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« Koglwéogo » : Faudra-t-il jeter le bébé avec l’eau du bain ?

10 février 2016, 18:09, par Issa OUEDRAOGO

Bien dit. Cet article rejoint mon analyse à quelques degrés près. La voici :
KOGLWEOGO...Enjeux et perspectives.

Depuis quelques temps, l’affaire des koglweogo défraie la chronique et les avis sont tellement partagés que l’on se perd dans des supputations souvent infructueuses.
J’ai fait une première publication là-dessus et cette dichotomie idéelle trouve encore une bonne place dans les commentaires. Cela m’invite à préciser ma position, qui, il faut le dire d’entrée de jeu, n’est pas pour un déni de la démocratie, ni même une négation de notre dispositif judiciaire.
Loin des luttes corporatistes ou du fait que les koglweogo ravissent la vedette à certaines OSC nostalgiques, qui sélectionnent les problèmes pour réagir, qui sélectionnent les acteurs pour reagir, je voudrais que les Burkinabès soient honnêtes de reconnaître que LA NATURE A HORREUR DU VIDE. Au delà de ce qu’on peut reprocher aux koglweogo, transparaît l’échec de notre justice à travers les différents maux qui le minent. Fort heureusement, nous avons l’impression actuellement que la nouvelle génération veut changer les choses, et c’est tant mieux.
Quand je dis VIVE LES KOGLWEOGO, c’est juste un sentiment de révolte. Révolte par rapport au sentiment de faiblesse de nos braves FDS, qui n’ont pas d’équipements adéquats mais qui malgré tout font du bon boulot. Révolte justement parce qu’ils ne sont pas depuis longtemps aidés dans leur travail. Combien de fois un policier, un gendarme ou un militaire à été radié, honni parce qu’il a intervenu pour protéger nos populations ? Combien de fois les a-t-on sacrifiés sur l’autel des intérêts politiques ou individuels ? Juste pour contenter une population qui, quelques fois n’avait pas raison ? Quelle FDS oserait entreprendre une action sans la peur d’être reprimandée ? Quelle FDS n’est pas mécontent de voir un criminel libre après l’avoir fait admis en prison quelques jours auparavant ? Quelques fois ces bandits les menaces même de mort en leur criant qu’ils sont protégés par des mogo puissants. Où est la justice que vous demandez.
Dans un tel contexte, la confiance à foutu le camp, les populations ont instauré leur koglweogo, (ce n’est pas État qui la fait) pour assurer leur propre sécurité : c’est l’instinct de survie qui a conduit à cela. On peut, comme moi, ne pas aimer leurs manières, mais on ne peut pas leur reprocher de ne pas chercher à survivre.
Cela pose le rôle régalien de l’Etat qui doit en effet dissoudre ces substituts à la justice légale, mais ça ne peut se faire qu’à moyen terme. Voilà pourquoi il faut d’abord les former, les sensibiliser, les formaliser pour en faciliter la désintégration. C’est un fait social qui existe déjà, et vouloir le supprimer HIC et NUNC posera une résistance et une incompréhension, voire une collusion des autorités avec les bandits. Mais quand c’est formel, c’est plus facile à supprimer d’ici un ou deux ans. Ce sera le temps où le pays devra recruter des FDS en nombre suffisant, les former, les équiper et surtout leur assurer du soutien de l’Etat et les déployer sur l’ensemble du territoire. L’incivisme que nous décrions tant, le banditisme et le terrorisme trouveront alors réponse dans cette stratégie.
Dans cette attente, les koglweogo devraient être de simples relais avec les forces de l’ordre, elles mêmes en contact avec la justice. Sinon il y aura effectivement de nombreuses exactions, ce qui n’est pas admissibles dans un État de droit.
J’ai donc dit VIVE LES KOGLWEOGO parce qu’ils nous permettent de voir nos failles, parce qu’ils sont par ailleurs des forces dissuasives, en tout cas, jusqu’à la restauration définitive de nos FDS et de notre justice.


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