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Tribune : Au-delà de Kua

Publié le jeudi 6 juin 2019 à 23h10min

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Tribune : Au-delà de Kua

Le projet de construction d’un hôpital, à Bobo-Dioulasso, sur un site abritant une forêt a suscité de vives polémiques opposant la vocation de l’homme à agir pour son bien et le bien que la nature lui offre en termes d’environnement et de cadre de vie. Sans prendre position dans le débat, nous y voyons une opportunité, combien heureuse pour chaque Burkinabè, de revoir sa position vis-à-vis de l’environnement.

Nous observons que, dans la quête d’espaces pour se construire un logement ou pour tirer sa pitance, le Burkinabè a, comme tous autres humains, conquis des contrées qu’il s’est attribuées et a jalousement conservées. La brousse, au sens d’un espace vierge sans maître, est ainsi devenue, progressivement, « ma terre », « mon champ », « mon domaine » et, la dévolution successorale s’imposant, transformée en « notre terre », « notre champs »…

La brousse a une âme et sa conquête n’a été possible qu’au moyen d’un pacte éternel ( ?) entre le premier occupant et cette âme. Le lien est indissoluble et seule la force peut défaire ce pacte. On se rappelle, à cet effet, des conquérants organisés en chefs, rois, seigneurs qui ont chassé, soumis ou tenté de chasser ou de soumettre leurs semblables sur des espaces, dans la vue de s’en approprier, jusqu’à la colonisation européenne, qui elle-même visait les espaces autant que ceux qui y vivaient. Quiconque venait après pour accéder à « ma » ou à « notre » terre, doit être autorisé. Autorisation provisoire, le lien entre le « propriétaire » et « sa » terre étant sacré.

Ce caractère essentiel du lien entre l’homme et sa chose va aussi induire les possibilités qui s’offrent à celui qui sera admis à l’exploiter. En effet, on permettra de couper les buissons, les arbustes et même les arbres, de détruire les herbes, mais jamais de planter quelque plante qui puisse durer plus le temps d’une vie.

La crainte étant que ce qui est planté ne convertisse le droit précaire et provisoire de celui qui l’aurait fait en un titre de même rang que celui qui l’y avait admis. On pensait aussi que la destruction ne concernant que quelques plantes, elle n’entamait pas l’essence de la nature qui, à des endroits rasée, repoussait quelques années plus tard, cicatrisant ainsi de ses plaies et se montrant intacte et pérenne.

Mais, les besoins de l’homme évoluent. Il n’aura plus besoin seulement d’espaces au dépend de l’ecosystème, il exigera de la nature son bois, ses ressources souterraines (eau, mines, etc.) pour constituer les fondements de son autonomie. Ainsi, le pacte s’est ainsi progressivement déchiré : la nature n’a plus d’âme pour l’homme, elle constitue dorénavant un bien commerçable…. Le dieu ARGENT est passé par là ! La relation entre le Burkinabè du XXIe siècle et son environnement se trouve à ce stade du processus.

Nous voyons plus nos projets que l’harmonie à y mettre pour préserver l’équilibre avec la flore et la faune. Les leaders de la Révolution d’août 1983, riches de leurs rêves mais conscients de ce nécessaire équilibre, avaient érigé une bataille de conversion des consciences désignée sous le vocable, autrefois célèbre, des trois luttes : contre les feux de brousse, contre la coupe abusive du bois et contre la divagation des animaux. Mais, ils n’avaient pas imposé que des actes de négation (« contre ») ; ils avaient su galvaniser la collectivité à planter des bosquets dans les villages, dans les écoles, dans les centres de santé (CSPS), etc. qui, encore, se dressent comme un rappel à la noblesse de leur vision.

Tous en parlent, certains abattant le centenaire tamarinier qui résiste encore sur « leurs parcelles », les autres se plaignant des coupures intempestives de l’énergie thermique fournie par la SONABEL qui interrompent le confort que leur offre une climatisation pourvue au bureau ou acquise au moyen d’économies chèrement acquises. Comment, dans cet élan de fous qui construisent une échelle vers le ciel, inviter à constater qu’il n’y aura jamais assez de bois pour le projet ?

Il ne faut pas se résigner ! On peut, non seulement sauver les ilots de brousse ou de forêts qui restent encore, mais reverdir notre pays, créer les conditions de vie plus saines pour tous. On doit résolument agir dans ce sens, en s’avisant qu’autrement, la question deviendra, dans quelques proches années, un problème de santé publique : la canicule ravagera comme les moyens alternatifs de refroidissement de notre écosystème (climatisation, humification, ventilation, etc.) apporteront leur lot de maladies mortelles ! Mais comment faire ? :

- Les pouvoirs publics pourraient intégrer davantage le reverdissement des espaces publics, des locaux administratifs, des routes et rues dans leurs politiques gouvernementales. Chaque service, dans la hiérarchie administrative, doit avoir un programme de plantation et d’entretien d’arbres sur l’espace qu’il occupe ;

- Le Législateur devraient revoir les mesures coercitives contre ceux qui détruisent, mais aussi ceux qui s’abstiennent de construire et de préserver l’environnement, en allégeant les procédures qui aboutissent à la sanction, en créant, à l’instar des pouls anti-terroristes, des pouls de préservation de l’environnement au sein des FDS (en plus du classique et salutaire service des eaux et forêts), et de la Justice, etc. ;

- Les collectivités territoriales, dans le cadre de l’organisation des lotissements, devraient, d’une part, prévoir des espaces vertes, « sacrées » que leurs services de voirie veilleraient à reboiser et à préserver et, d’autre part, conditionner l’attribution des parcelles, à quelque usage qu’elles seraient destinées, à la plantation d’arbres dont le nombre minimal serait au prorata de la superficie accordée. Les taxes de jouissances pourraient être réduites proportionnellement en forme de subvention à ces « efforts demandés ». L’obtention du PUH et/ou du titre foncier ne devrait pas être possible pour ceux/celles qui n’auraient pas respecté cela ;

- Les élèves devraient être émulés à planter et à préserver l’environnement dans leurs écoles à travers l’enseignement ; etc.
La liste est longue et quiconque épouse l’idée pourrait, s’il était inspiré, la continuer.

