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Quelle Constitution pour les Burkinabè, « un peuple de yelkayé » ? Le cas de la chefferie traditionnelle !

29 novembre 2016, 17:21, par Bouba

Mon cher Ka,
Nous avons souvent une convergence de points de vue sur les Forums, mais sur ce point, je ne partage pas du tout votre avis. Vous dîtes bien que le Mogho-Naaba actuel est consulté. Moi, je dis que cela est dû à sa sagesse et à sa neutralité politique. Une autre personne à sa place et ça pourrait ne pas être le cas. Savez-vous que d’autres chefs actuels sont au même niveau hiérarchique que lui dans la société moaga ? Et pourtant, on ne le croirait pas. Le père du Mogho-Naaba actuel n’a pas lui-même eu ce respect. Vous êtes plus âgé que moi et vous le savez peut-être. Personne ne peut présager que celui qui viendra après le Mogho Naaba actuel incarnera cette sagesse. Créons des institutions fortes qui résistent au temps et détachées des personnes.

Rappelez-vous le témoignage de Alice Tiendrébogo sur son père Philippe Zinda Kaboré, un des héros de l’histoire de notre pays. À la question de savoir à qui profite la thèse de l’empoisonnement, Elle répond « au-delà des colons, il dérangeait aussi la féodalité. Il a eu des démêlés avec les chefs traditionnels au cours de sa carrière politique. On m’a rapporté qu’au retour du Niger où il avait accompagné le président Vincent Auriol, il a été convoqué au palais du Moogho-naaba pour se voir reprocher ses propos anti-chef. On lui attribuait d’avoir dit que « les chefs vont courir si vite qu’ils vont perdre leurs sandales ». Au niveau du palais du Moogho-naaba, on n’était pas du tout content de lui, surtout que lui-même était issu de la féodalité, et de ce fait, choisi par le Moogho-naaba. »

Autrement dit, Philippe Zinda était un vrai intellectuel patriote fédérateur qui a lutté pour la reconstruction de la Haute -volta en 1947. Mais pendant qu’il luttait pour ce territoire, la chefferie Moaga lui mettait les bâtons dans les roues. On peut poser l’hypothèse que cette chefferie moaga a été une entrave à la lutte pour l’indépendance que menait les intellectuels, et ceci pourrait expliquer la mollesse avec laquelle les mossi ont lutté pour l’indépendance par la suite. À cet exemple d’ajoutent beaucoup d’autres exemples peu louables où des chefs coutumiers ont manqué de jouer leur rôle. Les plus illustres cas sont le Naaba de Ouahigouya actuel et le pire est le Naaba Tigré de Tenkodogo, militant zélé du CDP des années 90, Méfions-nous de nous baser sur l’exemple du Mogho-Naaba actuel pour bâtir notre constitution. L’habit ne fait pas le moine. Il est déjà respecté. En revanche même avec une inscription dans la constitution, certains chefs n’auront pas ce respect, Au contraire, les dérives peuvent s’accentuer.

Un autre argument des plus solides contre cette initiative, est le respect de la laîcité de l’État, le respect de tous les peuples de ce pays qui prévaut comme gage de l’unité nationale. Un autre argument dont les faits têtus existent déjà est le risque de manipulation et et d’utilisation de la chefferie traditionnelle par les Machiavels hommes politiques. Je ne vous apprend rien à ce niveau car c’est une réalité que l’on voudrait voir disparaitre.


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