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Candidature de Djibrill Bassolé à la préssidentielle de 2015 : Après Ouagadougou, des jeunes de Bobo réclament « l’Homme d’Etat »

26 janvier 2015, 13:34, par shoucoul

DECLARATION
Dans cet écrit, Mahamadi Sawadogo s’insurge contre des propos tenu par Roch Marc Christian Kaboré lors d’une interview accordée à la radio privée Omega FM. Dans ce rappel historique, il retrace le parcours politique du président du Mouvement du Peuple pour le Progrès (MPP). Il met surtout le doigt sur les mauvais choix politiques opérés à certains moments par l’intéressé. Lisez plutôt !
Réagissez

Monsieur Rock Marc Christian Kaboré,
J’ai suivi avec un intérêt, l’interview que vous avez accordée à la radio Oméga FM au cours de l’émission « Dimanche Politique », le Dimanche 27 décembre 2014, sur votre engagement et parcours en politique.
J’avoue que votre sortie médiatique m’a permis et certainement à bien d’autres concitoyens, d’appréhender davantage vos convictions politiques mais qui renseigne également sur votre personnalité.
Cependant, je ne peux m’empêcher de relever vos propos que je trouve inexacts et qui constituent à mon avis des tentatives de votre part d’escamoter un pan non moins important de l’histoire politique de notre pays lorsque sur la question relative à la création de l’ ODP/MT, vous affirmez ceci : « Nous sommes rentrés en tant que l’union de lutte communiste –Reconstruite (ULC-R) dans la composition de l’ODP/MT (…) la création de l’ODP/MT est venue de la vision qu’il fallait unifier toutes les forces de gauche dans un regroupement pour essayer d’être plus efficace (…) Tout le monde a accepté, on s’est réuni et donc on a mis les structures et on a commencé à fonctionner (…) L’ ODP/MT devait regrouper sept (7) à huit (8) partis de gauche et concernait l’ULC-R, le GCB, l’ UCB, etc. qui ont été à la base de la création de l’ODP/MT ».
Monsieur Roch Marc Christian Kaboré,
Si le Groupe Communiste Burkinabè (GCB) et l’Union des Communistes Burkinabè (UCB), avec d’autres groupuscules communistes auraient eu la même vision que vous et auraient concouru pour la création de l’ODP/MT en 1989, ce ne fût cependant pas le cas pour l’Union de Lutte Communiste Reconstruite (ULC-R) tel que vous l’avez décrit.
En effet, l’organisation politique à laquelle vous apparteniez était bien sûr l’ULC-R, alors membre du conseil National de la Révolution (CNR). Mais elle est restée fidèle au Président Thomas Sankara après son assassinat crapuleux le 15 Octobre 1987.
Pour cette conduite loyale, un ratissage sera organisé par le Front Populaire contre les partisans Sankaristes. L’ULC-R va subir le plus le poids de la répression. Vos anciens camarades comme Firmin Diallo, Valère Somé, Charles Somé, Basile Guissou sont arrêtés et torturés. Mais pendant qu’ils croupissaient en prison et enduraient des sévices corporels, où étiez-vous ? Qu’aviez–vous fait en tant que militant convaincu de l’ULC-R face à cette situation ? Rien ! Pire, c’était de trahir vos camarades embastillés et les autres en cherchant à intégrer l’ULC-R au sein du Front populaire sous le prétexte fallacieux de « préserver la vie des membres de l’ULC-R détenus ». Vous serez mis en échec grâce à un membre de la direction, Valère Somé qui, de sa cellule de détention, va arriver à influencer les débats au sein de l’ULC-R en exhortant les camarades sincères à tenir fermement dans la voie du refus. Il fût soutenu par la majorité des membres du parti.
Monsieur Roch Marc Christian Kaboré,
Voulant mettre à profit la commémoration de la journée Anti-impérialiste de la jeunesse, les élèves et les étudiants envisagèrent des manifestations le 19 mai 1988 pour réhabiliter le Président Sankara. Le Front populaire va s’en servir pour réprimer à nouveau les militants de votre parti l’ULC-R qui auparavant, avaient encouru des menaces d’une répression sans précédent au cas où les élèves et les étudiants sortiraient dans la rue.
Quelle fût encore votre conduite ? C’était le sauve-qui-peut pour vous, car sous l’effet de la peur d’une éventuelle répression du Front Populaire, vous déposiez le 16 mai 1988, une lettre de démission adressée au bureau politique et au comité central dans laquelle vous vous « désengagiez de l’ULC-R dont les prises de positions et de décisions à compter de ce jour (16 mai) ne vous liaient plus », selon vos propres termes.
