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Avant-projet de Constitution de la 5ème République : Constitution de la trahison ?

18 mars 2017, 02:52, par Boinzem

Arguments de Salif Diallo, M. Salif Diallo, ministre d’Etat, ministre de l’Agriculture, de l’Hydraulique et des Ressources halieutiques, vice-président du Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP) pour justifier la révision constitutionnelle de 2005 ayant permis à Blaise COMPAORE de rester au pouvoir 9 années de plus (Interview intégral à lire dans LeFaso.net du 30 Aout 2005)

Question du Journaliste S. :" Vous avez tantôt soutenu que la candidature de Blaise Compaoré (à l’élection du 13 Novembre 2005) était fondée. Les textes juridiques permettent-ils réellement cette candidature ?

Salif Diallo : Absolument ! Je suis plus apte à le dire parce que j’étais délégué de mon parti à la commission des réformes politiques. En tant que membre de cette commission qui a regroupé les partis de la majorité, ceux de l’opposition et de la société civile en 1999, nous avons bataillé pendant un mois autour d’une même table pour faire des propositions. Concernant l’article 37, la position consensuelle qui en est ressortie est que le mandat est ramené à cinq (5) ans renouvelable une fois. Et nous avons la ligne suivante : « cette révision n’empiétait pas sur le mandat en cours actuellement ». Nous l’avons écrit noir sur blanc à l’unanimité, à l’époque. Et nous avons souligné qu’il s’agira en 2005 d’entamer sur la base de la nouvelle constitution révisée, donc sur un autre consensus politique.

Nous avons travaillé au sein de la Commission des réformes politiques. C’est elle qui se présente dans l’état actuel des choses comme le constituant dérivé pour la révision constitutionnelle. On dit bien révision constitutionnelle. Ce n’est pas la même constitution que celle en vigueur avant la révision. Maintenant, du point de vue juridique, l’Assemblée nationale ayant adopté dans sa majorité qualifiée requise ces dispositions constitutionnelles pouvaient opter pour deux alternatives. La première était d’inclure avec cette révision une clause d’effet immédiat à savoir que cette révision écourtait immédiatement le mandat de sept (7) ans en cours.

Cela aurait donné lieu séance tenante à de nouvelles élections. L’Assemblée nationale n’a pas pris cette disposition. Elle n’a pas introduit la clause d’effet immédiat. Il restait donc l’autre alternative en droit, le principe de la non rétroactivité qui dit que la révision constitutionnelle dispose pour l’avenir.

Et ça tous les juristes et les constitutionnalistes peuvent le confirmer. Même parmi ceux qui, aujourd’hui, récusent cette révision, il y en avait qui étaient au parlement et au gouvernement au moment où celle-ci s’opérait. Je prends le cas de l’ADF/RDA, aujourd’hui certains sont devenus UNDD. Je pense qu’aujourd’hui, aucun juriste sérieux ne peut soutenir que le président Compaoré ne peut pas se présenter aux élections du 13 novembre. Interrogez tous les constitutionnalistes et ils vous le diront. Abstraction faite bien sûr des positions politiques et politiciennes. C’est clair, le président Compaoré a le droit avec lui. Maintenant sur un autre plan, je crois qu’il appartient au peuple de faire son choix le 13 novembre 2005. Que les uns et les autres fourbissent leurs armes pour que le peuple puisse trancher !

S. : Et sur le plan politique, le président Compaoré peut-il se présenter ?

Salif Diallo : Pourquoi pas ? S’il a le droit avec lui comme tout citoyen, il peut se présenter. Sur le plan politique, c’est son parti et ceux qui le soutiennent qui l’investissent. Le congrès du CDP l’a investi. Vingt-sept (27) autres partis le soutiennent. Or, en tant que citoyen, même individuellement il peut être candidat comme M. Dicko l’est à titre individuel.

S. : Le président n’est-il pas usé par le pouvoir ?

Salif Diallo : L’usure du pouvoir dépend des contextes et des tâches à accomplir. On est au pouvoir parce qu’on a un programme, on a un objectif, parce qu’on a entraîné des hommes et des femmes dans un projet de société à mettre en œuvre, à réaliser. C’est en cela qu’on parle de politique.

Est-ce que le principe de la rétroactivité sera appliqué à Roch pour écourter ou allonger son mandat après une éventuelle adoption de la nouvelle Constitution comme ce fut le cas en 2005 pour Blaise COMPAORE ? Si tel est le cas, les prochaines élections présidentielles seront reportées en 2022, autant dire un lenga au pouvoir pour le MPP".

En 2005, Achille Tapsoba a évoqué publiquement la possibilité que Blaise ne se représente pas comme candidat. Salif s’est chargé de le contredire ouvertement dans son interview en jouant au vrai griot du Chef. Actuellement, Achille et bien d’autres paient pour le long règne de Blaise savamment orchestré et les conséquences du griotisme de Salif. Par ironie du sort, c’est ce même Salif qui se charge de les accuser de tous les tords pour les 27 ans du régime CDP, tout en préparant tranquillement une autre révision constitutionnelle pour servir, cette fois-ci, ses propres ambitions même s’il est visiblement usé par le pouvoir. Puisse la justice divine se manifester rapidement au Burkina Faso, Pays des Hommes Intègres.


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