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2ème lettre de Kôrô Yamyélé au Président Roch KABORÉ

27 mai 2017, 17:49, par AJL

Bonjour,
Hummm, oui, un dialogue national pourrait bien figurer au nombre des pistes à envisager comme thérapie ! Une sorte de retour sous l’arbre à palabre dont les vertus sont immenses, pourvu que celui-ci soit bien géré pour ne pas prendre des allures de tribunal... Ce dialogue franc et sincère, tout sauf stratégique mais plutôt coopératif, pourrait aider à remettre certaines situations à plat et à redéfinir les bases d’un véritable vivre-ensemble.
Cela dit, mais je pourrais me tromper, il semble que le Burkina soit en train de faire les frais d’une insurrection (octobre 2014) que certains citoyens ont du mal à dépasser. Un problème de dépassement !!! Ainsi, curieusement, encore trop de gens se sentent propriétaires de l’insurrection au point de se croire investis du pouvoir de régler des comptes envers et contre les lois de la République. C’est dangereux !!! Si dangereux que tout le pays se surprend aujourd’hui, d’un coeur meurtri, à observer combien le civisme et la citoyenneté responsable ont déserté le forum.
Allons dire tout simplement que le Burkina commence à faire peur et gare au spectre de l’état de nature (Th. Hobbes)...et c’est donc le moment pour les élus de se rendre à l’évidence que la démocratie a beau être le meilleur des régimes, elle est par essence le plus exigeant de tous en termes d’exercice de l’autorité, de gestion des libertés individuelles et collectives et de maintien de l’ordre public. L’anarchie n’est souvent pas loin... alors d’aucuns diront pudiquement qu’il faudrait administrer les choses avec une main de fer dans un gant de velours. S’y ajoute pour les gouvernants, le défi de l’équité et de l’accès de tous à un minimum de services de base si l’on sait qu’il y a toujours quelque chose de redoutable et d’imprévisible dans la volte-face des peuples, même les plus conciliants. Ce n’est donc que pro-action et prévention que de plaider pour que l’on mette un point d’honneur à traiter en amont les malaises croissants et les appels à plus de justice sociale et de solidarité. Mais attention et sachons raison garder par rapport à une certaine conception de la justice sociale qui a tendance à jeter l’anathème sur tout ce qui sent la prospérité ou à prendre pour cible la fortune d’honnêtes citoyens qui doivent leur standing social à de longues années de labeur et de sacrifices. C’est un principe de la Création que tous les doigts ne soient pas égaux ! Alors, là également, il faut un peu de pédagogie et beaucoup de communication sociale pour enseigner et faire intégrer dans les mentalités que la pauvreté des uns ou le chômage de tel n’a parfois aucun lien avec la richesse de l’autre. Prendre prétexte d’incidents malheureux pour régler des comptes à des citoyens nantis est contre-nature et chacun doit travailler à tuer en lui un tel réflexe aussi mesquin que nocif pour le vivre-ensemble. Ce qui est vrai mais qui du reste requiert un effort de discernement, est qu’il y a un risque à laisser pourrir les situations flagrantes d’injustice sociale qui finissent souvent par donner du grain à moudre aux pyromanes et à alimenter la violence politique. Qu’à Dieu ne plaise !!!
Au moment où l’on s’évertue à rechercher les causes du mal, il est bon de s’attarder sur cette réalité basique selon laquelle la démocratie n’a pas d’avenir si les citoyens ne sont pas formés et s’ils n’ont pas de compétences citoyennes. Il n’y a rien de plus permissif qu’un citoyen peu ou pas éduqué aux valeurs de la République. C’est dire combien le défi est colossal et urgentissime quitte à ce que le pouvoir y perde en popularité mais qu’en échange, le pays redevienne plus rassurant pour tous et retrouve les standards d’une vie démocratique normale !!! Car, entre autres critères, la démocratie, la vraie, se reconnait à la qualité éthique du rapport humain dans l’espace public ; lequel devrait être le plus policé, le plus convivial et le plus fraternel possible. En famille et à l’école et même via les médias, apprenons à nos enfants à commercer avec l’autre, à développer le culte de l’altérité, à prendre du plaisir et à communier à la réussite du voisin et à semer partout les graines de l’amour...
Au secours donc leaders religieux et responsables coutumiers !! C’est le moment d’agir et de prendre les devants dans ce qu’il conviendrait d’appeler une vaste campagne nationale de sensibilisation au civisme (routier, scolaire, professionnel). Pas de répit à vous aussi enseignants de tous ordres pour sauver ce qui doit l’être dans un contexte où chacun se désole et s’inquiète de lendemains aux mains d’une jeunesse ou d’une génération qui n’a pas d’’égard pour les aînés ; une jeunesse plutôt belliqueuse, prête à en découdre en pleine rue pour un rien avec le premier protagoniste ; une jeunesse qui n’a que faire des feux tricolores ; une jeunesse, et c’est le comble, qui ignore que c’est un sacrilège que de banaliser la nudité de la femme en public.
Manifestement, l’essentiel se jouera sur le front de la restauration des VALEURS, du dialogue, de l’intercompréhension et de l’éducation citoyenne et patriotique. Puisse Dieu bénir le Burkina Faso et combler de Sagesse et de Lumière les dirigeants du pays !!!
AJL


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