LeFaso.net, l'actualité Burkinabé sur le net
Proverbe du Jour : “Soyez un repère de qualité. Certaines personnes ne sont pas habituées à un environnement où on s’attend à l’excellence.” Steve jobs

Prometra-Burkina : Les dessous de la crise

Publié le jeudi 4 août 2005 à 07h55min

PARTAGER :                          

Il a fallu donc cette conférence de presse du 16 juillet 2005 pour que nous sachions que le torchon brûle à Prometra. Mais à écouter les uns et les autres, ce torchon a été allumé pour protéger des intérêts. A l’évidence, la crise à Prometra sent une forte odeur de sous. La vigilance du ministère de la Santé et celui de l’Administration du territoire doit être de mise pour éviter toute dérive.

Comme nous vous le disions dans notre précédente édition, il y a crise dans l’ONG-Prometra Burkina. Cette crise est consécutive au décès de son premier président, Kamanga Théophile OUEDRAOGO, et très certainement à la forte odeur de financement que doit bénéficier cette ONG. Mais comment est-on arrivé à cette situation de deux bureaux, l’un provisoire et l’autre légal. Il faut pour cela, remonter au temps du défunt Kamanga Théophile OUEDRAOGO (KTO) pour rappeler la création de l’ONG. Comme toute structure associative, Prometra-Burkina a ses membres fondateurs.

Faisaient partie de ces membres, M. Philippe BEOGO l’actuel président statutaire de Prometra-Burkina et bien d’autres comme M. Moussa Joseph KAFANDO, qui ont posé avec KTO les bases de Prometra Burkina Faso en 2001. Comme tous les acteurs le reconnaissent aujourd’hui KTO était un « grand bosseur », mais avait un très grand défaut, il travaillait seul.

A telle enseigne qu’il a éclipsé tous les autres membres fondateurs qui étaient également des membres du bureau. Ainsi donc, tant que KTO était là, la structure fonctionnait bon an mal an. L’homme n’étant pas éternel sur terre, la mort eu raison de KTO en avril 2004. Après les obsèques et le deuil, de ce dernier, les autres membres du bureau devaient assurer la continuité de la structure.

C’est ainsi que sous l’instigation et la bénédiction du président de Prométra internationale, le Dr Eric GBODOSSOU et en présence des premiers responsables de la DGPML (Direction générale de la Pharmacie du médicament et des laboratoires) dirigée par le Dr Mahamoudou COMPAORE, il a été demandé à M. Philippe BEOGO, secrétaire général sous KTO, de travailler à entretenir la flamme laissée par le défunt. C’est ainsi donc que celui-ci, afin de répondre aux normes imposées par les textes et prenant en compte toutes les sensibilités lança alors une concertation pour la mise en place du bureau.

Le coup de force

Après l’installation du bureau présidé par M. BEOGO qui a été « légalisé » par un récépissé n°2004-464/MATD/SG/DGLPAP/DOASOC dont l’objet est : Déclaration de modification dans les textes constitutifs et celui du changement de la composition de l’organe dirigeant, les frictions commencèrent. On est d’ailleurs mémoratif de certaines déclarations parues dans la presse courant 2004 et qui demandaient au ministère de la Santé des mesures pour que des médecins ne s’emparent pas de l’ONG.

Mais ni la pression ni les menaces n’ont eu raison du bureau légal. En effet, selon M. Philippe BEOGO qui s’expliquait lors de la conférence de presse du 16 juillet 2005, il a fait l’objet de menace de la part du Directeur général, le Dr Mahamoudou COMPAORE en présence du Directeur général de la Médecine traditionnelle, le Dr Jean-Baptiste NIKIEMA.

En substance, on a fait comprendre au président BEOGO que s’il n’était pas coopératif, on pourrait le « sauter » de la présidence de Prometra-Burkina pour mettre des hommes qui feront l’affaire. On a donc prétexté une léthargie du bureau de celui-ci pour faire aboutir leur dessein. C’est ainsi qu’une lettre venue de Dakar par les bons soins d’un médecin dont nous tairons le nom a fait du docteur Sia DABOGO le président du bureau provisoire de Prometra-Burkina et le docteur Eloi SOME comme secrétaire général.