Un citoyen

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Vos commentaires

  • Le 6 juin 2019 à 23:48, par Zach En réponse à : Tribune : Au-delà de Kua

    Cet article est pertinent, et merci a l’auteur de nous rappeler qu’au Faso, il n’y a pas de politique nouvelle a "inventer" (perte de temps) en matiere de protection de l’environnement (LA VRAIE PROTECTION DE L’ENVIRONNEMNT). Il nous suffit seulement de regarder dans notre passe que nous avons la solution qui a demontrer ses preuves.

    Aidez-moi... Avons-nous vraiment un ministere de l’envvironnement au Faso ? Ou est-il ?

  • Le 7 juin 2019 à 02:15, par Zach En réponse à : Tribune : Au-delà de Kua

    Et si on appliquait la politique de Tomk Sam meme a 80% ? J’ai un peu honte de tous ceux qui marchent pour/contre Kua. Je suis ne a Ouezzin-ville - Kua il y a une decennie Au lieu de PROTESTER tout le temps et avec mains vides, plantez des milliers d’arbres pendant que nous y sommes car on en a vachement besoin au Faso.

    • Le 7 juin 2019 à 22:14, par yepi En réponse à : Tribune : Au-delà de Kua

      Très bonne idée, allons planter des abres sur les 16 hectares.

  • Le 7 juin 2019 à 02:18, par Zach En réponse à : Tribune : Au-delà de Kua

    ERRATUM : Pas ne entre Ouezzin-ville - Kua il y une decennie comme je l’ai ecrit plus haut, mais QUATRE decennies.

  • Le 7 juin 2019 à 07:15, par Le Vigilent En réponse à : Tribune : Au-delà de Kua

    Merci à l’auteur de cet article pour cette interpellation qui s’adresse à tous les burkinabés à quelques niveaux où ils se situent. La responsabilité est collective ! Les dégâts peuvent encore être réparés à condition si tous nous décidons ici et maintenant de changer de comportements vis à vis de notre environnement, de la nature.
    messieurs les ministres de l’environnement, du cadre de vie et de l’habitat : ou en êtes-vous avec la récupération des espaces verts urbains créés par le colon, l’es gouvernants précédents lors des lotissements et la construction des cités ? Cessez de nous embrouillez avec vos déclarations foireuses à répétitions et jamais suivies d’effet. Je constate que pour le ministre de l’habitat le mot incessamment signifié « le siècle prochain » et pourquoi pas « jamais « . Quelle misère morale !?

  • Le 7 juin 2019 à 07:50, par pierre En réponse à : Tribune : Au-delà de Kua

    Si on avait continuer les 3 luttes de Thomas Sankara, nous ne serions pas devant un désastre écologique avec désertification et dégradation avancée des terres en centaine de milliers d’hectares par an. Nous serions au même niveau d’émergence que le Rwanda qui a su se relevé d’un génocide il y a tout juste 25 ans, soit une génération ! La faute est à la fois collective et individuelle. Collective pour l’état, les communes, etc. Et, individuelle : combien ont plantés des arbres dans leurs cours et devant sa maison au bord de la rue ? Que dire de la divagation des animaux en pleine ville ? comme d’habitude, il y a 3 chevaux qui se pavanent et broutent les quelques fleurs chétives sur l’avenue Krumah. Où sont les autorités municipales pour les mettre en fourrière ? et faire une très forte amende au propriétaire et obligation à ce dernier de replanter les arbres à ces frais détruits par ces chevaux !

  • Le 7 juin 2019 à 08:33, par TAGROU En réponse à : Tribune : Au-delà de Kua

    Dans un car de transport qui me ramenait de Bobo pas plus tard qu’ hier, deux jeunes commentaient le sujet relatif à la foret de Kua.
    " Tchièè !!! Et si des gens s’amusaient à dire qu’on a découvert de l’or dans la foret de Kua !", plaisanta l’un.
    L’autre, tout hilare, de répondre : " Quelque soit ce que les différentes autorités vont faire ou dire pour la protéger, je te donne deux semaines pour que toute la foret disparaisse".
    Et tous les deux d’éclater de rires, pensant certainement à tous ces "pour" et "contre" qui ne cessent d’animer la galerie.

    • Le 7 juin 2019 à 18:24, par yelmingaan blaan saa hien En réponse à : Tribune : Au-delà de Kua

      ainsi les jeunes naïfs hilares de ta fiction pensent que nos autorités en cas de nécessité sont incapables même avec l armée d empêcher une exploitation anarchique par des cupides d une hypothétique mine d or a KUA ?hum !quelques tirs de sommations....!sont ils au courant des multiples mines d or dont l exploitation est sous contrôle de l état ou auraient ils forcé sur la bouteille ??

  • Le 7 juin 2019 à 08:54, par Ibrahim En réponse à : Tribune : Au-delà de Kua

    Rien a dire. Simplement édifiant. Malheureusement certaines personnes n’ont d’oreille que pour leurs intérêts égoïstes.

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