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Civisme à l’école : Des vertus, aujourd’hui en perte de vitesse

jeudi 9 juin 2011.

 

L’effritement des valeurs morales est une réalité dans certaines écoles burkinabè. L’hymne national, la montée des couleurs et les cours de morale sont relégués au second plan. L’incivisme des élèves devient de plus en plus notoire. Constat dans certaines écoles de la ville de Ouagadougou.

Un mât haut d’environ 0,5cm, tordu, pas de drapeau au sommet. C’est le spectacle qui se présente dans une des écoles primaires située en plein centre-ville de Ouagadougou. L’image est frappante et interpelle tout de suite tout éducateur. En effet, comment imaginer qu’un lieu qui est censé être le creuset des bâtisseurs de l’avenir d’un pays, un des symboles de l’Etat, à savoir le drapeau, s’y soit pas. A cette interrogation, la directrice de l’établissement, Mme P.K, bien consciente de la situation se met sur la défensive.

L’air gênée, elle affirme qu’elle est à sa première année dans l’école et qu’elle n’a fait qu’hériter de ce problème. Elle ajoute ensuite que l’explication à elle donnée est que chaque fois qu’on fixe un mât, les voleurs s’en empare par la suite. « C’est une des raisons qui expliquent que notre mât soit pratiquement réduit à sa plus simple expression. En réalité nous avons le drapeau car le Ministère de l’Education nationale et de l’alphabétisation (MENA) nous en a offert, par contre pour le mât, c’est l’Association des parents d’élèves (APE) qui devraient s’en occuper » a-t-elle également indiqué. Le cas n’est pas isolé, car dans une autre école au secteur n° 28, à peine peut-on déceler le lieu où le mât devrait être fixé. Il est carrément inexistant. « Vous-même vous constatez qu’il n’y a pas de mât » relève la directrice de l’école, certainement pour éviter de s’étendre sur le sujet. Heureusement que d’autres écoles tentent à préserver les bonnes vieilles habitudes.

A l’école Kamsaonghin-Sud par exemple, rien à voir avec les établissements déjà visités. Le mât est bien présent et le drapeau flotte fièrement à notre arrivée. « La montée du drapeau est effective dès 7h 25mn » a indiqué Jean Pierre Nikièma, directeur de l’école Kamsaonghin-Sud A. Il fait savoir que la montée des couleurs chaque matin est obligatoire et se fait à tour de rôle par les différentes classes . « Egalement, lors des cours d’éducation civique, nous leur apprenons l’importance du drapeau pour un pays. A partir du CP1, nous initions les enfants au ditanyè et cela est de rigueur dans les autres classes » note-t-il. Eh oui ! Le ditanyè, l’hymne national burkinabè, l’hymne de la victoire. En effet, tout comme le drapeau, le nom du pays, a été changé le 4 août 1984, par le Conseil national de la révolution (CNR) dirigé par le capitaine Thomas Sankara. En lieu et place de Haute Volta, le pays s’appelle désormais Burkina Faso et le drapeau "noir, blanc, rouge", est devenu "rouge, vert frappé d’une étoile à cinq branches jaune au milieu". Aussi le « ditanyè" remplace l’ancien hymne national, « La fière Volta ».

A l’instar des couleurs nationales, quelles connaissances les élèves ont-ils de l’hymne national ? Selon Mme P.K., directrice d’une école du centre-ville de Ouagadougou, l’hymne de la victoire est appris au élèves. Cependant, nous avons constaté que sur trois élèves de la classe de CM2 interrogés, aucun n’a pu le chanter correctement. Pourtant madame la directrice insiste que l’hymne est bel et bien appris aux élèves et que c’est peut-être l’émotion d’être devant un journaliste qui justifie cet état de fait. Par la suite le même exercice soumis à deux élèves du CM2 de l’école Kamsaonghin-Sud A donne un résultat satisfaisant. Ils l’exécutent non seulement sans problème mais se donnent le luxe de faire des commentaires là-dessus. C’est le cas d’Alima Nana qui, après avoir chanté le ditanyè a lancé ceci : « C’est la chanson de notre pays et on doit la connaître ». Et Kader Karanga de la même classe d’ajouter que l’hymne national et le drapeau permettent de reconnaître le Burkina tant à l’intérieur qu’ à l’extérieur.

