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Mélégué Traoré, ancien président de l’Assemblée nationale : « Le fait qu’on ait dissous le RSP a été une erreur, même si on refuse de le reconnaître »

5 mars 2019, 07:31, par Mechtilde Guirma

En tout cas, il n’y a rien de comparable ou de commun entre les uns et les autres. Les Dozos, ce sont des confréries de chasseurs avec une culture millénaire. Ils existaient bien avant Soundiata Kéïta. Tous les Dozos se soumettent à un serment depuis l’adolescence. Les Dozos, c’est une culture qui est propre au monde mandingue ; parce que même à l’Ouest du Burkina, ils n’existent pas partout. C’est vraiment propre au monde mandingue de la Boucle du Niger .

Je voudrai me permettre de donner un avis sur ces déclarations de son Excellence Mélégué.

Dans le système moagha, nous avons l’ordre des tansobindamba qui est, il est vrai, une royauté de chefs guériers. Mais en cas de guerre, ce sont les bras forts de la société (parfois y compris les rois eux-mêmes qui se mobilisent autour du Tansoba. Cependant ces cas sont des situations d’exception. D’autant plus qu’il n’y a pas à proprement parlé d’armées régulières dans les sociétés traditionnelles. La formation à l’usage des armes se faisait dans les camps d’initiation (kiogo chez les Mossé). Y compris l’art de la lutte. Cela permettait aux jeunes, chaque année à la fête des ancêtres des rois d’y inclure tous ces arts martiaux dans les programmes de la fête. Mieux en temps ordinaire, ces guerriers deviennent des chasseurs pour subvenir à leur besoin et à celui de leur famille. Ils avaient des règles strictes bien précises pour la chasse. Comme par exemple ne jamais abattre une femelle ou tuer des bébés animaux. Ne pas non plus prélever plus que le strict nécessaire pour les besoins (car dans les confréries la seule crainte des ancêtres suffisait). S’il y avait des délinquants étrangers, hors zones qui se risquaient dans les terroirs d’autrui pour massacrer la faune ou abattaient des arbres sans permission du roi, alors ces chasseurs guerriers protégeaient leur zones, et savaient aussi solliciter la collaboration avec les voisins frontaliers : d’où leur organisation en confréries du nom de kogelwéogho. Donc ce nom kogelwéogho n’est rien d’autre qu’un générique de chasseur ou de guerriers chez les Mossé.

Nous ne devons pas oublier que la plupart des peuples de l’Afrique de l’Ouest (et qui sait du Niger-Congo), notamment Mossé, sont des descendants du roi Tohazié de l’Antique Ghana ou Rhana. Tohazié dirigeait une armée de guerriers. Son nom en moré (selon Albert Salfo Balima) signifiait « Taonsa Zinga ». Ce qui veut dire : « le chasseur rouge ».

Taonsa et tansoba ont même racine dont les radicaux sont : ta(o)n et tan. En effet tous les deux mots évoquent celui qui porte l’arc et le carquois des flèches ou tanmpo. Ce mot kogelwéogho, qui désigne le chasseur ou l’archer en temps de paix et qui avait été depuis l’indépendance rangé dans les oubliettes, a été remis à l’ordre et au goût du jour par le Docteur Joseph Youssouf Conombo, lorsqu’il a lancé pour la première fois, la lutte contre la désertification causée par la divagation des animaux et la coupe anarchique des arbres. Je me rappelle encore de son discours à l’époque lorsqu’il a déclaré que le véritable ennemi de la Haute-Volta était ces deux maux. N’oublions pas qu’en 1973, les pays du Sahel avaient alors connu une famine jamais égalée depuis celle de 1948.

Alors ne soyez pas étonné, Excellence, si vous avez vu des Dozos Mossé ou peulhs, c’est parce qu’ils s’y sont identifiés dans leur culture de Tansobondo. Cela s’appelle aussi de l’inculturation qui est une philosophie de dialogue interculturel en instaurant un ciment politique très fort par la pratique de la parenté à plaisanterie.


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