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Salogo (Zorgho) : Un exemple de développement endogène porté par les villageois

Publié le mardi 2 avril 2019 à 18h50min

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Salogo (Zorgho) : Un exemple de développement endogène porté par les villageois

Un barrage, véritable poumon économique de Tampaliougo, un secteur de la commune rurale de Salogo, dans la province du Ganzourgou. Le maraîchage, la culture, la transformation et la vente du moringa occupent une population laborieuse. Réunis au sein de la coopérative Malgzindo, ces artisans du développement local font preuve de dynamisme, de créativité, de bravoure et de solidarité pour bouter la pauvreté hors du village. Un exemple de bataille pour un développement endogène.

A première vue, Tampaliougo est un village ordinaire comme on en voit un peu partout au Burkina Faso. Un habitat entre tradition et modernité où se mêlent cases en toit de paille et maisons en briques couvertes de tôles. Tampaliougo est situé à quelque sept kilomètres du centre de la commune de Salogo. La bourgade a un point de ralliement pour la plupart de ses habitants : le barrage. Poumon par lequel le village respire, vit, et surtout centre de convergence des « Tampaliougois », comme un centre des affaires dans les grandes villes.

C’est là que Ramata Kiemtoré, veuve et mère de deux enfants, gagne sa vie dans la culture du moringa. Une activité qu’elle mène quotidiennement, depuis son intégration à la coopérative Malgzindo (rendre consistante la sauce, littéralement traduit du mooré). Elle qui était, au départ, vendeuse de pois de terre au marché du village, est aujourd’hui productrice de moringa. Une opportunité qui lui permet de subvenir à ses besoins et à ceux de ses enfants. « Avant, je vendais de pois de terre au marché et lorsque j’ai intégré la coopérative Malgzindo avec la culture du moringa, j’ai vu que c’était un bon travail. Et cela a beaucoup changé ma vie ; avec ce que je fais maintenant, j’arrive à payer mon savon, mes condiments et nourrir mes deux enfants et je prie Dieu que cela s’améliore encore plus », nous a-t-elle confié.

Ramata Kiemtore, membre de la coopérative

Sur les lieux de son gagne-pain, Ramata Kiemtoré et tous les autres membres de la coopérative s’attèlent à accomplir leurs tâches quotidiennes. Comme dans une fourmilière, chaque membre de la coopérative va à l’abordage. Malgré un niveau d’eau en baisse considérable dans le barrage et du matériel de travail en mauvais état, l’on se dépêche pour arroser les plantes avant le lever du soleil ou encore pour transformer certains produits en attendant l’arrivée des premiers clients dans la boutique de la coopérative. D’autres, ayant déjà apporté du compost aux pieds des jeunes plants, se reposent sous les arbres portant encore leur feuillage.

Dans cet environnement studieux, un contraste à quelques pas de là. Une garderie, construite en paille, accueille les tout-petits afin de permettre aux mamans de travailler dans la sérénité. Une femme du troisième âge joue les garde-bébés. Avec un instrument de musique, elle tente d’égayer les mômes dont les cris parviennent souvent aux génitrices. C’est l’atmosphère qui régnait dans la matinée de ce mercredi 27 mars 2019.

Le lit du barrage est comme un résumé de la vie de ce village, où l’on se lève tôt pour ne se coucher que tard dans la nuit.

« C’est toujours animé par ici, même s’il n’y a rien à faire comme travail, il y a toujours des membres présents sur les sites pour vérifier s’il n’y a pas d’animaux aux alentours des clôtures ou pour voir si tout va bien », conte le président de la coopérative Malgzindo et également chef de ce village, Saidou Kaboré.

Dans cette localité de Salogo, on est bien loin des clichés habituels où femmes et hommes travaillent séparément. Ici à Tampaliougo, au sein de la coopérative Malgzindo, l’on travaille ensemble. Les deux sexes se côtoient mutuellement, se taquinent dans une atmosphère détendue. A vue d’œil, l’on penserait aux membres d’une même famille. Pour le premier responsable de la coopérative, la lutte pour le développement du village doit intégrer hommes et femmes dans une synergie d’actions.