Est-ce à dire que le drapeau et l’hymne nationale sensibilisent mieux les élèves sur les symboles de l’Etat ? Cela n’est peut-être pas exclu. En réalité, chanter l’hymne le matin à la montée des couleurs et refaire le même exercice le soir pourrait renforcer le cours d’instruction civique dans les écoles primaires ainsi que l’esprit patriotique des jeunes. Ainsi, il est peut-être compréhensible que des élèves n’ayant pas l’habitude d’exécuter le ditanyè chaque jour aient des difficultés pour le maîtriser. Pourtant, toutes les écoles devraient bénéficier de ce minimum de conditions (avoir un mât et un drapeau), car que vaut ce qu’on apprend aux enfants, s’ils n’ont pas acquis un certain nombre de valeurs à même de faire d’eux des hommes crédibles de demain ayant un sens élévé du civisme et du patriotisme ? D’ailleurs l’actualité brûlante interpelle tout le monde. Des élèves qui incendient des édifices privés, d’autres qui insultent leurs enseignants tandis que certains saccagent des symboles de l’Etat tels que des gouvernorats et des commissariats.

C’est à se demander si ces jeunes burkinabè n’ont pas perdu leurs repères. Que devient le patriotisme, le respect des anciens et des symboles de l’Etat dont se targuent les Burkinabè ? A une certaine époque, lors de l’exécution de l’hymne national accompagnée de la montée du drapeau, la discipline avec laquelle cela se faisait forçait le respect et l’admiration. Mais aujourd’hui, peu de personnes se préoccupent de ces "commodités". C’est pourquoi le MENA doit encourager les pratiques citoyennes dans les écoles.

L’éducation civique et morale : un impératif

Selon Bayé Dao, directeur de la recherche et du développement pédagogique, le MENA est conscient de la situation. Il affirme que les cours d’éducation civique et morale n’ont jamais été abandonnés. Toutefois, il reconnaît que cette discipline a été négligée durant un certains nombre d’années. De son avis, certain enseignants utilisaient les heures de l’éducation civique et morale pour dispenser d’autres disciplines. De plus, il déclare que les instituteurs ne possédaient pas de guides en la matière. Ainsi les programmes ont été améliorés et des thèmes comme le respect des couleurs nationales y ont été introduites. Il précise que ce nouveau programme est en train d’être introduit dans les trois sous-cycles de l’école primaire : cours préparatoire, cours élémentaire, cours moyen.

De même, des guides d’Education civique et morale (ECM) pour les enseignants du primaire sont, en, expérimentation au niveau des écoles. A ce propos, l’ex-ministre de l’Education nationale et de l’Alphabétisation, Marie Odile Bonkoungou déclarait lors du lancement de celui-ci le jeudi 18 mars 2010 que "l’ECM traite d’abord des valeurs dont le patriotisme". Pour elle, un pays qui se dit souverain doit compter sur des hommes et des femmes prêts pour la cause nationale et qu’ en l’absence de vertus cardinales comme le travail, le respect, la solidarité, le pardon, on ne peut construire un pays.

C’est dans ce sens que le ministère de la Promotion des droits humains avait également instauré le concours de la citoyenneté à l’école primaire afin d’inciter les écoliers à être plus citoyens dans les actes qu’ils posent.

Pour être une école lauréate de ce concours, il fallait entre autres, satisfaire aux critères tels que l’existence d’un mât, d’un drapeau, l’exécution de l’hymne national et l’enseignement de l’instruction civique. Quant à la Grande chancellerie des Ordres burkinabè, son secrétaire général, Rigobert Semdé a fait savoir que le grand chancelier, le colonel Mamadou Djerma et ses collaborateurs n’hésitent pas à donner des conférences dans les écoles pour expliquer le sens et l’intérêt des grands symboles du pays.

