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Partenariat Iran-Afrique : Créer un nouvel ordre mondial

lundi 27 septembre 2010.

 

Dans le but de redéfinir un nouveau type de partenariat avec le continent africain, la République Islamique d’Iran a initié et abrité, les 14 et 15 septembre 2010, un forum dénommé ‘’Forum Iran-Afrique’’. La cérémonie d’ouverture de cette rencontre a été présidée par le Président Iranien, Mahmoud Ahmadinejad qui avait à ses côtés les Présidents du Malawi et du Sénégal, Leurs Excellences le professeur Bingu Wa Mutharika, Président en exercice de l’Union Africaine, et Maître Abdoulaye Wade, Président en exercice de l’OCI. Etait également présent au présidium SEM Alpha Omar Konaré, ancien Président du Mali et ancien Président de la Commission de l’Union Africaine. Ont participé à cette rencontre une vingtaine de pays africains, dont le Burkina Faso qui y a été représenté par le Ministre d’Etat, Ministre des Affaires Etrangères et de la Coopération Régionale, SEM Bédouma Alain Yoda.

Ce Forum, premier du genre, se voulait un rapprochement entre l’Iran et les pays africains qui partagent beaucoup de valeurs dans leurs cultures respectives, et de similitudes dans leur histoire, notamment la colonisation mais qui ont, jusqu’à ce jour, entretenu des relations plus ou moins distantes et timides.

Le Président iranien, après avoir rappelé le passé de colonisation et de pillage des peuples iraniens et africains, a dit l’importance que revêt ce forum pour la partie iranienne. Cette rencontre, a-t-il soutenu, doit permettre de donner une autre orientation à la marche actuelle du monde. Car, outre ce qu’ils ont vécu dans le passé, ce qui rapproche les Iraniens et les Africains aujourd’hui, c’est leur commune dénonciation de la gestion actuelle du monde marquée par l’injustice et l’unilatéralisme. L’Afrique et l’Iran plaident pour l’édification d’un monde plus juste et plus stable. Le Président Ahmadinejad s’est dit convaincu que l’Afrique et l’Iran sont capables de faire émerger un nouvel ordre mondial basé sur « la pureté des intentions, la justice, la paix et la sécurité durable ». Pour y parvenir, le Chef d’Etat de la République Islamique d’Iran promet que son pays ne ménagera aucun effort pour le développement de ses relations avec l’Afrique.

Le Président en exercice de l’Union Africaine, pour sa part, s’est félicité de cette initiative qu’il a qualifiée d’ « évènement important », car les relations entre l’Afrique et l’Iran, dira-t-il, doivent faire l’objet de révisions sur de nouveaux paramètres. Il a, pour cela, lancé une invite aux iraniens à venir découvrir le continent africain, un continent qui offre de grandes opportunités et qui regorge d’énormes potentialités et d’immenses ressources naturelles et humaines.

La nouvelle orientation à donner à la coopération avec l’Iran doit prendre en compte les priorités des pays africains qui s’articulent principalement autour de la sécurité alimentaire, les infrastructures, le transport, les nouvelles technologies, les changements climatiques. Le partenariat entre l’Iran et les pays africains, pour être un partenariat gagnant-gagnant, doit donc prendre en compte ces priorités.

Le Président Abdoulaye Wade, quant à lui, a rappelé le passé colonial des deux parties et a dit que leur nouvelle collaboration devra, à terme, conduire à la création d’un nouveau cercle de solidarité.
Pour Alpha Omar Konaré, l’Afrique a beaucoup à apprendre de cette nouvelle expérience avec l’Iran qui a une civilisation millénaire. L’Afrique doit s’inspirer de la résistance farouche de l’Iran qui lui a permis de conserver son identité à travers particulièrement la langue. L’ancien Président de la Commission de l’Union Africaine a donc évoqué l’impérative nécessité pour l’Afrique de sortir de la dépendance morale et idéologique et de s’éloigner de la crise morale et spirituelle qui sévit actuellement en Occident.

