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Plaidoirie du procès du putsch : « M. le président, vous avez rendez-vous avec l’histoire, faites honneur à la justice burkinabè », partie civile

12 juin 2019, 14:00, par Kôrô Yamyélé

- Cher Mr Nikiema Pascal, vous êtes comme moi. Je ne peux pas voir une dérive et me taire dessus surtout si elle va engloutir la personne et d’autres burkinabè avec.

Pour la petite histoire, cher Pascal Nikiema, je vais vous révéler :

- Moi Kôrô Yamyélé vraiment j’ai eu beaucoup d’admiration pour Gilbert Diendéré. Jeune Lieutenant en son temps, je l’avais croisé à Réo dans le Sanguié quand j’allais vers Toma et Tougan pour acheter des bovins pour l’exportation. Il était venu à l’occasion pour je crois, évaluer la sécurité des coins dans le cadre de Koudougou-Réo 88 puisque Blaise Compaoré devrait venir, Alors nous nous sommes croisés juste au niveau de la salle de ciné de Réo sur la route juste entre cette salle de ciné et le point où se situe aujourd’hui la Mairie de Réo (il y avait là un grand espace vide adossé à la poste et qui a servi de site de la foire de Réo). Et c’est là qu’il est venu pour voir les stands. Je me suis permis de l’appeler et de discuter avec lui. Tout de suite son charme, son calme, sa peine à me fixer du regard sinon sa timidé ont eu raison de moi. Et j’ai porté Gilbert Diendéré dans mon coeur depuis ce temps.

- La 2ème fois que j’ai vu Gilbert Diendéré, c’est lors de la Journé Nationale des Paysans à Banfora et la fête se tenait derrière l’Église sur une vaste place vide attenante au terrain de foot-ball ! Puisque je suis paysan, alors j’y étais. J’ai vu Blaise Compaoré sur la tribune, amigri et qui flottait dans son grand boubou avec aussi un bonnet lui-même flottant. Ce jour j’ai eu pitié de l’homme et je me suis dit : ’’Est-il malade ou stressé ? Bon Dieu qu’est-ce qui chiffonne cet homme ?’’ alors que juste à côté de lui, sa femme Chantal Compaoré rigolait aux éclats et interpellait le Ministre de l’Énergie à l’époque, Salif Kaboré, tout en riant (je ne savais pas ce qui se disait entre eux). Lorsque le président est descendu pour la viste des expositions, j’ai enore pu accosté Gilbert Diendéré pour échanger quelque mots. Je crois qu’il était déjà Général déjà. Comme à son habitude, très courtois, jamais un mot plus haut que l’autre, tête baissée, nous avons échangé sur la foire et la vie des paysans et rien d’intéressant en fait. Mais Kôrô Yamyélé a eu le temps et l’intélligence de l’interpeller très subtillement : ’’Mais Diendéré, ne pensez-vous pas qu’il est presque temps pour vous d’élaborer et d’appliquer une stratégie de retrait de tout ce brouhaha sécuritaire pour vous mettre à l’ombre et faire autre chose ?’’. Cette outrecuidance et ce courage mortifère de la part de Kôrô Yamyélé lui a valu de la part de Diendéré un sourire très aimable accompagné d’un : ’’Vous avez raison. On verra’’. Fini !

- La 3ème fois cher Nikiema Pascal, je suis venu à Ouagadougou pour m’approvisionner (engrais, pesticides, etc.) et vendre. J’ai entendu en ville et partout où je me rendais des critiques acerbes contre le régime, contre Blaise Compaoré et certains ministres qui lui sont proches et surtout contre son petit-frère et sa belle-mère et aussi contre le RSP taxé d’assassins au service de la Famille Compaoré régnante et en particulier contre Diendéré très craint surtout. Presque tous les citoyens grognaient à cause de la modification de l’Article 37. J’ai senti que les gens n’avaient plus peur et moi j’ai eu peur du coup à cause de cette situation. Dans ma balade je suis allé chez Salif Diallo à Ouaga 2000, et n’oubliez pas que je suis un grand paysan et pas des moindres. Je l’ai vu assis au bord de sa piscine, l’air très renfrogné. Quelques échanges et l’homme n’a pas pu se retenir : ’’Le pouvoir est aujourd’hui géré par une famille et.........SVP je garde le reste pour moi’’. L’homme était très déçu, se sentait trahi, lâché et abandonné après de nombreux et loyaux services, et semblait s’impatienter de ce que l’un de ses potentiels compagnons ne se décidait pas à quitter le cercle. Je sentais même un grain de regret dans ses interventions pour tout ce qu’il a fait et il avait conscience que beaucoup de gens venaient vers lui, non pas pour soutenir ses actions et ses idées, mais pour leurs intérêts et pour des postes de nomination. Je dois avouer que ce jour j’ai eu peur pour que Salif Diallo ne se donne pas la mort tellement j’ai lu en lui quelqu’un de très mortifié par la maladie et le découragement.

