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Fonds commun du MEF : le SYNAFI exige une répartition plus équitable

11 août 2015, 09:31

je partage avec vous cette plublication
Le « fonds commun », le fonds qui divise.
Il nous a été donné de suivre ce week-end sur les antennes de la RTB, une conférence de presse de la ministre déléguée en charge du budget sur des menaces que lui aurait fait le SYNAFI, syndicat des financiers, qui se plaindrait de la non équité qu’il y aurait dans le partage du « fonds commun » entre fiscalistes, comptables et financiers. Madame la ministre, pour s’attirer la sympathie de l’opinion publique, affirme qu’un comité aurait été mis en place pour réfléchir à comment étendre ce fonds à tous les agents publics, ce qui n’aurait pas rencontré l’assentiment du SYNAFI, comme si c’est ce syndicat qui dictait la voie à suivre au gouvernement de la transition. Pire, nous n’avons pas eu droit à un débat contradictoire, mais seulement à une version unique de madame la ministre, sans même que les journalistes ne puissent poser des questions pour mieux éclairer l’opinion. Mais au fond, qu’est-ce que c’est que ce fonds qui divise tant ?
Le « fonds commun » est l’appellation trouvée à des avantages financiers colossaux accordés impunément aux agents du ministère de l’économie et des finances (MEF) semestriellement au prorata de la classification catégorielle et de la qualification de chacun, en sus des primes de rendement trimestriellement reçues par lesdits agents et des salaires servis à tous les agents publics. Ces avantages sont qualifiés de colossaux, car le cumul annuel de ce fonds vaut deux fois le salaire annuel de certains agents de ce ministère, sans compter le cumul annuel des primes de rendement qui peut égaler aussi le salaire annuel de l’agent, en dehors bien sûr de son salaire connu. Ainsi, sur cette base uniquement, l’agent du MEF peut recevoir trois fois plus que son salaire annuel, sans compter avec les autres types d’avantages liés aux activités menées au sein du service. Que madame la ministre nous dise combien elle gagne à chaque dotation du fonds commun. Qu’elle nous dise combien gagne le Ministre de l’économie lui-même ; beaucoup tomberaient en syncope. On n’est pas dans la même Fonction publique, ou alors on est dans une FP à trois vitesses. Que madame la ministre donne au moins le montant total perçu par tous ses agents, nous aurions été édifiés. Mais avant, qu’elle nous dise quel texte régit ce fonds : juste un arrêté du ministre de l’économie et des finances, même pas un décret, encore moins une loi. Un arrêté qui accorde plus d’avantages que la loi qui régit les agents eux-mêmes et leurs emplois. C’est à la limite insultant !
Rappelons qu’il existe au BF trois types de fonction publique (FP) : la FP parlementaire (pour les députés qui sont élus et qui constituent un pouvoir à part entière), la FP territoriale (pour les agents des collectivités territoriales) et la FP d’Etat (pour tous les autres). Dans ce dernier groupe, on note que les magistrats qui ne sont pas justement des fonctionnaires, sont régis par une autre loi que la 013-98, de même que l’armée, la sécurité, les greffiers et très prochainement les autres paramilitaires comme les agents des eaux et forêts. C’est pourquoi eux aussi bénéficient de plus d’avantages que les autres. Par exemple un Assistant de police, recruté avec le BEPC, sera presqu’aussi bien payé qu’un Inspecteur du travail ou un Administrateur civil, recruté, lui, avec la Maîtrise. Tout cela, nous l’avons subi sous l’ancien régime, parce qu’il s’agit d’un rapport de force en apparence.
Mais dans la même FP d’Etat, régie par la même loi 013-98 du 24 avril 1998, c’est-à-dire les agents de l’administration générale, des finances, des enseignements de base, secondaire et supérieur, de la santé, de la culture, de l’agriculture, de l’élevage, de la communication…, il s’avère que l’ex régime a instauré deux types d’agent : les super agents et les infra agents. Les super agents regroupent tous ceux qui relèvent du MEF, de la justice, de la défense nationale, de la sécurité et subsidiairement du ministère des mines et de l’énergie (bénéficiaires eux aussi de leur « fonds commun ») et les infra agents sont les autres. Parmi ces derniers, d’autres sont aussi en train de se battre pour en bénéficier. Il s’agit notamment des agents du ministère du commerce.
Il s’agit juste pour moi de peindre un peu l’image de notre administration telle que l’ex régime nous l’a léguée. Chacun « mange » où et comme il peut, pourvu qu’il ne convoite pas le fauteuil du Boss. Ainsi, la gabegie, la corruption, le népotisme, voilà les maux qui minent notre administration, créant ainsi des inégalités sociales criardes ayant accentué l’ampleur de l’insurrection populaire. Les Burkinabè, certes, se sont insurgés contre le non respect des principes démocratiques, mais aussi et surtout contre l’instauration des inégalités sociales. Et c’est principalement à ce niveau que le gouvernement de la transition était attendu. Mais mal s’en faut. Il me semble que ce gouvernement n’a pas encore compris le message du peuple insurgé. Et c’est là où il aura échoué. Un minimum serait d’achever la relecture de la loi 013 au cours de cette transition. Dans une république, le principe devait être « à niveau de recrutement égal, salaire égal, avec des différences au niveau des indemnités en fonction de la spécificité de chaque emploi ». Mais hélas ! Je défie quiconque voudrait me faire croire l’emploi de « financier » est plus important que celui d’infirmier, d’enseignant, d’agent d’agriculture, de gestionnaire des ressources humaines, d’Administrateur civil …
Aussi rappelons-le, le « fonds commun », s’il devrait être maintenu, devrait être conforme au « treizième mois » édicté par la 013-98. A moins d’instaurer d’autres types de FP. On pourrait imaginer une FP financière, une FP hospitalière, une FP de l’éducation, une FP agricole… Ceci devra être le rôle du MFPTSS, car en parlant de ce ministère, on n’a aujourd’hui à l’esprit que l’organisation des concours. Aucune emprise aujourd’hui sur des ministères comme le MEF et les mines et carrières. Non, le MFPTSS doit jouer pleinement son rôle de régulateur. Le plus curieux dans tout ceci, c’est que ni nos centrales syndicales ni nos syndicats autonomes n’en font un problème, alors qu’il n’y nul doute que les agents sont frustrés et démotivés par de telles pratiques.
Aujourd’hui, c’est comme si l’on disait à une partie des agents publics de serrer la ceinture pour que l’autre partie puisse porter ses bretelles. Pendant que certains font vingt ans de carrière sans n’avoir posé aucune brique, d’autres construisent et achètent voiture en deux ans de service. On nous dit que le service public est un sacerdoce. Je veux bien ; mais comment garder cet esprit du sacerdoce quand on permet à certains de s’en mettre plein les poches tout en paupérisant les autres ? Comment peut-on lutter contre la corruption dans un tel contexte ? Comment réduire ces inégalités sociales quand aucun prétendant à la magistrature suprême n’en fait un problème pour l’évoquer dans son programme ? Comment rester digne ? Comment rester agent public intègre ?
Juste pour vous donner matière à réfléchir et vous inviter à partager ce message pour qu’il aille le plus loin possible.

En libre penseur

Jac P. OUEDRAOGO
Conseiller en GRH


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