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Soutenance de thèse en histoire : Boubié Bazié analyse la colonisation des Lobi du Burkina par la France

20 février 2016, 15:58, par Hien

REFLEXION SUSCITEE PAR LA THESE DU DOCTEUR BOUBIE BAZIE

Sans occulter les autres centres d’intérêt, la thèse du docteur Boubié Bazié invite tous les Lobis à une grande introspection c’est-à-dire, à un gros travail de réflexion sur leur identité ethnique ; une identité que d’aucuns ont appelé la « lobitude ». Ce concept désignerait une manière de vivre, de penser, d’agir, de réagir, etc. qui identifierait instinctivement quelqu’un comme un lobi. Á cet effet, combien de fois, dans un sens positif comme négatif, n’avons-nous pas entendu les paroles suivantes : « Il n’y a qu’un lobi qui puisse faire ceci ou cela, qui puisse dire ceci ou cela, qui puisse réagir de cette façon-ci ou de cette façon-là ! ». Ce qui fait penser qu’il existe un héritage commun, un ADN spécifique à tous les lobi.

Dans cette optique, même sans avoir lu toute la thèse du docteur Boubié Bazié, les Lobis peuvent en tirer des conclusions et orientations pratiques. Par exemple, dans le prolongement de la recherche entamée par le docteur Boubié Bazié, son directeur de thèse soutient ceci : « Jusqu’à la Seconde Guerre mondiale, le Lobi était perçu comme un insoumis car il résistait, il rejetait tout ce qui venait du blanc. [Mais à partir de 1946], ayant compris qu’en résistant à tout bout de champ, il perd, il va accepter de soigner son enfant dans les dispensaires, envoyer son enfant à l’école, accepter de travailler comme auxiliaire de l’administration… ».

De cette citation, on pourrait déduire que nos ancêtres étaient des êtres très futés et très pragmatiques ; en somme, des fins stratèges. Pour preuve, dans les différentes formes de lutte contre les colons, et même si c’est en dernier ressort, nos ancêtres avaient compris ceci : résister, c’est aussi être capable de mettre en avant l’esprit de compromis ou de négociation afin de préserver l’essentiel ; surtout, quand on se rend compte que l’autre a des capacités de nous écraser sans ménagement.

Chers frères et chères sœurs des tribus du rameau lobi, voici quelques réflexions que m’inspire la thèse du docteur Boubié Bazié. Á travers l’attitude de nos ancêtres, j’ai compris que nous sommes incités à faire, d’une manière ou d’une autre, des compromis entre ce qui est propre à notre culture et ce qui est propre à celle des autres et qui est susceptible de nous aider à nous améliorer. En clair, nous sommes invités à accepter ce qui est bon chez les autres, même si nous ne partageons pas leur vision du monde, leur sa façon d’être et de faire. En résumé, l’intransigeance et le jusqu’au-boutisme peuvent être suicidaires tandis que le pragmatisme est salutaire. Dans ce sens, le fait que des Lobis aient étroitement collaboré à la recherche du docteur Boubié Bazié –qui, a priori, n’est pas un lobi- est un bel exemple de cette ouverture d’esprit. Que cela soit bien compris : nous parlons ici de compromis et non de compromission : cette dernière notion est une soumission totale et aveugle à la volonté d’autrui tandis que la première nous pousse à résister de manière intelligente, en étant réalistes. En d’autres termes, il s’agit de trouver les voies et moyens d’avancer ou d’être présents dans la société contemporaine sans renier notre passé ; il s’agit d’assumer totalement ce passé sans pour autant en être entièrement prisonniers. C’est la vérité : avoir le cœur, l’esprit et les paroles constamment tournés vers le passé -que l’on regrette manifestement-, c’est courir le risque d’être considérés comme des passéistes, des anachroniques, des attardés, des réactionnaires, etc. D’un autre côté, renier notre passé de lobi sous prétexte que c’est de la sauvagerie, avoir une aversion pour notre culture lobi sous prétexte que c’est démodé, c’est courir le risque d’être des aliénés, des acculturés « des chauves-souris culturels ». Le meilleur choix se trouve dans le compromis dynamique entre notre passé, notre présent et notre futur. Au vu et au su de tout cela, on pourrait sans ambages dire qu’être lobi, ce n’est pas quelque chose de définitivement acquis mais une conquête de tous les jours.

Que Thangba nous éclaire sur ce chemin ; qu’il nous aide à mieux jauger les tenants et les aboutissants de cette posture au quotidien !