Comme c’était prévu, les manifestations eurent lieu. Elèves, étudiants, membres dirigeants de l’ULC-R sont à nouveau arrêtés puis torturés. Ce fût ce moment-là pour vous de concrétiser votre collaboration avec le Front populaire. Votre sbire Alain Coéffé s’en chargea en se rendant au bureau de Bongnessan Arsène Yé, coordonnateur national des structures populaires, muni de votre lettre de démission de l’ULC-R du 16 mai, pour justifier votre non-implication dans les manifestations des élèves et étudiants. Blaise Compaoré va alors exiger de vous, la dissolution de l’ULC-R au sein de l’ODP/MT.
Monsieur Roch Marc Christian Kaboré,
Comment expliquiez-vous qu’un homme politique de votre trempe qui s’était désengagé de son parti l’ULC-R et de ses prises de positions et décisions, pouvait-il se retrouver à négocier avec le Front Populaire au nom de la direction de ce même parti à la création de l’ODP/MT ? Comment justifiez-vous alors votre poste de ministre de l’Equipement et des Transports dans le gouvernement du Front Populaire avant même la tenue du « bilan critique de la participation de l’ULC-R au sein du CNR » ?
Pourtant, sous la Révolution Démocratique (RDP), les démarches d’unification de tous les partis de gauche, membres du CNR, avaient été confiées à l’ULC-R par Thomas Sankara qui, du reste, avait suggéré d’avoir l’aval de Blaise Compaoré. Valère Somé qui fût chargé de cette mission, tenta en vain de l’obtenir car celui-ci (avec vous peut-être) avait son plan B pour le 15 octobre 1987.
C’était donc pour entraver ce marchandage dont l’ULC-R faisait l’objet que la direction du parti rendit publique une déclaration dans laquelle elle suspendait toutes les activités publiques du parti et dénonça à l’ avance tout « trafic » que vous effectueriez en son nom. Ce fût cette opposition à votre machination que ses membres furent encore arrêtés et sauvagement torturés dans la prétendue « tentative de déstabilisation » du régime de Blaise Compaoré par Boukari dit le Lion, le 20 décembre 1989.Guillaume Séssouma est porté disparu jusqu’à nos jours.
Monsieur Roch Marc Christian Kaboré,
Finalement, l’ODP/MT vit le jour le 15 avril 1989 dans des conditions atroces pour certains de vos anciens camarades de lutte mais sans conteste de bonheur pour vous. Gratifié au poste de ministre de l’Equipement et Transports, vous trouviez que le « processus de rectification engagé le 15 octobre est une continuation du processus révolutionnaire en cours dans notre pays depuis le 04 août 1983 (…) Dans ce sens, la naissance de l’ODP/MT doit être saluée comme un pas qualitatif ... » Cf. Prolétaire N°10, Mars 1990.
Pour l’ODP/MT, votre parti fantoche naissant, c’était une « victoire du camp du peuple entier sur tous les réactionnaires, les apatrides qui rêvaient de faire de l’ULC-R, le tremplin de la subversion et de la contre-révolution dans notre pays ».Cf. Yeelen N°7, mars 1990.
La direction de l’ULC-R ne perdit de temps. Elle réagît en convoquant le congrès extraordinaire qui se tint les 23, 24 et 25 mars 1990 sous le thème : « Pour une orientation nouvelle en vue d’une action politique qui tienne compte des exigences de notre peuple et de notre époque » au cours duquel votre décision d’auto-exclusion de l’ULC-R du 16 mai 1988 fût ratifiée.
A la fin de ce congrès, l’ULC-R se mua en Parti de la Démocratie Sociale (PDS), parti d’opposition, qui lança un appel à la mobilisation de toutes les forces démocratiques pour entre autres :
• « refuser le totalitarisme Frontiste aux ambitions bonapartistes » ;
• « Mettre un terme au régime de terreur du Front Populaire » ;
Monsieur Roch Marc Christian Kabore,
A la lumière de ce qui précède, je comprends maintenant pourquoi dans votre manifeste du MPP, vous qualifiez l’assassinat du Président Thomas Sankara le 15 octobre 1987 de « renaissance de l’espoir ».
Mais grâce aux témoignages d’autres acteurs de cette époque, vous ne serez plus en mesure de falsifier cette page de l’histoire au gré de votre boulimie ostensible du pouvoir. Ceci est un défi de la jeunesse
Je tire la conclusion que vos convictions politiques ont toujours été conditionnées par des postes liés aux avantages y afférents.
Quant à votre parcours politique (de Thomas Sankara à Blaise Compaoré et de l’ULC-R au MPP en passant par l’ODP/MT puis le CDP), il est jalonné comme on a pu le voir, d’actes de lâcheté, de trahison et de compromissions.
Ministre de l’équipement et des transports, ministre de l’économie et des finances, Premier ministre, deux fois Président de l’Assemblée Nationale, telles furent vos récompenses.
Il manque maintenant dans vos collections et dans votre tableau de chasse, le titre de Président du Faso.
Mais, il reste à savoir si le peuple est disposé à vous l’accorder.
Attendons de voir.


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