Aussi, ils abordent souvent les notions de patrie, de civisme, de nation, des armoiries, des décorations et l’hymne national. Néanmoins, malgré les actions entreprises par l’Etat, il faut se rendre compte de l’évidence. Toutes ces mesures seront vaines si les Burkinabè, jeunes comme vieux, fonctionnaires comme paysans, ministres comme subalternes, ne retournent pas à l’école du civisme et de la morale. Car ceux qui sont censés éduquer les enfants doivent donner l’exemple. Sinon, c’est une perte que d’enseigner l’éducation civique et morale dans l’enceinte des quatre murs alors que l’écolier voit tout le contraire autour de lui. Comme le dit ce proverbe rwandais « Tout enfant bien élevé, a connu de vrais parents ».

Raphaël KAFANDO


Hymne national du Burkina Faso : le Ditanyé

Contre la férule humiliante, il y a déjà mille ans, la rapacité venue de loin les asservir, il y a cent ans.

Contre la cynique malice métamorphosée en néo colonialisme et ses petits servants locaux. Beaucoup flanchèrent et certains résistèrent mais les échecs, les succès, la sueur, le sang ont fortifié notre peuple courageux et fertilisé notre peuple courageux et fertilisé sa lutte héroïque.

Et une seule nuit a rassemblé en elle l’histoire de tout un peuple.

Une seule nuit a déclenché sa marche triomphale vers l’horizon du bonheur. Une seule nuit a réconcilié notre peuple avec tous les peuples du monde à la conquête de la liberté et du progrès.

La patrie ou la mort nous vaincrons !


Emblème du Burkina Faso

L’emblème du Burkina Faso est un drapeau bicolore (rouge et vert), divisé en deux bandes horizontales de dimensions égales.

Le centre du drapeau est frappé d’une étoile jaune/or à cinq branches.

La ligne reliant sa pointe supérieure à son point central est perpendiculaire à la ligne de jonction des deux branches du drapeau


Signification des couleurs

Rouge : il symbolise le sang versé hier, aujourd’hui et demain par les martyrs de la Révolution pour en assurer la victoire. Par extension, il représente tous les sacrifices du peuple burkinabè

Vert : c’est le symbole des diverses richesses agricoles de notre peuple. Il symbolise par extension l’abondance qui fera le bonheur de notre peuple.

Etoile jaune : guide idéologique de la Révolution démocratique et populaire dans sa marche radieuse.


Les armoiries du Burkina Faso

- Une flamme portant la devise du pays "Unité-Progrès-Justice" qui supporte l’ensemble "tige de mil-lance-écusson".

- Les deux étalons symbolisent la noblesse du peuple burkinabè. Leur position indique, l’action et leur disposition, la nécessité et l’importance de l’Union qui fait la force du peuple.

- L’écusson symbolise la protection de la nation et l’amour de la patrie : bouclier, contre les aléas, rempart contre toutes les agressions, il assure la sécurité de l’Etat.

- Les lances symbolisent la détermination des fils et filles du Burkina à défendre leur patrie : leur position croisée traduit la vigilance et la bravoure de ce peuple.

- Le livre ouvert symbolise la quête du savoir et de l’instruction, facteurs de progrès et de développement.

- Les épis de mil symbolisent l’aspiration à l’autosuffissance alimentaire et à l’abondance.

Source brochure de la Grande chancellerie du Burkina

Sidwaya



Vos commentaires

  • Le 9 juin 2011 à 15:11, par Renaud Bambara En réponse à : Civisme à l’école : Des vertus, aujourd’hui en perte de vitesse

    Mr le journaliste très beau travail !!!!! Mais une question : Il fallu combien de temps après la mort du Capitaine Sankara pour qu’on reintègre ses methodes : la montée du drapeau et le port des uniformes ? Après avoir baffouer l’avenir et le droit a l’éducation ; on vient nous parler de ses choses. C’est bien, mais il faudra beaucoup investir sur l’éducation et la santé, au lieu de realiser des grands chantiers qui ne serve à rien. Comme ses fameux echangeurs ; qu’un jour mème un de ses elèves n’aura mème pas la chance de monter sur sa avec une voiture, n’en parlons mème du velo. On a beaucoup a faire encore en Afrique ; precisement au Faso