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Economie : La lisibilité de la relance burkinabè reste à établir, selon l’économiste Claude Weta

Publié le vendredi 17 avril 2020 à 22h20min

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Economie : La lisibilité de la relance burkinabè reste à établir, selon l’économiste Claude Weta

Les arguments juridiques et financiers sur lesquels les ministres et la Direction générale des impôts (DGI) se basent pour donner quitus au gouvernement, sont faibles pour traiter de la question de l’extension de l’IUTS sur les primes et indemnités aux fonctionnaires du public. C’est ce qu’affirme le docteur Claude Weta dans son analyse sur les implications économiques de l’IUTS et du Covid-19. Pour lui, il aurait fallu y adjoindre des arguments économiques, politiques.

Pendant longtemps certains revenus importants, tels que les émoluments des députés, ont échappés à l’IUTS. Sans compter ces milliers d’individus qui camouflent leurs revenus pour échapper à l’imposition. Des opérateurs économiques du secteur informel, de nombreux propriétaires de bâtiments en location (célibatérium, boutiques, magasins …), les propriétaires fonciers, les sociétés minières, les sociétés de téléphonies etc., paient soit un impôt dérisoire soit ne s’acquittent même pas de cette obligation. En effet au 31 décembre 2016 les restes à recouvrer (RAR) que les entreprises doivent à l’Etat représentent plus 600 milliards de F CFA alors que l’IUTS a été recouvré à plus de 109% entre 2015 et 2016.

C’est au regard de ces faits, que le Docteur veut inviter le gouvernement et ses griots à arrêter d’intoxiquer le peuple. Mieux, que ceux qui ne payent pas l’impôt arrêtent de crier aux imposteurs. Pour le docteur Weta, ce sont quelques avantages que présente l’IUTS, qui ont amené certains cadres à encourager le gouvernement à opérer son prélèvement sur les primes et indemnités du public. La question de l’équité, n’est qu’un attrape-nigaud et un paravent fabriqué à la hâte pour distraire la galerie.

En outre, le débat sur l’histoire de l’IUTS admet des zones d’ombre, selon le docteur Weta. Et la dernière en date a été le revirement à 180° du gouvernement en 2017, pour étendre désormais l’IUTS aux primes et indemnités dans le public, alors qu’une commission travaillait à sa suppression dans le privé et le parapublic. Pour lui, il est alors temps que les dépositaires des informations capables de faire évoluer le débat sur l’histoire de l’IUTS, interviennent pour éviter de laisser le champ à des cadres aux connaissances bridées qui servent une version tronquée de cette histoire.

Le docteur Weta trouve que même les entrepreneurs devaient accorder une attention particulière à cette question de minimisation des salaires. Parce qu’économiquement cela n’est pas favorable à la concurrence, qui elle-même favorise le consommateur. Derrière les tractations sur l’impact de cet impôt sur le revenu du travailleur, le Dr Weta veut légitimer les revendications salariales du travailleur burkinabè qui, pour paraphraser feu le président Omar Bongo Ondimba, touche des perdiems et non des rémunérations salariales.

Parlant du Covid-19, le Dr Weta trouve qu’au Burkina Faso, la question a été traitée au départ comme une question exclusivement sanitaire. Ce qui est loin de la réalité puisqu’elle est aussi une question éminemment économique. Pour faire face à la pandémie, le G20 et les Etats-Unis ont respectivement débloqué 5000 milliards de dollar et 2000 milliards de dollar.

Le Dr Claude Weta se demande pourquoi certains Etats peuvent générer autant de ressources en quelques jours, alors que d’autres sont démunis. Il se veut cependant clair sur le rôle régalien d’un Etat. Pour lui, son rôle n’est pas de tendre la main aux partenaires techniques et financiers, ni aux sociétés, ni aux individus nantis. Il doit utiliser les outils de gestion macroéconomiques pour relancer l’économie en cas de besoin. Des outils autres que ceux utilisés couramment par le MINEFID.

Par exemple, la baisse de la rémunération des salariés, induite par l’IUTS, va refroidir l’économie et peut engendrer à terme une récession. En revanche, la décision de ne pas appliquer l’IUTS aux primes et indemnités des agents publics et du privé, affectera positivement la demande globale qui aura un impact sur tous les compartiments de l’économie. « Une baisse de l’impôt va conduire à un accroissement de la consommation via une augmentation du revenu disponible ». Mécaniquement, cette hausse de la consommation va accroitre la production et donc le revenu des offreurs », écrit-il.

