Accueil > ... > Forum 2222068

Prolongement du congé de maternité à six mois : « Les plus grandes oppositions viennent de la gent féminine », selon Salif Ouédraogo

25 septembre 2021, 19:09, par Sidpawalemde Sebgo

Hum... Si je comprends bien, cette initiative voudrait faire le bonheur des femmes malgré elles et même contre elles ! Quelle prétention...
Le congé paternité est une bonne idée, mais en avons-nous les moyens ? Les avancées sociétales des pays riches et en manque de natalité, on ne les copie pas si on n’a pas un "état providence" à la hauteur des leurs. Pendant qu’on n’a même pas de mutuelle de santé ni d’indemnité chômage, vous voulez brûler les étapes.

Bon, je n’oserai pas parler au nom de toutes les femmes salariées. Je vais me contenter de parler des aspects négatifs de la mesure préconisée en général.

1°) Le congé maternité a un déclenchement administratif, s’appuyant sur un certificat de grossesse et une estimation de la date d’accouchement présumée. Vous voudriez qu’elle soit "médicalisée", c’est à dire déclenchée par une décision médicale. Or, c’est la femme qui va demander à son médecin de lui faire ce papier. Si elle va directement déposer sa demande de congé au service c’est pas plus simple ? Vous voulez alourdir le processus et surtout le travail des médecins qui peinent déjà a assurer les rendez-vous avec leurs malades, on se demande bien pourquoi ?

2°) Au moment de partir en congé, une femme ne peut pas savoir si son accouchement sera à problèmes, ou si d’autres soucis apparaitront. elle n’a donc aucune façon de savoir s’il lui faut demander 3 mois ou plus, selon votre proposition. Il serait plus logique de prévoir une possibilité de prolongation que de choisir en début de congé.

Or, la loi prévoit déjà que la femme puisse cumuler son congé de maternité avec son congé annuel pour le prolonger. Elle prévoit aussi les horaires aménagés pour l’allaitement, les autorisations d’absence, le congé pour raisons de santé, et enfin le congé sans solde. Pourquoi laisser tout cela pour toucher au congé de maternité ?
Plus grave, l’idée d’un congé sans solde ne saurait être imposée par l’accouchement mais rester un choix du salarié.

3°) Aucune organisation ne peut laisser un poste vacant pendant 6 mois. Le poste sera donc pourvu, et cela compliquera le retour de la femme, qui sera probablement réintégrée à un autre poste si on ne veut pas être injuste avec son remplaçant. Alors que tous les postes ne se valent pas. De plus, six mois de déconnexion demande un temps de retour à l’efficacité. Cette situation fera que la femme elle-même hésitera à faire un enfant si cela doit l’empêcher de progresser ou lui faire perdre une position durement acquise.

Je ne suis pas sûr que les femmes ont envie de recommencer pratiquement à zéro à chaque accouchement. Elles aussi ont droit à une carrière... et à leur "gombo" !

3°) C’est la CNSS qui assure le paiement du salaire de la femme en congé de maternité. Le doubler, c’est aussi doubler ses dépenses pour cette prestation sociale. Qui va payer, sachant que les cotisations du salarié ne changent pas ? Soit on mets la CNSS en difficulté et gare à nos retraites, soit on demande aux employeurs de cotiser plus.

Payer plus pour voir son employée travailler moins, tout en engageant quelqu’un d’autre pour faire son travail, c’est clairement dire aux entreprises privées de ne plus employer de femmes.
Monsieur Ouédraogo dit :"On ne pourra pas chasser une femme parce qu’elle a accouché et qu’elle doit bénéficier de six mois de congé". Non, on anticipera et on ne l’embauchera pas, tout simplement !

En définitive, les conséquences de cette initiative seront dans le meilleur des cas un frein à la carrière des femmes et dans le pire des cas un recul de l’emploi des femmes. Même dans la fonction publique, devoir remplacer 6 mois un travailleur puis le réintégrer (sans licencier son replaçant) va encore creuser le manque criard d’effectifs dans tous les domaines.

C’est une tendance dangereuse, car si on veut suivre votre logique, c’est la durée de l’allaitement maternel exclusif qui sert de boussole. Pourquoi pas l’âge de marcher ou de parler de l’enfant la prochaine fois ? Ou la démission au premier accouchement ?

Est-ce l’objectif, que les femmes piétinent dans leur carrière ou ne puissent plus travailler et restent "au foyer pour s’occuper des enfants" ? Mais dites-moi, cela ressemble fortement à du "talibanisme" hein, cette affaire de vouloir que "la femme reste à la maison" là !

C’est pas mieux que chacun essaye de convainque sa femme plutôt que de vouloir en faire une loi nationale ?


LeFaso.net
LeFaso.net © 2003-2023 LeFaso.net ne saurait être tenu responsable des contenus "articles" provenant des sites externes partenaires.
Droits de reproduction et de diffusion réservés