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Crise à la CAMEG : L’on a frôlé le pire au siège

9 septembre 2016, 16:16, par Sidpawalemdé Sebgo

Internaute 15 Injaba : Vous parlez visiblement de ce que vous ne connaissez pas, peut être de bonne foi mais vous induisez les autres en erreur. L’économie a ses règles, et l’économie du secteur du médicament en particulier :

1°) Les pays Africains, voisins ou pas nous envient notre CAMEG, et plusieurs ont envoyé des missions pour s’inspirer de son organisation, y compris le statut d’association qui la rend indépendante du bon vouloir des politiques, toujours prompts à puiser dans les caisses des sociétés d’état pour faire autre chose ou à imposer des décisions politiques qui mettent l’entreprise en difficulté (voir SONABEL et SONABHY). C’est notre CAMEG qui approvisionne par exemple la Cote d’ivoire en anti-rétroviraux, tout simplement parce qu’ils ne peuvent pas trouver moins cher ailleurs !

2°) L’effet de la mise en concurrence pour faire baisser les prix a des limites. Les revendeurs peuvent réduire leurs marges pour avoir les marchés, mais ne peuvent pas vendre au prix d’achat ni en dessous de ce prix. Or, une association à but non lucratif peut le faire, si elle pratique la péréquation et bénéficie de subventions, ce qui ne sera jamais accordé à une entreprise commerciale. Ainsi, la CAMEG peut mettre par exemple une marge sur un produit donné, et utiliser cela pour acheter un autre produit et le revendre en dessous du prix d’achat. Mieux, en faisant de grandes commandes directement aux laboratoires fabricants, la centrale obtient des prix plus bas qu’aucun "petit" grossiste en médicaments ne peut avoir. Grâce aux subventions de nos partenaires, ces prix sont encore abaissés. Enfin, en tant qu’association d’utilité publique, elle ne va payer ni taxes, ni impôts ou autres frais qui se répercutent sur le prix. Quand à créer des emplois, la CAMEG le fait déjà, directs et indirects.

3°) Pour votre information, si de nombreuses industries n’existent pas au Burkina, c’est généralement parce que les couts de production sont trop élevés et le marché trop petit. A quoi ça sert de fabriquer nous même nos médicaments s’ils doivent revenir à deux fois le prix que la CAMEG obtient ailleurs ? Sachez aussi que plus la quantité commandée et fabriquée est grande, plus le prix baisse. C’est pourquoi une centrale (qui centralise justement les besoins de tout un pays et commande) aura toujours des prix plus bas que les autres opérateurs. Juridiquement, la CAMEG ne dispose d’aucun monopole. Mais tout le monde commande là bas parce que c’est le moins cher ! A long terme, si les quantités consommées le justifient, le pays pourra envisager une fabrication locale. Mais il faudra que cette industrie ait un marché sûr, c’est à dire qu’un grand client comme notre état ou plusieurs réunis prennent l’engagement d’acheter la production. De petites unités (privées ou publiques) ne peuvent pas prospérer car leurs prix seraient trop élevés. Donc votre crédo du secteur privé solution à tout ne tient pas ici.

En fait donc, le seul risque de la centralisation serait que des intérêts privés ou de groupe soient à la tête. Car le quasi-monopole ferait que leurs décisions auraient des conséquences graves sur un grand nombre de personnes. C’est justement pour cela que les créateurs de la CAMEG ont voulu éviter qu’un ministre ou un gouvernement, pour des raisons politiques ou privées, ne puisse diriger la CAMEG comme il leur plait, d’où les statuts actuels. Et c’est sur cela que le ministre veut revenir. Le problème, c’est que s’il réussit, les partenaires vont se retirer et on perdra beaucoup des avantages acquis, donc les médicaments vont augmenter, certains seront en rupture de stock et on ne pourra plus prendre en charge certaines maladies graves et chroniques comme on le fait actuellement. La CAMEG doit donc être protégée des prédateurs, même s’ils sont ministres !


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