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Mission de la CODER chez Blaise Compaoré : La mise au point du chef de file de l’opposition

18 avril 2017, 13:47, par Mechtilde Guirma

À tous ces jeunes qui crient pour un oui ou pour un nom et à tous vents : « La patrie ou la mort nous vaincrons », laissez-moi vous dire une chose :

Cette devise de votre adoré révolutionnaire est loin d’être un cri de ralliement. Ce qui nous interpelle et même de la réviser et de trouver une autre plus conciliante, plein d’espoir de changement et d’un monde nouveau, qui n’exclue pas le challenge, tout au contraire, une gageure.

Avant de vous répéter une pensée, je vous fais un petit historique :

À la deuxième guerre entre le Mali et le Burkina-Faso, le Mali est parti bombarder la ville de Ouahigouya. Sankara rétorqua et alla bombarder celle de Sikasso. Mais très vite il comprit que cela ne faisait que compliquer les choses. Alors sur les conseils bien avisés de ses aînés (qu’il maintenait en prison d’ailleurs comme ennemis de sa révolution), il prit tout de suite l’initiative du pardon. Personne ne broncha et n’exigea que le Mali vienne d’abord demander pardon au Burkina avant la réconciliation.

Aussi comme je disais dans un autre post, en matière de stratégie de demande de pardon, la diplomatie africaine est tout autre :

Cela commence par un esprit diplomatique (Moré) qui requiert toujours un protocole d’introduction, fait d’esprit d’humilité avec un « kabr, kabré » (pardon, pardon). Cela montre qu’on se présente avec un esprit apaisé et de bonnes intentions. Ce qui met à l’aise les deux parties et le reste suit. Tandis qu’aller avec des menaces, l’adversaire sera toujours (avec juste raison) sur la défensive. Donc un échec programmé.

Dans la tradition moagha, la partie qui prend l’initiative de la demande de pardon (même bardée des glorioles de ses raisons les plus intimes), va chez son adversaire (dût-il être foncièrement rebelle et farouche) avec un balais et commence dès la porte à balayer (une façon de dire : balayons loin de nous ce différent qui nous oppose et nuit à la société toute entière). Ce dernier comprend tout de suite, et s’en va le relever (ce qui démontre à son tour sa prédisposition en toute humilité également). Alors, peut commencer le dialogue. Je dis bien le dialogue, car dialogue, cela veut dire beaucoup de choses (y compris la vérité, la justice et la réconciliation). C’est pourquoi, cette approche montre que l’acte est sous-tendu par l’esprit de la réconciliation. Autrement, l’autre prendra cela comme un piège ou tout au plus une provocation. Cette démarche a permis à la plupart des sociétés Ouest-africaines, d’établir un modus-vivendi d’une coexistence pacifique qui a inspiré la plupart du temps la tradition de la parenté à plaisanterie.

En cela donc, Sankara n’a pas hésité à aller à « Canossa » s’humilier devant ceux qu’il traitait d’ennemis de la révolution pour s’inspirer de leur sagesse et quémander leur aide. En effet, le président Saye-Zerbo l’avait bien prévenu : « Il ne faut jamais gifler un homme qui a les mains liées ».

Il en fut de même lorsque la famine frappa de nouveau le Burkina et que l’aide des pays dits « impérialistes » sautait le Burkina pour aller secourir des pays voisins. Alors que Sankara prêchait l’autosuffisance et fustigeait la politique de la main tendue contre les pays dits « impérialistes », il dût s’humilier de nouveau (sur RFI) et de la même façon diplomatique il leur fit remarquer qu’il ne comprenait que l’« aide saute le Burkina comme si la famine sautait aussi le Burkina ».

Voyez donc qu’en toute chose, il faut de l’humilité, c’est pourquoi je pense que les bons politiques auraient dû garder le silence et observé. Les déclarations tambour-battant ont toujours fait échouer les dialogues. Que les enfants le fassent, en toute méconnaissance de cause, cela peut se comprendre, mais que des adultes qui ont des ambitions politiques se laissent piéger par de tels branle-bas, cela veut dire que le chien n’a pas changé sa manière de s’asseoir, et c’est dommage pour eux. Y’aurait-il donc une éducation à faire à leur niveau parce qu’« animal politique de raison » ?


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