Pour lui, l’alliance entre l’Iran et le continent africain doit permettre de « fonder une nouvelle architecture internationale ». Selon lui, l’interlocuteur de l’Iran pour un partenariat gagnant-gagnant, ce sont les Etats-Unis d’Afrique, un projet cher à tous les Africains. L’ancien Président de la Commission de l’Union Africaine a émis le vœu que ce projet voit le jour pour permettre enfin à l’Afrique d’être plus forte. Il a souhaité que les deux présidents africains présents à ce premier forum œuvrent à l’organisation et à la tenue du Sommet Iran Africain.

Quelle spécificité pour le partenariat Iran-Afrique ?

Le vent nouveau qui souffle entre le continent africain et l’Iran ne doit pas être un vent ordinaire. Selon Alpha Omar Konaré, le partenariat entre les pays africains et l’Iran doit revêtir une spécificité qui puisse faire la différence avec tous les autres liens que l’Afrique entretient avec d’autres pays. Sans cette spécificité, ce partenariat sera un de plus et ne permettra pas au continent d’aboutir aux résultats escomptés.
Les échanges durant le forum ont porté sur des thèmes très riches et variés qui devront permettre à terme d’identifier et de repérer cette indispensable spécificité. Ces thèmes portaient notamment sur plusieurs sujets dont, entre autres, le rôle de l’Afrique dans le système international, l’Afrique et la crise économique mondiale, la coopération régionale en Afrique, l’environnement des investissements en Afrique, le dialogue des cultures, l’Afrique comme site d’opportunités industrielles, le rôle des média dans la promotion de l’unité en Afrique, l’agriculture comme base du développement économique en Afrique, la coopération entre les secteurs privés iranien et africain.

Tous ces thèmes ont été développés par d’éminents orateurs africains et iraniens issus du monde scientifique, universitaire et politique. Parmi les orateurs ouest africains annoncés il y avait Mamadou Coulibaly, Président du parlement ivoirien, Alexander Asum-Ahensah, Ministre de la Culture du Ghana, Ahmed Diallo, recteur de l’Université de Bamako, Aboubacar Koli Koroma, Secrétaire Général du Ministère de l’industrie de la Guinée Conakry, Mohamad Sanusi Daggash, Ministre du Travail du Nigéria, le Ministre du développement rural de la Mauritanie, Ibrahim Ould Mbarek Ould Mohamed El Mokhtar.

L’opportunité d’un partenariat intelligent

Le Chef de la diplomatie burkinabè, SEM Bédouma Alain Yoda, a animé, avec le ministre nigérian du travail et le ministre délégué aux Affaires étrangères du Soudan, Kamal Hassan Ali, un panel sur les perspectives de la coopération entre l’Iran et l’Afrique.

Dans sa contribution aux échanges, le Ministre d’Etat a salué l’avènement du nouveau partenariat entre l’Iran et les pays africains qui ont pour leur grande majorité accédé à la souveraineté il y a seulement cinquante ans. Ces pays, qui ont donc vécu depuis plusieurs décennies sous l’esclavage et ensuite sous la colonisation, sont, aujourd’hui, entrain de se reconstruire, de prendre leur autonomie par rapport à ce passé esclavagiste et colonial. L’Afrique indépendante compte de cadres très compétents qui travaillent à reconstruire les bases d’un développement réel du continent et à établir des liens de partenariat digne avec tous les autres interlocuteurs. Il notera qu’aujourd’hui, avec l’effondrement du système financier international suivi d’une grave crise économique et du réveil des puissances émergentes comme la Chine, le Brésil, l’Inde, qui s’intéressent de plus en plus à notre continent, le moment est plus que jamais propice pour l’Iran de s’engager et de « saisir l’opportunité pour un partenariat intelligent avec l’Afrique ».

La plupart des pays africains ayant déjà défini leurs priorités qui se situent dans les domaines de l’agriculture, de l’industrie, de l’énergie et des infrastructures, les relations avec l’Iran devront nécessairement s’inscrire dans cette dynamique. Pour un partenariat gagnant-gagnant entre les deux parties, le Ministre d’Etat propose un partenariat à la carte qui comprendra un aspect public-privé et un autre aspect privé-privé, tous soutenus par un système dynamique et approprié. Il s’agira, par exemple, d’encourager le contact entre hommes d’affaires des deux parties, de favoriser le transfert des technologies. Il a aussi, de façon particulière, informé les iraniens sur les opportunités qu’offrent le Burkina Faso de réaliser de bonnes affaires en matière agricole, particulièrement la production de coton, et dans le domaine de l’élevage.

