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Verdict du Procès du putsch de septembre 2015 : Des Ouagalais réagissent

Publié le lundi 2 septembre 2019 à 20h00min

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Verdict du Procès du putsch de septembre 2015 : Des Ouagalais réagissent

Après près de 18 mois de procédure devant le tribunal militaire, le verdict du coup d’État manqué de septembre 2015 est tombé, ce lundi 2 septembre 2019. Le Général Gilbert Diendéré a été condamné à une peine de 20 ans de prison ferme contre 10 ans pour l’ex-ministre des Affaires étrangères, le général Djibril Bassolé qui bénéficie de circonstances atténuantes. Votre journal Lefaso.net a tendu son micro à des Ouagalais pour recueillir leurs réactions. Si certains ont exprimé leur satisfaction, tel n’est pas le cas chez d’autres. Lisez plutôt !

Dr Diallo Daouda, secrétaire exécutif du CISC

« Une victoire contre la culture de l’impunité ».

« Je félicite cette victoire du peuple et de la justice burkinabè sur la culture d’impunité à laquelle on était habitué dans ce pays avec ces intouchables d’hier. Aussi, je m’interroge si cette clémence apparente du verdict serait de nature à favoriser des démarches de réconciliation entre les acteurs politiques. Mais n’oublions jamais que la justice est le vrai carburant d’une véritable réconciliation et d’une paix durable. J’espère que les réparations et indemnisations des différents torts induits par ce coup d’État seront traitées avec une grande célérité. J’espère que le verdict de Yirgou, Kain, Banh sera pour bientôt. Que Dieu apaise les cœurs des familles qui ont été endeuillées ».

Marcel Tankoano, président du M21

« En avant pour une véritable union des fils et filles du Burkina »

« En tant que Organisation de la société civile, nous prenons acte. Il ne nous appartient pas de critiquer ou de dénoncer une décision de justice. Ce qu’on peut retenir c’est que la justice a rendu son verdict et que le peuple dans son ensemble pourra faire son appréciation.

D’ores et déjà, on peut remarquer que les deux généraux et les autres militaires n’ont pas été déchus de leurs grades. Nous osons croire que dans la lancée de la réconciliation nationale, le président du Faso en tiendra compte dans le processus d’une véritable union des fils et filles du Burkina pour la paix et la réconciliation gage de tout développement ».

Pascal Zaïda, Président du Cadre d’expression démocratique

« C’est un procès politique »

« Le verdict du tribunal condamnant à des lourdes peines certains accusés dans le procès du putsch ne nous étonne guère. Et comme nous l’avons toujours répété, c’est un procès politique pour lequel il fallait s’attendre naturellement à un verdict politique. Pour nous, en effet, ce procès du putsch manqué ne devrait pas seulement se contenter de juger les prétendus présumés et leurs complices, mais de s’interroger sur les raisons qui ont conduit au coup de force contre les autorités du régime de la transition.

Lequel régime, comme vous le savez, était illégal. Et l’ancien président Jean Baptiste Ouédraogo, lors de son témoignage à la barre, nous a édifié en dénichant les preuves de l’illégalité du régime et de toutes les causes ayant poussé certaines personnes à se dresser contre la transition. Ce qui amène à dire que le coup d’Etat n’était rien d’autre que l’expression d’une défense dont ont usé certaines personnes. A ce titre, ces dernières qui sont pour la plupart partie prenante du coup d’Etat, ne devraient pas mériter une telle sentence.

Par ailleurs, si réellement nous avions voulu une justice indépendante et impartiale, on ne devrait pas réfuter certains témoins demandés par des accusés. Qu’a-t-on ainsi voulu cacher au peuple en refusant d’appeler à la barre certains témoins ? Nous avions à l’époque exigé que tous les témoins se présentent à la barre pour dire ce qui s’est réellement passé avant, pendant et après le 16 septembre 2015. Nous n’avions pas été suivis dans cette logique et dès lors, nous avions conclu que le verdict qui sera issu du procès ne sera que politique.

