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Lettre ouverte au nouveau gouvernement : Renforcer un mur ne le fait pas tomber

19 novembre 2022, 09:33, par Mechtilde Guirma

Pour l’en dissuader, il faut nouer un partenariat solide avec un pays dont elle redoute la puissance nucléaire. […] Le terrorisme est une invention de l’occident et dans le contexte actuel, il serait extrêmement difficile de le vaincre sans un partenariat avec une puissance nucléaire supérieure qui puisse l’intimider.

Monsieur Sawadogo, vous me faites sourire. Ce que vous préconisez là, c’est vraiment trop beau pour être vrai :

ET SI CETTE PUISSANCE NUCLÉAIRE SE révélait ÊTRE précisément GRIPPEMINAUD le chat ?

Et pourtant les choses sont si simples. Nous n’avons pas besoin d’épouvantails pour nous faire respecter. Tenez jetez vous même un coup d’œil sur les pays (notamment africains) qui ont usé jadis de ces genres d’épouvantails. Que sont-ils devenus aujourd’hui ?

Bref moi aussi j’ai assez fait de propositions. J’ai beaucoup participé aux réflexions concernant l’avenir de notre pays non seulement en connaissance de cause, mais aussi en tant que témoin oculaire de son évolution depuis la période coloniale jusqu’à nos jours en passant par les vraies démocraties et « la fameuse révolution démocratique et populaire »,

Mr. Sawadogo, le mal de notre pays aussi, en d’autres termes le véritable « bouc émissaire » c’est la jeunesse qui manque de repères ». Et sans repères, ils ne peuvent pas avoir un idéal, ni de rêves, ni une vocation professionnelle ou sociale qui leur sont inhérents. Les jeunes n’ont pas de rêves ni projet d’avenir. Ils sont de façon perpétuelle dans l’angoisse, la peur du lendemain sans la pitance quotidienne. Par exemple un enfant du village qui par chance finit le secondaire, son orientation universitaire c’est du bluff. Seul le diplôme l’intéresse, pour devenir ministre. Il ne retournera pas dans village, pour y mettre en valeur son diplôme. La ville reste son attraction, pour devenir député, fonder une ONG amasser l’argent et battre campagne en fondant son parti. Au besoin, il étouffera les projets des autres et même s’y substituera sans pourtant avoir la capacité de les faire aboutir. Mieux, à notre retour de l’Europe, j’ai assisté à une conversation ou des parents se bousculent pour inscrire leurs enfants au Prytanie militaire. Raison invoquée ? Les enfants sont sûr de toucher des salaires substantiels, en plus la chance de devenir Président de la Républiques, car en effet c’était l’ère du temps des militaires au pouvoir et qui n’a pas l’air de vouloir s’estomper un temps soit peu, et même qui s’instituait en carrière politique de gouvernance, une sorte de patrimonialisation de l’armée avec la bénédiction de Sankara dans sa fameuse déclaration : « Un militaire sans formation… », qui a précisément opté pour cette puissance nucléaire dont vous parlez, inaugurant ainsi l’ère des exécutions sommaires et extra-judiciaires et préparant l’invasion de notre pays par de prétendus terroristes qui ne sont personnes d’autres que nous-mêmes. Tout comme aujourd’hui Sankara a jouit de l’exode rural en ville pour sa révolution.

Et pourtant le village offre beaucoup de possibilités vocationnelle pour faire décoller le pays : de l’agriculture à la métallurgie en passant par l’agronomie, la météorologie, la sidérurgie, la Culture. Moi qui suis née dans la ville, et appartenant à une famille de noblesse, j’ai voulu apporter un démenti formel comme quoi les Mossi sont des dangereux féodaux aux coutumes néfastes qui maltraitent les femmes qui dit-on sont sans droit. Par contre mon père qui ne faisait rien sans consulter ma mère une véritable connivente dans l’éducation de leurs enfants, était traité de faiblard parce que, il paraîtrait qu’il se laissait commander par cette dernière qui n’était qu’une orgueilleuse (qualité ou défaut qu’on m’a aussi attribué plus tard). Et j’ai de ma mère et de mes tantes, les contes les légendes les proverbes etc. qui illustraient la vie au quotidien et nous interpellaient nous les enfants pour l’avenir. En effet mes tantes étaient les égales de mon père en matière d’autorité vis à vis des enfants et aussi les médiatrices entre mon père et ma mère en cas de brouille. C’est pourquoi dans mes interrogations sur la question de la femme, je me suis inscrite en Sciences Politiques et Relations Internationales, là j’ai trouvé ma pleine vocation. Et comme tout justement ce fut un diplômes en cours de carrière je n’ai pas bénéficié du droit de reclassement de B à A. j’ai été à la retraite avec mon diplôme de secrétaire dactylo (B3). Mais qu’à cela ne tienne, je ne m’en plains pas, la preuve c’est qu’aujourd’hui, n’importe quelle diplômé ou diplômée universitaire ne peut venir déblatérer sa pédanterie sur moi, au sujet de la condition de la femme dans mon ethnie comme il a toujours été question d’ailleurs dans toutes les bouches même des bailleurs de fond et ONG.

Le vrai mal du pays dans ce domaine, est que la mobilité sociale, qui devrait permettre qu’on quitte une situation inférieure de son État pour rejoindre la position supérieure par sa compétence n’existe pas. Or la mobilité sociale est le moteur même du développement. Les gens sont obligés alors d’inventer toutes sortes de stratagèmes pour y parvenir dans la vie en utilisant non seulement des moyens illégaux mais également la corruption. D’où la carence de la compétence dans les services. Et qui dit carence de compétence, dit aussi carence de « Conscience professionnel » nid de jalousie, de concurrence déloyale et féroce, de récupérations qui n’aboutiront jamais faisant le jeu des puissances mafieuses (qui existent dans tous les pays). Et même les bonnes volontés finissent par être pris dans le jeu infernal faute de pouvoir s’y prendre autrement. Un tel pays n’avancera jamais et cafouillera à la recherche de « puissance nucléaire en puissance nucléaire » comme s’il en fallait passer par là, pour se rendre compte in fine et comme le dit le proverbe moagha « Si tu n’as pas la patience de venter ton feu dont le bois est humide et que un à un tu les retires sous prétexte qu’ils produisent de la fumée que restera-t-il sous ta marmite pour la faire bouillir ? ». Oui on irait alors de corruption en corruption (ou de coup d’État en coup d’État). En tout cas nous y sommes déjà sans qu’on puisse croire qu’on s’en sortira un jour.

Mais puisque vous semblez présager le mieux pour l’avenir de notre pays, en raisonnant en terme de puissance nucléaire en puissance nucléaire, je vous répondrai ceci : vous êtes plus jeune que moi et maîtrisez le numérique et autres gadgets modernes. Si l’Afrique devrait flirter avec, faute d’alternative salvatrice autre que, de puissance nucléaire en puissance nucléaire, rappelez-vous encore que le proverbe moagha dit aussi ceci : « l’oiseau a beau voler d’arbre en arbre, de pays en pays, il revient toujours mourir dans son nid originel ». Bonne chance à vous !... pour toute l’Afrique.


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