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Migration : Bara Abdoulaye, le retour gagnant

Publié le mardi 5 novembre 2019 à 22h46min

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Migration : Bara Abdoulaye, le retour gagnant

Pour leur cinquième session de formation en journalisme mobile, la Deutsche Welle Akademie et le Réseau d’initiatives de journalistes se sont intéressés à la question de la migration dans les communes de Béguédo et de Niaogho, dans la région du Centre-Est. Sur le terrain, les journalistes participants, sous les auspices de Gerlind Vollmer et de Romaine Zidwemba, ont réalisé des vidéos avec leurs smartphones, des vidéos disponibles sur le site www.paxsahel.com.

Les migrations ont plusieurs facettes qui révulsent, émeuvent ou fascinent. A plus de 200 Km de la capitale burkinabè, à Béguédo et à Niaogho, partir à l’aventure est un phénomène de mode ; mieux, c’est un fait culturel. Dans le cadre d’une session de formation en journalisme mobile qui s’est tenue du 21 au 25 octobre 2019, une dizaine de journalistes sont allés à la rencontre de jeunes et femmes de la commune, qui sont soit dans l’attente de leurs fils ou époux partis depuis longtemps, soit candidats à l’émigration, soit revenus au pays. Nous avons choisi de vous parler de l’un d’eux, Abdoulaye Bara.

En quête d’une vie meilleure, Abdoulaye Bara, employé dans une boucherie de Béguédo (province du Boulgou) et avec un salaire de 15 000 F CFA par mois, décide de partir à l’aventure en 2002. Pour le soutenir, son frère aîné vend son bœuf à 150 000 F CFA. Avec cette somme, il met le cap sur le Gabon. Mais avant, il embarque dans une pirogue pour le Cameroun. Arrêté par la police, il passera quatre mois en prison. Sans nouvelles de lui et le croyant mort, son épouse restée au Burkina, le quitte.

Libre, Abdoulaye ne désespère pas et réussit à atteindre le Gabon où il exercera le métier de boucher et de restaurateur pendant cinq ans. Un jour, alors qu’il était dans sa boucherie, il est arrêté puis rapatrié au Nigeria. De là, l’aventurier revient à nouveau à Libreville, au Gabon, où il passe quatre ans. C’est toujours la même galère. Il s’installe cette fois-ci au Congo Brazzaville.

Après un séjour de six mois, Abdoulaye est fasciné par l’Angola, un eldorado pour les migrants, lui dit-on. II tente le coup mais est arrêté au cours de la traversée du fleuve Congo. Rapatrié à Brazzaville, il se résigne, rentre à Franceville au Gabon, puis regagne le Burkina Faso. C’est le retour à la case départ en 2009. Abdoulaye Bara n’a que 22 000 F CFA en poche.

Mécontents, ses proches lui reprochent d’avoir dilapidé ses ressources avec des femmes de mauvaise vie. Touché dans son orgueil, il se rend dans le village d’Essakane (Nord du Burkina) et fait ce qu’il sait faire de mieux : la boucherie. Au bout de quatre mois, il amasse une petite fortune de deux millions de francs CFA et migre dans un autre village, cette fois à l’Est du pays. Les affaires marchent.

Mais nostalgique, Abdoulaye retourne dans son Béguédo natal en 2015. C’est un nouveau départ. Il crée un petit restaurant et une boucherie et y emploie trois personnes. Il prend une femme, puis une seconde, construit une maison de trois millions de francs CFA. C’est le retour gagnant !

En septembre 2019, il diversifie ses sources de revenus et ouvre une boutique de mobile money dans laquelle il emploie sa belle-sœur. Cette dernière n’a pas revu son époux depuis sept ans, un mois après ses fiançailles. Aujourd’hui, elle a 19 ans. Le regard lointain, elle donne un ultimatum de deux ans à son époux parti pour la Guinée Equatoriale.

A l’instar d’Abdoulaye Bara, ils sont des dizaines de jeunes à ne pas être enregistrés sur les listes de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), à leur retour. Ceux qui le sont, bénéficient d’un conseil de la part des agents d’Alerte Migration qui transmettent par la suite les fiches à l’OIM qui, à son tour, élabore des plans d’affaires de projets. Selon Boukary Nonkané, répondant d’Alerte Migration à Béguédo et Niaogho, une fois le projet validé, le migrant est régulièrement suivi jusqu’à son intégration socio-économique. Pour Abdoulaye, l’OIM devrait étendre ses actions en faveur de tous les migrants de retour, y compris ceux qui ne sont pas passés par leur canal.

En attendant, Abdoulaye essaie de dissuader ses proches de partir à l’aventure. C’est avec un sourire au coin des lèvres qu’il dit avoir réussi à convaincre ses deux employés de ne pas prendre le chemin de l’Algérie. Jusqu’à quand ?

HFB
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