Et aujourd’hui l’histoire nous donne raison. En étant donc conséquent avec nous-mêmes, nous ne sommes guère étonnés du verdict étant donné que la justice militaire et le pouvoir ont délibérément refusé de se poser les bonnes questions et à appeler à la barre tous les acteurs qui ont pris part aux différentes crises qu’a connues l’ex-RSP et de la gestion du coup d’Etat de septembre 2015.

Par ailleurs, la réconciliation nationale qu’on veut tous est aussi liée à la gestion des dossiers politiques en justice dont celui du putsch. Est-ce que de telles peines sont de nature à favoriser une réconciliation nationale ? Telle est la question qu’il faut se poser, car le véritable problème au Burkina aujourd’hui est cette crise de confiance et cette justice à double vitesse qui annihile les efforts de cohésion sociale et de vivre ensemble ».

Almamy KJ, artiste musicien

« Aujourd’hui, c’est un pas qui est gagné mais beaucoup reste à faire »

« Les 20 ans de prison n’équivalent pas à toutes ces âmes tombées sous leurs balles assassines. Je parle de l’aile militaire tristement célèbre de Blaise Compaoré, le Régiment de sécurité présidentielle (RSP). Mais c’est une décision de justice. Il faut dire qu’au Burkina Faso les cœurs sont toujours meurtris. Ce n’est pas la manifestation de la vérité et de la justice que nous allons aller vers l’union sacrée tant prônée par les dirigeants.

Rien que le 31 mai dernier, on assistait aux assassinats des deux jeunes de l’ODJ, Cissé Fadou et Hama Balima, dont les corps attendent d’être autopsiés. Chose qui n’est toujours pas faite par l’Etat. A côté de cela, vous avez les exécutions sommaires sous la bannière du terrorisme. Vivement que justice soit rendue.

Egalement, je souhaite qu’il y ait la justice pour tous les autres dossiers notamment les dossiers de l’insurrection populaire, qui, faut-il le rappeler, ne fut pas un coup du hasard encore moins un produit d’une révolte spontanée. C’est autour de toute cette justice que nous allons atteindre ce qu’on appelle l’unité populaire et non l’union sacrée ».

Jean-Jack Teegawendé Bayiré

« 20 ans de prison, c’est quand même le maximum pour le Général Gilbert Diendéré »

« Nous pensons que la justice a eu le temps d’analyser les tenants et les aboutissants avant de se prononcer. S’il s’avère vraiment que le Général Gilbert Diendéré est l’auteur de tout ce qui s’est passé, moi je pense que les 20 ans de prison, c’est quand même le maximum. Parce que quoi qu’on dise ceux qui sont morts on ne peut plus les ramener à la vie.

Pour ce qui concerne Djibril Bassolé, c’est toujours des tergiversations surtout par rapport à l’authenticité des écoutes téléphoniques que les gens ont eues. Toutefois, si son nom a été cité, c’est qu’il y est quand même pour quelque chose. Désormais, on va réconcilier certains cœurs qui étaient meurtris. C’est comme ça que le pays peut aller de l’avant. »

Désiré Somé, Ingénieur de conception en vulgarisation agricole

« Le tribunal a été juste »

« Je suis satisfait de l’aboutissement du procès que je n’imaginais pas. Il y a eu la clémence du tribunal sur tous les plans. Ce sont des décisions prises avec beaucoup de sagesse. Du reste, être condamné ce n’est pas la fin du monde. Je pense que ça permettra aux accusés de tirer leçon de la vie si ils ont la chance de vivre longtemps. Nous aussi, on prie Dieu pour que toutes les parties prenantes puissent se pardonner et qu’on puisse avoir la paix au Burkina Faso et revivre normalement nos activités ; qu’on ne soit plus perturbé par un coup d’Etat ou quoi que ce soit ».

Kiélem Adama, retraité

« L’heure de la réconciliation a sonné »

« Maintenant que le verdict est tombé, on peut se réconcilier. On sait qui a fait quoi, donc on tourne la page. On ne leur en-veut pas. C’est une erreur. Mais ce qu’on leur reproche, c’est de n’avoir pas reconnu les accusations portées contre eux devant le tribunal dès le début. Pourquoi laisser un procès s’éterniser avant de reconnaitre les faits ? Que Dieu fasse que la paix règne dans le pays. Je souhaite également, qu’après ce procès, la justice fasse encore plus dans les dossiers à venir ».