Mais peut-on parler de léthargie d’un bureau quand le DGPML lui-même dans un courrier demande la contribution de Prometra-Burkina dirigé par M. BEOGO à hauteur de 2 156 200F CFA pour l’organisation de la Journée Africaine de la médecine traditionnelle au Burkina Faso ? Peut-on parler de léthargie quand le Directeur de la médecine traditionnelle le Dr NIKIEMA demande dans un courrier officiel la poursuite de la collaboration entre sa direction et Prometra-Burkina ?

Enfin, peut-on parler de léthargie quand les différents rapports financiers moraux et d’activités ont été traités par le bureau et déposés chez qui de droit ? En fait, les signes d’une volonté d’écarter le bureau dirigé par M. BEOGO des activités du ministère étaient manifestes. Dans une lettre adressée au ministre de la Santé en personne, le bureau s’inquiétait (le 10 août 2004) de la tournure que prennent les événements et la collaboration qu’il a avec les responsables de la DGPML.

Il a d’ailleurs fallu cette lettre et la prompte réaction du ministre Alain YODA pour que Prometra-Burkina participe à la Journée africaine de la Médecine traditionnelle. Pour le Responsable de la structure, « Tout avait été mis en œuvre pour écarter Prometra-Burkina parce que tout simplement c’est nous qui dirigeons la structure ». « A voir de près dira M. BEOGO, la DGPML a réussi puisque ses menaces ont porté fruit, aujourd’hui il y a un nouveau bureau même s’il est provisoire ».

Mais une simple lettre, même venue de la structure mère peut-elle destituer un bureau légalement reconnu par l’administration ? Le bureau provisoire n’est-il pas illégal vis-à-vis de la loi ? Le docteur DABOGO peut-il selon les textes parler au nom de Prometra-Burkina ? Autant de questions que l’on est en droit de se poser surtout que ce bureau aura des actes légaux à poser dans la mesure où l’on parle d’un financement PNUD qu’on doit justifier.

Que dit la DGPML

Nous avons contacté la DGPML pour en savoir davantage sur ce quiproquo. Elle dit ne pas être au courant d’une quelconque crise à Prometra.

Mieux, elle ne s’ingère pas dans la vie des associations. Cela a été soutenu également lors de la conférence de presse du 16 juillet 2005 par le Dr NIKIEMA qui, devant la polémique engagée dira ceci : « Je croyais que vous avez réglé votre crise (s’adressant à M. BEOGO et aux membres du bureau provisoire du Dr SIA) si j’avais su que c’était comme ça, je n’allais pas participer à cette conférence de presse encore moins donner la salle de conférences de la DGPML pour la tenir ».

Puis, visiblement embarrassé il continua : « Dites à GBODOSSOU (le président de Prometra internationale) de ne plus nous écrire pour nous demander quoi que ce soit encore moins nous appeler pour des informations ». Nous avons également joint le Dr COMPAORE DGPML en personne pour en savoir plus sur les accusations de menaces qu’il aurait eues à l’endroit de M. BEOGO.

Voilà sa réponse. « Ce que j’assume comme responsabilité me suffit largement. Et puis, (s’adressant à nous) faites attention à ce Monsieur (Parlant de M. BEOGO) c’est un ingrat, s’il est ce qu’il est aujourd’hui, c’est grâce à moi. C’est moi qui l’ai tiré de là où il était ». Puis gentiment, il nous renvoie au Dr NIKIEMA pour prendre rendez-vous, ce que nous avons fait et sans suite, nous attendons toujours.

Pourtant selon nos informations le ministre Alain YODA a donné des instructions fermes qui ont conduit le Secrétaire général le Pr OUANGO à signer un mémorandum qui met en garde tout médecin qui s’ingérerait dans la vie et les activités des associations. Cela semble être rentré dans l’oreille de sourd. La crise au sein de Prometra-Burkina est en elle-même une défiance à la décision de la hiérarchie du ministère de la Santé.