L’Iran disposé à œuvrer pour un nouveau partenariat avec l’Afrique

A la clôture des travaux, le chef de la diplomatie iranienne, SEM Mottaki, s’est félicité de la convergence des échanges de vues entre les deux parties. Il a souligné la nécessité d’une connaissance réciproque approfondie, en vue d’une coopération fructueuse. Il notera cependant que l’avenir de cette coopération dépendra de la volonté politique des uns et des autres ; d’où son appel à réduire la distance entre les discours et les actes. En pratique, les deux parties doivent s’engager à établir des relations avec les institutions sous régionales. Sur le plan économique, le Ministre Mottaki a réaffirmé la disponibilité de son pays à mener plusieurs actions en Afrique telles que la construction automobile, la construction des infrastructures de transport (réseau ferroviaire urbain et intra urbain), la production de machines agricoles, le soutien à l’industrie de transformation agricole, l’organisation de foires communes, le transfert de technologie, l’ouverture d’une banque iranienne dans les pays qui en feront la demande. Cette banque aura pour but d’assurer le financement des projets dans le domaine de l’industrie et des mines. L’Iran est également disposé à avoir avec l’Afrique une coopération étroite dans le domaine de l’eau, du gaz, du pétrole, de la santé.

Dans l’attente de la tenue, dans un avenir proche, du Sommet Iran Afrique, le Ministre Mottaki a déclaré que l’accueil favorable qui a été réservé au 1er forum Iran-Afrique permet d’accéder aux propositions visant à institutionnaliser le Forum.

Yolande Kalwoulé

DCPM MAECR



Vos commentaires

  • Le 27 septembre 2010 à 13:20, par ZAKIS En réponse à : Partenariat Iran-Afrique : Créer un nouvel ordre mondial

    JE SUIS PARFAITEMENT D ACCORD AVEC CETTE COOPÉRATION. CES IMPERIALISTES D’OCCIDENTAUX VONT PÉRIR

  • Le 30 septembre 2010 à 01:52 En réponse à : Partenariat Iran-Afrique : Créer un nouvel ordre mondial

    "la pureté des intentions, la justice, la paix et la sécurité durable ». Ben tiens...
    Et quand je lis le précédent commentaire, je me dis qu’il y a encore du travail à faire. Après l’Occident venu piller l’Afrique, après la Chine qui fait encore plus fort, non seulement en pillant les ressources mais également en "exportant" sa propre main d’oeuvre en lieu et place de la main d’oeuvre locale, maintenant c’est au tour de l’Iran de se pointer avec ses grands principes ( le peuple iranien appréciera...)mais avec les mêmes intentions.
    Eduquez vos populations, créez de vraies chances pour chacun
    au-delà des intérêts privés captés par vos dirigeants. Dans cet article, il n’est fait référence qu’aux possibilités qu’offre l’Afrique aux nouvelles grandes puissances ( Chine, Brésil, Iran (???)etc...)dans un rapport gagnant gagnant... Gagnant pour les seuls intérêts des dirigeants locaux, en continuant à laisser les populations crever dans la misère. Et lorsque je lis dans l’article "l’effondrement moral de l’occident", ce dernier doit malgré tout présenter quelque intérêt : il permet de planquer dans des banques discrètes l’argent détourné des ventes à l’exportation et aussi d’accueillir des populations qui viennent y chercher un travail. A ma connaissance, peu d’africains travaillent en Iran ou en Chine. De plus, la coopération entre les peuples (je ne parle pas des états)celle qui relève d’aides concrètes est encore et toujours le seul fait d’associations européennes pour l’essentiel avec l’argent des citoyens de ces pays.
    Moi qui suis français d’origine africaine par mes grands parents, je vous dis : prenez vous en charge. La décolonisation c’était il y a 50 ans. Petite anecdote : l’avenue Foch, la plus chère de Paris, a pour propriétaires majoritaires, outre les fortunes du moyen orient, l’essentiel des familles des élites africaines et ce, depuis près de ...50 ans.
    J’espère que le modérateur laissera ce commentaire, plus constructif que le précédent qui au demeurant prouve qu’il est nécessaire d’éduquer les populations.