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Transition politique : l’Amicale des communicateurs propose un tribunal spécial à l’image des TPR

13 avril 2015, 03:38, par biriki

L’internaute n°11(Le Citoyen intègre, juste et droit), je vous remercie pour votre commentaire. Concernant le caractère intangible ou non de l’article 37 et le bien fondé de la loi électorale par rapport à l’article 25 de la charte africaine, voici mon analyse. Se prononcer sur le caractère légal ou non de la modification de l’article 37 oblige à revenir sur les méthodes d’interprétation en droit. On enseigne dans les facultés de droit que pour interpréter une loi, on peut recourir à plusieurs méthodes et même les combiner. La méthode exégétique (on peut dire que c’est la mère des méthodes) préconise de veiller à ne pas trahir l’intention du législateur quand on interprète une loi. Pour ce faire, quand la loi est très claire, point d’interprétation, on l’applique. Mais quand elle est obscure ou pose problème comme ce fut le cas de l’article 37 ( et c’est encore le cas pour certains) il faut alors rechercher l’intention du législateur. Le débat sur la modification de l’article 37 invitait donc les protagonistes à cet exercice. Certains se sont contentés de dire que, contrairement au Niger, rien dans notre Constitution ne rendait l’article 37 intangible. Or dans la recherche de l’intention du législateur, on doit entre autres, se référer à l’exposé des motifs et aux travaux préparatoires des lois. Dans l’espèce, l’exposé des motifs de la révision de l’article 37 en 2000 était qu’il fallait limiter le mandat à 5 ans renouvelable une fois pour éviter la personnalisation du pouvoir, permettre l’alternance afin de prémunir le Burkina des tentations d’accession au pouvoir par des voies violentes. Là se trouve l’esprit de la loi. C’est dire que la modification entreprise par le CDP violait cet esprit car si Blaise se présentait, la seule probabilité qu’il puisse remporter les élections heurte de front l’esprit de la loi qui est : un président ne peut pas faire plus 10 ans au pouvoir de façon consécutive. Malheureusement, il s’est trouvé de ‘’grands’’ juristes à s’accrocher seulement à la lettre de la loi, induisant en erreur du même coup, bien des citoyens de bonne foi.
Place aux causes d’inéligibilité contenues dans l’amendement de la loi électorale.
1.L’Article 166 de la Constitution du Burkina dispose que « La trahison de la Patrie et l’atteinte à la Constitution constituent les crimes les plus graves commis à l’encontre du peuple ». D’après ce texte, l’atteinte à la Constitution est un crime.
2.Où trouve-ton les questionnements qui entourent le crime dans l’ordonnancement juridique du Burkina ? Article 101 de la Constitution nous dit qu’il appartient à la loi de déterminer les crimes et délits ainsi que les peines qui leur sont applicables, etc.
3. Allons interroger donc la loi pénale pour savoir le sort qu’elle réserve à un auteur de tentative de crime, puisque c’est de cela qu’il s’agit ici. Avant de nous dire le sort réservé à l’auteur d’une tentative, le code pénal du Burkina définit la tentative en son article 59 en ces termes « la tentative consiste dans l’entreprise de commettre un crime ou un délit, manifestée par des actes non équivoques tendant à son exécution, si ceux-ci n’ont été suspendus ou n’ont manqué leur effet que par des circonstances indépendantes de la volonté de leur auteur. La tentative est punissable alors même que le but recherché ne pouvait être atteint en raison de circonstances ignorées de l’auteur ». Le code ajoute même en son article 60 que la tentative de crime est toujours punissable
5. Que dit la charte africaine de la démocratie, des élections et de la bonne gouvernance à propos de notre sujet ? Son article 25-4 dit ceci « les auteurs de changement anticonstitutionnel de gouvernement ne doivent ni participer aux élections organisées pour la restitution de l’ordre démocratique, ni occuper des postes de responsabilité dans les institutions politiques de leur Etat ».
La tentative étant punissable en droit pénal burkinabè (rappelons que c’est la Constitution qui nous demande d’aller voir la loi pour les questions de crime), la tentative de modification intervenue en octobre 2014 est donc punissable en application de notre Constitution, elle l’est davantage en application de la Charte africaine. Si on se limite à notre Constitution, c’est la Haute Cour de Justice qui s’en charge et peut prononcer l’inéligibilité comme peine complémentaire. S’agissant de la Charte africaine qui fait partie de notre droit interne, puisque ratifiée, on peut prononcer l’inéligibilité en dehors de toute décision de justice. En effet, la Charte Africaine dit que « …les auteurs ne doivent ni participer…ni occuper… » en son article 25-4 et en son article 25-5, « Les auteurs peuvent être traduits devant la Juridiction Compétente de l’Union ». En clair, pour la Charte Africaine, l’inéligibilité est impérative, le jugement est facultatif.


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