Bref ! Lorsque j’ai quitté Salif Diallo, pendant que je buvais ma bière sous le mur de la police municipale assis tous seul (une bière très fraîche du reste !), j’ai eu subitement du remord, un profond remord et je me suis senti investi d’une mission en me disant : ’’Kôrô Yamyélé si tu te tais, tu seras complice passif certainement d’une situation imprévisible’’, tout en pensant à la probalité pour Salif Diallo de périr en se donnant la mort par découragement. J’ai pris sur moi la décision de foncer à KOSSYAM pour voir Gilbert Diendéré et lui dire deux mots sur la situation nationale afin qu’il tente de parler à Manitou Blaise Compaoré que je ne pouvais en aucun cas atteindre. Je suis allé PIAN ! comme le disait Paramanga Yonli. Arrivé j’ai garé mon véhicule sous des fleurs dehors, j’ai avancé lentement et prudemment vers le portique des gardes. Je suis arrivé à hauteur d’une fenêtre et j’ai salué. Uu jeune homme en tenue viens et me demande : ’’Que voulez-vous ?’ et moi de répondre : ’’Je voulais voir Mr Gilbert Diendéré’’ et lui de reprendre : ’’Avez-vous un RDV ? Est-il au courant de votre venue ?’’. Oui, ai-je répondu en précisant que je le lui avais dit verbalement que j’allais venir le voir lorsqu’on s’était rencontré une fois. Le jeune soldat décroche le téléphone et appelle et me dit : ’’Donnez-moi votre CNIB. Son Secrétaire particulier vous attend. Allez-y dans le grand bâtiment en face, rentrez et avancez dans le couloir puis tournez à votre gauche et demandez’’. Eh oui ! Kôrô Yamyélé est allé courageusement jusqu’en face du bâtiment en question. J’ai vu deux personnes en rouge vif habillées qui étaient immobiles. Je me suis arrêté à les fixer du regard croyant que c’étaient des mannequins placés là pour leurrer les impertinents visiteurs, quand l’un à ma droite me fit signe de la main de rentrer. Je pénètre dans le bâtiment, je me balade bien sans voir quelqu’un et certainement eux, m’observaient, je n’en sais rien, et finalement je retrouve le Secrétaire Particulier en question qui me dit : ’’Monsieur, le Général ne peut pas vous recevoir. Il est très occupé. Revenez après’’. Kôrô Yamyélé s’en alla la queue entre les pattes, mais avec une grande pitié pour le Gilbert Diendéré qui ne saura jamais ce que je voulais lui conseiller. On était juste à une semaine de l’insurrection d’Octobre 2014 !!

Conclusion : Diendéré n’a pas eu la chance et il aurait pu changer les choses en convainqant son maître de revenir en arrière sur l’Article 37 ! Mais quand à Kôrô Yamyélé, quand il retourna chez son ami à Saaba pour la nuit, après le repas du soir je raconte ma mésaventure à mon ami. Du coup il sursaute de sa chaise et me dit à vive voix : ’’Tu es fou ? Tu es malade à lier toi !! Pourquoi tu fais ça ? Peut-être même qu’ils t’ont vu depuis que tu étais au portique ! Ces gens n’aiment pas qu’on leur dise la vérité, qu’on les conseille de revenir en arrière sur leurs décisions ! Dieu est avec toi. Si tu l’avais vu et lui raconter ces bobards et surtout si le petit président l’avait apprit, certainement que tu serais mort par accident en cours de route en revenant ici ! Ne recommence plus ce genre de cônnerie Yamyélé !! Je t’aime bien pour te perdre pour ces genres de choses insensées !’’. ’’Notre chérie’’ tel que j’appelle la femme de mon ami entend son mari vociférer et sort pour savoir de quoi il s’agit. Celui-ci lui dit un brin de mon histoire et elle attrape sa bouche avec ses deux mains et rentre dans sa chambre sans mot dire, ce qui montre encore comment tous avait peur de ce groupuscule qui nous dirigeait ici au Faso - Stop et fin -

Par Korô Yamyélé


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