Mais avec le Covid-19 qui affecte l’activité économique, ce sont les acteurs de la vie économique, ceux qui étaient contre la lutte des syndicats pour le maintien ou le renforcement de leur pouvoir d’achat, qui sortent pour demander une relance de l’économie. Le syndicat des commerçants du secteur informel, les opérateurs économiques, les taximen, les vendeuses des fruits et légumes, etc. embouchent la même trompette pour réclamer le maintien de tout ou partie de leur pouvoir d’achat. Ironie du sort !

Si les Etats africains et notamment le Burkina Faso, n’ont pas su sur quel pied danser jusqu’en fin mars, les positions se sont précisées depuis début avril, avec la certitude qu’une manne va atterrir dans les caisses des Etats. L’Etat ne doit pas tendre la main, même si son rôle est de mobiliser les ressources. Il doit utiliser les outils de gestion macroéconomiques pour relancer l’économie.

Pour Weta, l’IUTS et le Covid-19 choisissent leur doctrine économique. S’il y a eu des milliers de morts à travers le monde, c’est parce que les recherches sur ce type de virus, connu depuis longtemps, ont été abandonnées car estimées non rentable ! La rentabilité est un outil utile mais pas toujours approprié pour agir.

En effet l’économie reste une science humaine, elle possède des lois et des règles, ce qui n’est pas toujours bien compris. Beaucoup de gouvernants écoutent leur sentiment et pensent qu’ils peuvent gérer les questions économiques en faisant fi de ces lois. Le gouvernement burkinabè, consciemment ou inconsciemment néglige les outils pertinents d’analyse des politiques publiques et fait la part belle aux instruments dont la robustesse est plus que douteuse.

La relance économique, qui se trouve dans la bouche et les écrits des acteurs du secteur informel, des opérateurs économiques divers et qui a occupé une bonne partie du discours du président du Faso, passe soit par la demande des consommateurs en accroissant leurs revenus, soit à travers l’offre en développant l’investissement. La relance peut également être mixte et inclure les deux politiques.

Pour lui, la France et les Etats-Unis comptent déséquilibrer ou réaménager le budget de l’Etat pour soutenir les travailleurs mais aussi pour éviter de rentrer en crise comme en 1929. En France, le ministre de l’Économie et des Finances a expliqué que l’État prendra à sa charge l’indemnisation de tous les salariés placés en chômage partiel.

Quel type de relance le président du Faso a- t-il choisi pour son pays en proie à des difficultés de tout ordre ? Pendant que beaucoup de gouvernements sont dans l’action au niveau économique (Niger, France, Venezuela, Etats-Unis, Belgique, etc.) le Burkina est toujours en période de réflexion ou dans des actions de la vision sectorielle (méso économique). La lisibilité de la relance burkinabè reste à établir.

Comment peut-on devant des questions économiques majeures de la nation convoquer une seule régie de recettes, qui plus est, la Direction Générale des Impôt qui a en charge l’ensemble des missions et prérogatives en matière fiscale ? Où met-on le Trésor ? Où met-on l’INSD ? Etc. Ne sommes-nous pas en train de redécouvrir les bienfaits des services publics et de l’entraide, combien précieux, pour vaincre le Covid-19, dans le cadre de ce drame sanitaire ?

Synthèse de Etienne Lankoandé
Lefaso.net

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Vos commentaires

  • Le 17 avril 2020 à 17:10, par Indjaba En réponse à : Economie : La lisibilité de la relance burkinabè reste à établir, selon l’économiste Claude Weta

    Avec votre Renlac qui ne veut pas qu’on perçoive l’impot chez les fonctionnaires, les choses risquent compliquées d’autant plus que ce meme Renlac veut qu’on verse des salaires à des travailleurs qui n’ont travaillé.

  • Le 17 avril 2020 à 17:24, par moussa En réponse à : Economie : La lisibilité de la relance burkinabè reste à établir, selon l’économiste Claude Weta

    quelle belle analyse !! j’ai aimé ce Dr quand j’étais au campus

  • Le 17 avril 2020 à 20:46, par Hamidou En réponse à : Economie : La lisibilité de la relance burkinabè reste à établir, selon l’économiste Claude Weta

    Une baisse de l’impôt va conduire à un accroissement de la consommation via une augmentation du revenu disponible. Mécaniquement, cette hausse de la consommation va accroitre la production et donc le revenu des offreurs.

