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Justice : Détourneurs de vivres et maires révoqués à la barre

Publié le vendredi 23 septembre 2005 à 07h40min

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C’est la Chambre criminelle de la Cour d’appel de Ouagadougou qui va connaître des dossiers des maires révoqués des communes de Ouahigouya, de Koudougou et de Zorgho. Ainsi en a décidé la Chambre criminelle de la Cour de cassation en son audience extraordinaire de vacation du 22 septembre 2005. Quant au dossier de détournement de vivres dans l’Oudalan, il reste à la Cour de cassation pour complément d’informations.

Le dernier trimestre de l’année 2004 et le premier semestre de 2005 ont été agités dans les conseils municipaux. Les vagues qui en ont découlé ont provoqué la révocation de trois maires. Issa Joseph Diallo de Ouahigouya, François Xavier Tilado Kaboré de Zorgho, Marcellin Noraogo Yaméogo et Emmanuel Zoma, deux personnes qui se sont succédé à la tête de la mairie de Koudougou. Tous ont été révoqués pour faute grave de gestion avec en sus des poursuites judiciaires. Depuis, on attendait le dénouement judiciaire de ces affaires qui ont défrayé la chronique.

Ce qu’il faut savoir, c’est que les personnes mises en cause bénéficient d’un privilège de juridiction, privilège qui se rattache à leur fonction au moment des infractions qui leur sont reprochées. Le maire est au terme de la loi, un Officier de police judiciaire (OPJ) ; par conséquent, lorsqu’il doit être jugé, il y a une procédure spéciale à suivre.

Elle est consignée dans l’article 668 du code de procédure pénale. Cet article dispose en substance que lorsqu’un OPJ a commis une infraction dans l’exercice ou hors de ses fonctions, le dossier judiciaire, qui est monté contre lui, est transmis à la Chambre criminelle de la Cour de cassation qui se charge de désigner la juridiction d’instruction et du jugement du dossier.

En audience extraordinaire de vacation, la Chambre criminelle de la Cour de cassation présidée par Dé Albert Millogo a donc examiné les dossiers des ex-maires incriminés. Tous étaient présents physiquement sauf Marcellin Yaméogo.

Devant la Chambre criminelle, il ne s’agissait donc pas de juger les dossiers, mais de désigner les juridictions qui vont les traiter. Sans surprise, tous ont demandé à être jugés à Ouagadougou pour des raisons pratiques liées entre autres à leur actuel lieu de résidence.

Dans ses réquisitions, le procureur général, Urbain Traoré, même s’il avait au départ souhaité que le dossier Issa Joseph Diallo soit jugé à Koudougou, a finalement accédé à la requête des ex-maires, en demandant qu’il plaise à la Cour de désigner la Chambre criminelle de la Cour d’appel de Ouagadougou comme juridiction devant statuer sur les trois dossiers.

En rendant son délibéré, la Cour est allée dans le même sens que le procureur général. Ainsi, la juridiction de jugement retenu pour ces dossiers est la Chambre criminelle de la Cour d’appel de Ouagadougou. L’instruction des dossiers se fera dans deux cabinets d’instruction près le tribunal de grande instance de Ouagadougou. Il s’agit du cabinet d’instruction n°4 pour le dossier François Xavier Tilado Kaboré et le cabinet du doyen des juges d’instruction près le Tribunal de grande instance de Ouagadougou pour les dossiers de Issa Joseph Diallo, Emmanuel Zoma et Marcellin Noraogo Yaméogo.

C’est dire que bientôt, les juges d’instruction vont commencer leur travail en auditionnant les mis en cause. L’instruction, on le sait, se fait à charge et à décharge. Une fois bouclées, les conclusions de ces juges seront transmises à la Chambre criminelle de la Cour d’appel de Ouagadougou pour jugement s’il y a lieu de poursuite.

Quant au dossier de détournement de vivres dans l’Oudalan, il implique un ex-Haut-commissaire, Inoussa Hassan Lingani, quatre préfets et sept autres personnes. Ils sont tous accusés d’avoir détourné des vivres qu’Alizéta Gando avait remis pour les populations vulnérables de l’Oudalan. Depuis, Lingani et ses acolytes sont à la Maison d’arrêt et de correction de Ouagadougou (MACO).

Si ce dossier est examiné par la Chambre criminelle de la Cour de cassation, c’est simplement parce qu’il y a parmi les mis en cause des OPJ (le haut-commissaire et les quatre préfets). Le dossier étant unique, les sept autres qui ne devraient pas bénéficier du privilège de juridiction vont donc en bénéficier. Justifiant cela, le président Dé Albert Millogo a cité une sagesse africaine : « Quand le caillou suit le haricot, il subit avec lui le sort de la cuisson ».

Quant au fait qu’ils sont tous à la MACO, M. Millogo a évoqué les articles 663 à 669 du code de procédure pénale, qui justifie leur détention. En effet, ces articles donnent la latitude au président de la Chambre criminelle de placer les mis en cause sous mandat de dépôt avant l’audience. Foi d’Albert Millogo, « En plus de 20 ans de carrière, c’est la première fois que je traite d’une telle procédure. Elle est spéciale ».

Dans ses réquisitions concernant ce dossier, le procureur général, Urbain Traoré a déclaré que ce dossier traitait d’ « une affaire très simple, mais de nature criminelle ». Il a rappelé que le haut-commissaire, les quatre préfets et un autre sont poursuivis pour détournement de vivres tandis que les autres le sont pour recel de sacs de vivres. M. Traoré a sollicité la Chambre criminelle pour qu’elle désigne un membre de la Cour de cassation pour instruire le dossier, car il y a toujours des zones d’ombre dans ce dossier. C’est seulement après, que l’on transmettra le dossier à une juridiction.

En rendant sa décision, la Cour a accédé à la requête du procureur général. Ainsi, Honoré Tiendrébéogo, conseiller à la Cour de cassation a été désigné pour conduire une information judiciaire sur ce dossier. Par la suite la juridiction appropriée sera saisie.

Quant à la requête d’une liberté provisoire formulée par Lingani et ses camarades, le président de la Chambre n’y a pas donné une suite favorable, car, cela relève de la compétence du juge d’instruction qui n’est même pas encore désigné. M. Millogo a alors renvoyé les dealers présumés de vivres à leur logis à savoir la MACO.

Affaire à suivre.

San Evariste Barro

L’Observateur Paalga

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