Du groupement villageois à la coopérative

Malgzindo est cette coopérative qui était au départ un groupement villageois. Un groupement créé par le chef de Tampaliougo pour mener des activités maraîchères autour du barrage afin d’améliorer les conditions de vie des ménages. La coopérative est dirigée par un bureau de six membres avec, à sa tête, Saidou Kaboré comme président, élu pour un mandat de trois ans renouvelable une fois. Pour le fonctionnement de la coopérative, les membres se rencontrent mensuellement ou trimestriellement et ont une assemblée générale annuelle pour faire le bilan de toutes les activités. Aussi, c’est l’occasion de relever les forces et déceler les faiblesses afin d’administrer des solutions en vue de la bonne marche de la structure.

Garderie d’enfants

Pour le bon fonctionnement de la coopérative, chaque membre doit s’acquitter d’une cotisation annuelle de 1 000 FCFA, être présent obligatoirement à chaque rendez-vous de travail ou de réunion. Le non-respect des règlements sans justifications valables peut conduire à une exclusion totale de la coopérative en fonction de la gravité de la faute, a expliqué Saidou Kaboré. Les différentes activités sont subdivisées en fonction du nombre d’adhérents et des besoins. « Dans les sites, dit-il, il y a ceux-là qui produisent sur la plaine maraîchère des légumes comme l’oignon, le concombre, la tomate, la carotte, etc. ; il y a aussi ceux qui produisent du compost enrichi pour fertiliser les périmètres cultivables et pour également vendre et enfin, il y a ceux qui produisent le moringa, qui le transforment et qui le vendent ».

Composée de 138 membres dont 78 femmes et 60 hommes, la coopérative, en plus de la culture maraîchère, s’est également engagée dans la culture du moringa, sa transformation et sa vente.

Surnommé « l’arbre miracle » pour ses vertus nutritives et thérapeutiques, le moringa est transformé en plusieurs produits de consommation sur place. De ces produits transformés, on obtient du jus de moringa mélangé au gingembre et des feuilles séchées, utilisés comme des tisanes et du thé. A cela s’ajoutent, la farine enrichie de feuilles de moringa et de sa poudre, utilisée pour les enfants malnutris ou pour les personnes souffrantes, etc. Des produits qui, selon le premier responsable, sont beaucoup appréciés par les populations de la province du Ganzourgou et de celles des autres provinces. « Nos produits ne suffisent pas, par ici, les gens viennent de partout pour les acheter à cause du moringa », a-t-il lâché avec un grand sourire aux lèvres.

Cela a été rendu possible grâce à un partenariat avec l’association Beog-Neeré et le soutien financier de deux ONG. Ces apports ont permis à la coopérative d’acquérir un magasin de stockage d’oignons, un centre de transformation et aussi des formations dans les différents domaines d’activités. Des investissements qui, selon Saidou Kaboré, ont permis à la coopérative de générer des ressources pour son fonctionnement.

Et après presqu’une année d’activités menées sur le terrain, dit-il, les différentes ressources générées par la coopérative s’élèvent à 350.000 FCFA, une somme qui représente le budget enregistré. Tout en précisant que c’est une somme qui sera divisée, le jour de leur AG, par le nombre des membres de façon équitable, après la déduction des dépenses des différents travaux effectués.

De la pauvreté à une condition de vie améliorée

Malgré sa jeunesse, la coopérative a permis d’améliorer les conditions de vie de ses membres. Et selon le président, à travers les activités de la coopérative, les femmes en particulier sont des actrices du bien-être de leurs familles et c’est tout le monde qui gagne.

