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Plume critique du Dr Dramane Konaté : Kroh ! Les femmes ont déserté la maison (roman de Yacouba Traoré).

29 novembre 2016, 22:42, par Mechtilde Guirma

Roman très intéressant et passionnant que je ne manquerai pas de lire dès que j’aurai l’occasion.

Mais j’aimerai ici expliquer quelques points sociologiques que soulève l’auteur. L’action des différents protagonistes. Lors de mes investigations pour mon mémoire en Sciences politiques (il y a déjà de cela plus de trente ans) pour « le rôle de la femmes dans la vie politique de nos sociétés traditionnelles », des explications de mes tantes et oncles sur ces cas d’espèce m’avaient laissée pantoise. C’était à peine si j’y croyais. En effet alors que nos sociétés étaient déjà mises aux bans de la mondialisation et leurs valeurs présentées comme néfastes, les valeurs des sociétés occidentales étaient encore à l’époques les typologies confessées, enviées, proposées et présentées comme les meilleures par le courant féministe. C’était sans compter avec la face hideuse et cachée des leurs. Bien cheminons ensemble pour que vous la découvriez vous-mêmes :

La fille a pris une grossesse alors qu’elle est encore chez son père. L’explication qu’on m’avait donnée donc à l’époque était à juste raison.

En effet si le père l’accueillait sous prétexte que c’est sa fille qu’il aimait et gnan-gnan-gnan, il pouvait être lui-même « accusé d’inceste ». Ce qui aurait posé des problèmes au sein de la société, il pouvait même être chassé pour avoir été le pire exemple dans le village (il y a également d’autres cas semblables mais nous n’en sommes pas là). D’où sa réaction apparemment violente car la coutume lui reconnaît une alternative honorable. C’est celle qui permet la fille de trouver refuge chez sa tante la sœurs de son père (qui l’acueille sans poser de question jusqu’à son accouchement et s’informer de l’auteur). Et pourquoi ? Parce qu’elle a la même autorité que le père qui est en quelque sorte son double (pugd= suivre ou après, ensuite ba=père, donc Pugdba en moré. Les gens de l’Est, Koupèla et autres disent carrément bapoko=père femme). Donc l’autorité de la tante paternelle est aussi puissante que celle du père, mais en contre pouvoir. Une sorte de régulation qui va permettre à toute la famille des tractations et des concertations pour trouver une solution qui soit satisfaisante pour tout le monde.

Dans le cas du garçon en cas de faute grave également, lui il trouve refuge chez le frère de sa mère (yesba, ou encore chez les koupéléens maraogo de ma=mère, raogo=mâle). Donc la mère-homme. Et toujours dans la même logique que le père-femme, ce mère-homme incarne la figure de la miséricorde, du pardon. Et comme le mariage chez les africains est l’alliance de deux familles, par le fait d’un homme et d’une femme dans le concret, visible pour tout le monde, spirituellement la tante paternelle qui représente la famille de son frère pour toute question d’importance capitale, et l’oncle maternelle qui, lui, représente la famille de sa sœur pour les mêmes questions capitales. deviennent alors des époux spirituels qui font UN comme « Esprit de Famille ». C’est pourquoi on ne peut plus me convaincre, que la femme africaine n’est pas considérée, qu’elle est bafouée, qu’elle ne joue pas de rôle politique, que les décisions lui sont imposées par le poids des traditions et qu’elle devrait en être libérée des coutumes néfastes, rétrogrades et tutti-quanti. Or, je le pense bien que, de nos jours, on peut les actualiser et les rendre conformes au temps, aux époques. Ne dis-t-on pas que le linge sale se lave en famille ? Il en est de même sur le niveau national et politique.


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