Issiaka Ouédraogo, le président du Conseil d’Information et de Suivi des Actions du Gouvernement (CISAG)

"Je pense à mon humble avis que le verdict est assez sévère pour les deux généraux et aussi le capitaine Dao. Nous sommes dans un contexte où nous avons besoin de cohésion, de fraternité entre nous burkinabé au-delà de nos considérations mesquines qui contribuent beaucoup à l’effritement de la cohésion sociale et à sa fragilisation.

Les juges devraient prendre en compte les raisons qui ont entraîné le coup d’État et son contexte. Nous savons tous que la transition a été très mal gérée. Je déplore les pertes en vie humaine lors du coup d’État. Et je pense que depuis la transition à nos jours, nous perdons presque tous les jours des hommes et femmes. Si le verdict était plus clément pour ces personnes condamnées, on allait les utiliser pour la réconciliation de notre pays.

Aïssata Laure G. Sidibé
Lefaso.net

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Vos commentaires

  • Le 2 septembre 2019 à 21:18, par Blessé En réponse à : Verdict du Procès du putsch de septembre 2015 : Des Ouagalais réagissent

    "Je pense à mon humble avis que le verdict est assez sévère pour les deux généraux et aussi le capitaine Dao. Nous sommes dans un contexte où nous avons besoin de cohésion, de fraternité entre nous burkinabé au-delà de nos considérations mesquines qui contribuent beaucoup à l’effritement de la cohésion sociale et à sa fragilisation."

    Je trouve cette déclaration particulièrement méchante. Des citoyens de ce pays ont tiré sur d’autres, juste parce qu’ils avaient une opinion différente. La justice essaie de recoller les morceaux en sanctionnant ceux qui ont tué. Et il se trouve des individus pour dire que c’est lié à des considérations mesquines. Monsieur Ouedraogo, votre déclaration est un mépris extraordinaire pour les victimes de ce putch. Ce ne sont pas des bêtes sauvages qui ont ete abattues. Ce sont des humains. Monsieur Ouedraogo, cette déclaration me blesse très profondément. Vous êtes vivant actuellement mais ce ne sera pas toujours le cas. J’espère pour vous que ce ne sera pas pour une opinion qu’on vous abattra.

  • Le 3 septembre 2019 à 00:58, par MKouka En réponse à : Verdict du Procès du putsch de septembre 2015 : Des Ouagalais réagissent

    Incroyable que des gens s’attachent à des théories et semblent ignorer les faits. Comme si la vie de l’autre n’est rien. Pourquoi s’attacher à des raisons égoïstes d’un groupe de gens qui décide de passer par la force pour sauver leur intérêts , loin de ceux de la grande majorité ? Puis on parle de régime illégal dans le contexte d’alors. La Transition n’était t elle pas au moins un régime légitime et consensuel ? En quoi la question de la réconciliation nationale dépendra de ces deux individus sombres et sournois, en particulier ? Il faut que la leçon soit apprise sans complaisance et soit très dissuasive pour l’avenir. Le Burkina ne se résume pas à quelques individus encore moins à deux.

    • Le 4 septembre 2019 à 08:49, par korô lô En réponse à : Verdict du Procès du putsch de septembre 2015 : Des Ouagalais réagissent

      Vraiment je suis très deçu des propos de Monsieur OUEDRAOGO. Est-ce que tu t’es une fois posé la question et si c’était un membre de ma famille qui avait perdu la vie lors de ce putsch ? Autant la vie est sacrée , autant elle est sacrée pour les autres. Sache que avec l’injustice et l’impunité aucune réconciliation n’est possible. Même si par ce verdict, on ne pourra pas réveiller nos morts, mais au moins on pourra soulager en temps soit peu le coeur meutri des parents des victimes. Monsieur OUEDRAOGO, ressaisi toi pendant qu’il est temps. Tu semble emprunter la même trompête que ALPHA YAGO DU CDP QUI PAYE AUJOURD’HUI LES FRAIS.

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