Vigilance

Les crises de succession de cette nature ont toujours été recensées au niveau du MATD et dans le milieu politique. Mais avec ce qui se passe à Prometra-Burkina, ce n’est plus le MATD seul qui aura des questions du genre à traiter. Même si dans le cas d’espèce il devra encore se prononcer. Mais que voulez-vous là où l’odeur de l’argent se fait sentir, surtout celle de la Banque mondiale et du PNUD, etc. cela aiguise les appétits.

En effet, selon les textes de l’OMS, la décennie 2001-2010 a été consacrée, décennie de la médecine traditionnelle. A ce titre de très forts investissements de la Banque mondiale et de l’OMS devraient s’ils ne le sont déjà intervenir dans Prometra-Burkina Faso. Un projet a déjà été finalisé dans ce sens par feu KTO. Ce qui explique donc cela. Si cette thèse soutenue par M. BEOGO s’avérait juste, le ministre Alain YODA devrait monté au créneau et suivre personnellement cette affaire de près. Car si l’on s’en tient au scénario actuel d’un bureau provisoire rien n’indique que ces financements arriveront à bon port.

Certes, le Bureau provisoire dirigé par le Dr DABOGO dit vouloir conduire les activités de Prometra-Burkina jusqu’à la mise en place d’un bureau définitif d’ici la fin du mois d’août pour dit-on répondre à des impératifs d’un bailleur de fonds notamment le PNUD. Qu’est-ce que cela cache-t-il ?
Si un bureau légal ne peut pas donner de tels rapports, de quelle légitimité dispose le Dr SIA pour travailler au nom de Prometra ? Ne veut-on pas au contraire effacer des traces qu’aurait mis à jour le bureau légal ? Ce bureau provisoire détient-il son mandat pour parler au nom des tradipratitiens ?

La vigilance du ministère de la Santé et celui de l’Administration territoriale et de la Décentralisation doit être de mise pour rétablir la légalité et l’ordre à Prometra-Burkina.o


Comportement indigne d’un responsable

Non content de chercher à orienter le traitement sinon même de l’avoir fait, (puisqu’aucun confrère de la place n’a abordé dans son « papier » ni fait mention de la crise encore moins de la polémique qui s’est passée lors de la conférence de presse) un responsable d’un organe de presse public et président d’un réseau de journaliste a tenu des propos indignes de son rang lors de la conférence de presse de Prometra-Burkina. « Hé les gars (s’adressant aux journalistes) restez un peu, il y a des documents pour vous. De toutes façons, vous ne faites pas cas de ce qui s’est passé ici ce matin (NDLR le 16 juillet 2005). Ce n’est pas l’objet de la conférence de presse.

L’objet de la conférence de presse est de parler de la relance des activités de Prometra ». De documentation, il n’en était rien puisque M. le Directeur dira : « Il est prévu quelque chose pour les journalistes (entendez par là 5000F CFA). Que tous ceux qui n’ont pas été invités sortent parce qu’ils ne sont pas concernés ». Bien évidemment nous n’avions pas été invités, mais le sujet nous intéressait et ce depuis 2001 que nous nous intéressons à Prometra-Burkina. Seulement, ce que Monsieur le Directeur a oublié, ce n’était pas à cause de 5000F CFA que les journalistes sont venus couvrir l’événement.

Nous, en ce qui nous concerne en tout cas 5000F CFA ou pas, nous allons parler de cette crise qui secoue cette ONG afin que le ministère de la Santé trouve des solutions qui n’anéantiraient pas toutes ces années de travail accompli. Ce qui s’est passé le 16 juillet 2005 n’est pas digne d’un individu qui incarne de telles responsabilités. Encore moins qui a la charge d’un organe d’Etat de cette importance. Monsieur le Directeur gagnerait à se ressaisir.

Par Frédéric ILBOUDO
L’Opinion

PARTAGER :                              
 LeFaso TV
 Articles de la même rubrique
Burkina Faso : L’ONG IRC lance deux nouveaux projets