    Mais de quelle production et de quels offreurs parle-t-il ? Les vendeurs de bissap, gnamakoudji, teedo, ochata, choux, aubergines et autres ? Tout le monde sait que notre pays ne produit rien. Avec la pandémie à COVID-19 où tous les pays ont tout fermé, on l’a très bien vu d’ailleurs : même un simple masque, on ne sait pas fabriquer. Tous les jours on parle de diagnostique de masse, mais avec quels réactifs puisque les firmes pharmaceutiques livrent prioritairement aux pays riches. Notre pays n’a absolument rien ; sinon le président n’allait pas appeler aux "bonne volonté" qui "laissent parler leur cœur". Notre pays ne produit absolument rien. C’est sûr que "l’augmentation du revenu disponible" dont parle M. WETA enrichira le Japon, la Corée du Sud, la Chine, etc. qui nous vendent des V8, des écrans plats, des frigos et autres. C’est de l’argent qui sort du pays. Que vendons-nous de durable qui puisse nous permettre de tenir longtemps ? Je laisse les uns et les autres méditer sur la réponse.

    C’est décevant. Le vrai problème du Burkina Faso ce sont ses "intellectuels". Tant que ces gens-là seront devant, il n’y aura point de développement.

  • Le 17 avril 2020 à 21:42, par Le Vigilent En réponse à : Economie : La lisibilité de la relance burkinabè reste à établir, selon l’économiste Claude Weta

    Dr Wetta, si vous voulez soutenir la lutte des fonctionnaires pour la suppression de l’IUTS sur leurs primes et indemnités, organiser des conférences de presse et des des marches-meetings pour le faire. Mais vouloir utiliser votre titre de « docteur en économie » pour nous forcer à adhérer à votre position quelque peu partisane, il y a comme un forcing. Votre argument selon lequel lIUTS baisse le salaire des fonctionnaires et que par conséquent c’est toutes les branches de l’économie nationale qui en pâtira n’est pas du tout convainquant. Vous raisonnez comme si dans ce pays il n’y a de consommateur que le fonctionnaire. Dites-nous de combien p.c l’IUTS réduit le salaire des fonctionnaires ?

  • Le 18 avril 2020 à 09:50, par Pratico-Pratique En réponse à : Economie : La lisibilité de la relance burkinabè reste à établir, selon l’économiste Claude Weta

    « Derrière les tractations sur l’impact de cet impôt sur le revenu du travailleur, le Dr Weta veut légitimer les revendications salariales du travailleur burkinabè qui, pour paraphraser feu le président Omar Bongo Ondimba, touche des perdiems et non des rémunérations salariales. »
    Dr, avec de tels propos, vous participez vous aussi à l’intoxication du peuple. Remettons en contexte les propos de feu président Bongo et vous vous rendrez compte que vous participez énormément à la manipulation. Quand Bongo tenait ces propos, vous savez combien coûtait un poulet à Libreville ? (Je ne doute pas un instant que vous vous en souvenez). Avec votre salaire de docteur de l’époque (sans les à-côtés bien sûr), vous n’auriez pas pu vous acheter un poulet tous les trois (3) jours à Libreville alors que vous en auriez mangé un voire deux par jour à Ouagadougou à la même époque. Au-delà, vous utilisez les propos du président d’un pays que la nature a « gâté » et qui se moquait du nôtre.
    « Mais avec le Covid-19 qui affecte l’activité économique, ce sont les acteurs de la vie économique, ceux qui étaient contre la lutte des syndicats pour le maintien ou le renforcement de leur pouvoir d’achat, qui sortent pour demander une relance de l’économie. Le syndicat des commerçants du secteur informel, les opérateurs économiques, les taximen, les vendeuses des fruits et légumes, etc. embouchent la même trompette pour réclamer le maintien de tout ou partie de leur pouvoir d’achat. Ironie du sort ! »
    Dr, en quoi vous y voyez une « ironie du sort » ? Les acteurs de la vie économique ont bel et bien le droit de demander le soutien de l’Etat ou la reprise de leurs activités. S’ils ne travaillent pas dans la durée, ils auront des difficultés pour subvenir à leurs besoins élémentaires. Pendant ce temps, depuis le confinement l’Administration fonctionne à minima, certains agents publics ne vont même plus au travail mais leur salaire est assuré. Toute la durée du confinement, les fonctionnaires toucheront leurs salaires sans un franc en moins malgré…
    En somme, sauf votre respect, Dr, vous pouvez défendre vos convictions sans dire des contre-vérités qui n’honorent pas votre titre. Le rôle d’un vrai intellectuel est d’éclairer ou d’influencer sans manipuler.

