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Siaka Coulibaly, analyste politique : « Le retour de l’ancienne majorité est intrinsèquement liée à l’échec de la transition »

10 juillet 2015, 03:41, par Sidpawalemdé Sebgo

Je suis surpris à chaque sortie de M. Coulibaly.

Comment, voila un juriste, analyste politique, acteur du milieu des OSC "voisins" du monde politique, qui avance à chaque fois des choses qui feraient tiquer tout étudiant débutant en sciences politiques !

1°) Il énonce ainsi que "la force publique, c’est l’armée". Ah bon ? En république, la force publique peut s’appeler justice, préfecture, police, gendarmerie, maréchaussée, gardes, gardiens de la paix, carabiniers, et j’en passe, mais pas armée. L’armée est la composante de la république chargée de protéger la nation contre les périls extérieurs. Dans la plupart des pays démocratiques, l’intervention de l’armée sur le territoire national autre que la défense anti-terroriste ou les secours d’urgence est strictement réglementé. C’est aussi pour cela que les militaires doivent quitter l’armée pour faire de la politique. Cette confusion est grave et révélatrice de l’acceptation de l’état de fait instauré par le régime Compaoré, qui avait assis son règne sur la force militaire et la peur qu’elle inspire.

2°) Monsieur Coulibaly conclut "Mais ne peut pas dire moi, un tel, j’exige d’être ceci ou que ce soit comme cela. Il s’agit de l’Etat, et l’Etat ce n’est pas une seule personne, ce n’est pas un seul groupe ; c’est tout le monde, même ceux qui n’ont pas voix au chapitre." On est étonné, alors que tout son argumentaire précédent était de dire que le RSP avait raison de réclamer la démission du PM et devait avoir ses raisons propres. Il entérinait donc la prévalence des intérêts d’un (petit) groupe sur toute la nation. Et en disant qu’il pensait que le PM Zida et le président Kafando ne pouvaient pas faire autrement que de céder à la "demande" pour ne pas dire aux ordres du RSP, il avalise aussi la primauté de la force sur le droit, tout en déniant à tout le reste du Burkina la capacité de dire non à la toute puissance du RSP. On serait tenté de penser que si on l’avait interrogé en Septembre dernier, il aurait parié sur le maintien de Blaise Compaoré et la modification de l’article 37, si tant est que c’est la force qui gagne toujours.

3°) La naïveté de l’analyse est tout aussi étonnante pour un analyste politique. Visiblement, il ne se demande pas que gagne le RSP à "démissionner" Zida le LtColonel du RSP ou Zida le PM à quelques semaines des élections. Car en art militaire comme en politique, on ne fait jamais rien sans raison, et l’insistance d’un camp pour faire partir Zida doit avoir une explication. On ne déstabilise pas un état pour des petites querelles de personnes. Il veut nous convaincre et se convaincre qu’en deux jours, on change d’équipe gouvernementale et on continue comme si de rien n’était. Il ne souffle pas mot du devenir des représentants de l’armée au CNT. Sachant qu’il a été témoin de la (simple) désignation des représentants des OSC au CNT, on se demande même s’il est de bonne foi tant c’est puéril.

Pour un acteur de la société civile qui dit soutenir la transition et la démocratie, c’est un peu surprenant et très inquiétant, car avant la démocratie, il y a la république, et il ne semble pas y croire beaucoup, ni partager les principes de base de l’état de droit. Il estime normal qu’un groupe de militaires, parce que les plus "opérationnels et armés", dictent leur volonté au président, à toute l’armée et au peuple, sans état d’âme et souhaite continuer dans cette voie "sans dramatiser". Désolant...


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