Et Boukary Kaboré, membre de la coopérative, de témoigner lui aussi du changement que les activités de la coopérative ont apportés dans sa vie. « Avant, j’étais dans le maraîchage qui n’était pas trop bénéfique ; mais avec le compost que nous fabriquons pour la coopérative et la vente, je me fais de l’argent. Parce que c’est la seule coopérative dans le Ganzourgou spécialisée dans ce domaine. Pour un sac de compost vendu, j’ai une somme de 5 000 F CFA et les commandes viennent de partout ».

Saidou Kaboré, président de la coopérative Malgzindo

Pour Boureima Ilboudo, conseiller villageois de développement (CVD) de Salogo, la mise en place de cette coopérative dans le village a beaucoup bénéficié à la commune. « Avec la culture maraîchère et du moringa, la transformation, la vente et le magasin de stockage, notre village a changé de visage. Car dans la zone de Salogo, il n’y a pas beaucoup d’activités à faire ; les populations vivaient essentiellement de l’agriculture et de l’élevage et avec les aléas climatiques, les choses sont de plus en plus compliquées pour elles ». Mais depuis le renforcement des activités de la coopérative, les populations ont trouvé des activités génératrices de revenus à mener.

Outre les emplois créés et les revenus engrangés, les légumes et le moringa produits et transformés sur place permettent d’améliorer considérablement l’alimentation de la population locale. Le tout contribue au développement local de notre commune, a conclu le CVD. Une commune sans cesse croissante dont le nombre d’habitants était estimé à 21 083 habitants dont 9 458 hommes et 11 625 femmes, selon les chiffres du dernier recensement de 2006.

Toutefois, tout n’est pas rose dans le ciel de Tampaliougo. La coopérative Malgzindo connaît des difficultés. Le cri du cœur de son président à l’endroit des autorités, c’est le curage du barrage qui commence à s’ensabler. Si cette retenue d’eau disparaissait, ce serait la porte ouverte à toutes les misères pour les villageois. Saidou Kaboré plaide également pour l’acquisition de matériels plus modernes en vue de faciliter les conditions de travail.

En attendant, la vie s’anime chaque jour autour du barrage. Hommes et femmes travaillent main dans la main, souvent sous un ardent soleil et un vent qui souffle fort, pour leur mieux-être. Lire la suite

Yvette Zongo
Lefaso.net

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Vos commentaires

  • Le 3 avril 2019 à 08:05, par HUG En réponse à : Salogo (Zorgho) : Un exemple de développement endogène porté par les villageois

    Bonne chance à vous. Oui, seul ce type de développement peut nous faire sortir de la misère : le développement autocentré, est une source sûre de réussite dans nos pays car il faut impliquer les concernés dans leur processus de développement.. Que DIEU accompagne les initiateurs à ce que cela perdure

  • Le 3 avril 2019 à 08:27, par RESANE En réponse à : Salogo (Zorgho) : Un exemple de développement endogène porté par les villageois

    Tout simplement parce qu’il y a une retenue d’eau. Combien de temps les décideurs mettront-ils à se convaincre que l’eau est un facteur de développement pour l’économie rurale ? Le ciel en donne assez pendant la saison de pluies, mais faute de point de rétention, nos populations rurales connaissent une sécheresse handicapante pour toute initiative.
    Trop d’ateliers, séminaires, colloques, symposiums, salons, conférences... sur le développement rural et très peu d’actions concrètes. Les coûts d’organisation de ces rencontres de débauches et de débauchés suffiraient à doter annuellement des villages de points d’eau à même de soutenir des productions de contre-saison.
    Mais qui voudrait perdre des frais de missions et autres rétributions de comités d’organisations ?

  • Le 3 avril 2019 à 18:09, par Kabore B. Roger En réponse à : Salogo (Zorgho) : Un exemple de développement endogène porté par les villageois

    Il est interressant de noter la production et la transformation du moringa. Les villages qui ont la chance d’avoir une retenue d’eau peuvent s’inspirer de l’experience en mettant en place une parcelle de production de moringa dont le marche est actuellement florissant. Le Niger est un bel exemple de valorisation du moringa.

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