  • Le 18 avril 2020 à 10:43, par SIDNABA En réponse à : Economie : La lisibilité de la relance burkinabè reste à établir, selon l’économiste Claude Weta

    Dr Wetta, parlons de production et augmentation ou baisse de revenus des ménages au Burkina. Étude de cas : La production et la consommation de tenues traditionnelles : cas du boubou Dagara que vous portez. Vous pouvez donner à vos étudiants ce cas comme thème de memoire de master en économie à étudier. En attendant je vous rappelle que le Burkina produit beaucoup de coton comme vous le savez déjà. Alors pourquoi c’est maintenant que vous portez un boubou dagara en cotonnade ? Si les Présidents THOMAS Sankara et Rock Kaboré n’avaient pas pensé à cette niche économique, vous ne serez pas actuellement habillé en tenue dagara de qualité qui génère des revenus et crée des emplois en milieu urbain comme rural. J’ai sincèrement honte de voir des intellectuels formés aux frais de nous les contribuables se mettre à débattre sur l’IUTS des fonctionnaires au lieu de mener les vrais réflexions pour faire évoluer notre économie. L’IUTS c’est la trouvaille du Gl Garango et vous qu’avez vous inventé pour l’économie de ce pays ?

  • Le 18 avril 2020 à 11:02, par welore En réponse à : Economie : La lisibilité de la relance burkinabè reste à établir, selon l’économiste Claude Weta

    merci docteur. tout le monde ne peut pas vous comprendre. et c’est ça l’économie. c’est une science et je pense que ceux qui n’en ont aucune initiation ne peuvent que verser leur obscurantisme. il s’agit là d’une démonstration et ceux qui sont contre, puisque c’est une science, peuvent apporter es contre-argument pour simplement invalider ce qui a été exposé.
    Dr vos étudiants de deuxième année sauront vous défendre.

  • Le 19 avril 2020 à 09:03, par Kone En réponse à : Economie : La lisibilité de la relance burkinabè reste à établir, selon l’économiste Claude Weta

    Très bonne analyse Dr, Si vous dites à vôtre interlocuteur que vous avez une quinzaine de mines, des terres cultivables et que vous criez que vous êtes pauvres il va vous dire que vous vous fichez de lui.Que dire de l’impôt sur le bail que le gouvernement incompétent n’arrive pas à recouvrer et se rabat sur l’IUTS. Il est temps que les burkinabé se réveillent. Ni en lara en sara

  • Le 20 avril 2020 à 10:18, par Wetta Claude En réponse à : Economie : La lisibilité de la relance burkinabè reste à établir, selon l’économiste Claude Weta

    Je vais vous envoyer le texte de mon analyse pour vous permettre et permettre aussi aux lecteurs de mieux comprendre mon point de vue. Mon projet d’article reste au stade de draft, c’est pourquoi je me suis gardé de vous l’envoyer. Maintenant que vous m’inciter à vous donner une mouture inachevée, je vous fais suivre cette version.
    Dr Wetta

  • Le 21 avril 2020 à 16:10, par cavalier rouge En réponse à : Economie : La lisibilité de la relance burkinabè reste à établir, selon l’économiste Claude Weta

    depuis le mois de février 2020 le prix du baril de pétrole a été divisé par trois sur le marché mondial (aujourd’hui il est à moins de 20$). et le malheureux consommateur burkinabè continue de payer le litre d’essence à plus de 600 F CFA. ce gouvernement là se soucis peu du bien être des burkinabè.

  • Le 26 avril 2020 à 12:46, par jean En réponse à : Economie : La lisibilité de la relance burkinabè reste à établir, selon l’économiste Claude Weta

    Bravo ! A vous . C’est dans la confrontation des idées que l’on avance. Nul ne détient la verité. La réalité : le coronavirus et là ! la crise économique aussi. Pour moi dans l’urgence, tout ce qui peut aider à relancer l’économie et à sortir de la catastrophe est le bienvenu.

    Comme on oublie vite : le terrorisme est aussi là. L’Etat doit faire face à tous ça. Maintenant et tout de suite. Les 500 000 déplacés sont là. etc.. FRANCHEMENT C’EST PAS SIMPLE POUR AUCUN PAYS .MEME LES PLUS NANTIS (France, Etats Unis etc..)
    Comparaison n’est pas raison. Nous sommes dans une situation d’un bateau qui veut couler et chacun pense à sauver sa peau !

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