patience et de retenue pour trouver une issue pacifique à ces manifestations contraires aux lois de la République, au statut des personnels des FAN au Règlement de Discipline Générale en vigueur et à l’éthique professionnelle militaire.

Malgré ces bonnes dispositions de la hiérarchie, des groupes de militaires se sont montrés intraitables et imperméables à toute idée pacifique. Ils se sont ainsi livrés à des actes d’une rare violence caractérisés par des vols et pillages, des destructions de biens publics et privés au préjudice de l’Armée, de l’Etat et des populations, particulièrement à Ouagadougou et Bobo-Dioulasso où les villes ont été prises en otages.
Face aux dérapages attentatoires à l’ordre public et en exécution de la réquisition complémentaire spéciale n0 2011-001/PM du 1er juin 2011 de Son Excellence Monsieur le Premier Ministre, le Commandement a déféré à l’instruction de rétablir l’ordre en vertu de la loi.

Ainsi un Groupement d’intervention constitué d’unités provenant du Régiment Para Commando (RPC) de Dédougou, de la Gendarmerie Mobile et du Régiment de Sécurité Présidentielle a mis fin aux activités des mutins de Bobo-Dioulasso dans la mi-journée du 03 juin 2011.

Mesdames et Messieurs,

Les FAN ne pouvaient laisser impunis des actes déshonorants, contraires à l’éthique et à la déontologie du métier des armes. L’Armée nationale ne peut tolérer des actes de vandalisme, l’utilisation du matériel militaire à des fins autres que la défense de la Nation et de l’intégrité du territoire. Rien ne justifie de prendre les armes pour des revendications corporatistes. Rien ne peut justifier non plus surtout, que le militaire retourne son arme contre les populations qu’il doit défendre en tout temps et en tous lieux ; ces vaillantes populations qui lui donnent gîte et couvert, habillement et solde, ainsi que l’arme avec laquelle elles ont été menacées et spoliées.

Des enquêtes ont été diligentées dans toutes les garnisons. Certaines sont toujours en cours tandis que d’autres ont déjà été bouclées. Des poursuites judiciaires sont actuellement engagées contre 217 militaires déjà déférés à la MACA et à la MACO.

Une réunion de commandement élargie s’est penchée le jeudi 23 juin 2011 sur le cas des militaires indisciplinés. Prenant acte des résultats des enquêtes ayant abouti, l’ensemble de la hiérarchie militaire a proposé la résiliation du contrat d’engagement de cinq cent soixante six (566) militaires pour les fautes de deuxième catégorie qui sont :
les fautes contre l’honneur, la morale, la probité et les devoirs généraux du militaire avec incitation au désordre. Sont donc concernés par la mesure : 362 de l’Armée de Terre ; 142 du Groupement Central des Armées et 62 de l’Armée de l’Air.

Conformément aux dispositions du statut des personnels des FAN, certains militaires de carrière concernés par ces actes d’indiscipline feront l’objet d’une procédure administrative appropriée.

Les mesures disciplinaires entrainant la sanction statutaire de résiliation du contrat d’engagement sont conformes à l’article 91 du Statut Général des personnels des Forces Armées Nationales qui stipule : « Certaines fautes jugées particulièrement graves par le commandement peuvent, sur décision d’office du ministre chargé des armées, après proposition du chef d’état-major général des armées, entraîner les sanctions énumérées dans les articles 88, 89 et 90 ».

Lesdits articles sont relatifs à la résiliation du contrat et à la radiation avec versement des droits légaux.

Mesdames et Messieurs,

La répétition du phénomène des mutineries de plus en plus rapprochées dans le temps : 1978, 1999 , 2006 et 2011, avec un mode opératoire de plus en plus violent, constitue une source d’inquiétude et un problème majeur autant pour la démocratie que pour l’institution militaire elle-même.

La conscience nationale est interpellée au regard des effets induits des revendications qui sont la déstructuration de l’équilibre social et la fragilisation de l’économie.

Les sanctions disciplinaires régulières appliquées aux personnels militaires fautifs servent d’exemples.

Elles constituent un signal fort à l’attention de la communauté nationale quant à la ferme volonté des Forces Armées Nationales de demeurer toujours une armée républicaine respectueuse des lois et intimement liée à la Nation.

De part leur valeur éducative, elles contribuent au renforcement de la cohésion et à la réaffirmation de l’unité de pensée et d’actions de notre outil commun de défense. Quelques personnes irresponsables, sans vocation militaire réelle ne doivent pas en imposer à l’institution. C’est pour ce faire que les punitions dont il s’agit doivent être comprises dans toute leur rigueur.

La punition redresse la conduite et sanctionne l’oubli du devoir. Pour ancienne qu’elle soit, cette maxime purement militaire n’en demeure pas moins l’un des principes cardinaux de l’institution militaire.

Je vous remercie.



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