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Corruption en politique : Pourquoi chercher des poux sur la tête d’un chauve

Publié le vendredi 29 juillet 2005 à 09h04min

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Recevoir 30 millions de FCFA la nuit, loin des grandes oreilles indiscrètes de Ouaga. Percevoir 30 millions de FCFA par un intermédiaire du Président du Faso, n’en informer ni son bureau politique, ni ses militants.

Les interrogations à charge peuvent s’accumuler, les faisceaux de présomption se multiplier, l’homme politique Laurent Bado reste constant : ce n’est ni de près ni de loin de la corruption ! Ce " don " du pouvoir, c’est parce qu’il est le seul opposant crédible aux yeux de Blaise Compaoré.

Le professeur de droit constitutionnel, Laurent Bado, prend le relais : "[...] S’il n’y a que deux personnes incorruptibles au Burkina, j’en suis ; s’il n’y a qu’une personne, je le suis", Si le Professeur de droit le dit, alors pourquoi penser le contraire ? Alors Citoyens circulez, il n’y a rien à voir !

Misère de politique ! Avoir de grandes idées et de grands projets ne suffisent pas pour être élu ou réélu, détenir le pouvoir et le conserver. L’efficacité a un coût croissant. Il faut des moyens financiers. Comment introduire des idées nouvelles, renouveler le personnel politique sans autonomie financière ?

Réponse trouvée auprès des adeptes de la courte échelle : faire partie de la Cour du Roi. Accepter de nuit, une offre de financement du président du Faso, pour constituer une opposition forte, c’est décider, in fine, de faire partie de la cour du Roi. Homme politique pauvre, Laurent Bado est devenu un pauvre politique dont la crédibilité est en lambeaux !

On le savait, on en a la confirmation expresse : le pouvoir perturbe les meilleurs esprits. Seuls des êtres d’exception peuvent résister à la tentation de l’argent. Pour les autres, ils succombent à coup sûr, victimes de l’ivresse du pouvoir, des flatteurs qui les entourent et qui les pressent, en spéculant sur les facilités que leur donne la "raison d’Etat, la raison de parti, l’intérêt général". Victimes enfin de compte de ne pas se connaître soi-même.
L’argent justifie, pour l’heure, tous les comportements des hommes politiques. Sans être regardants sur sa provenance. La thèse du politicien vertueux ne résiste donc pas. Les hommes politiques n’en restent pas moins des hommes.

Faillibles ! Nos politiques recherchent leurs intérêts personnels qu’ils n’hésitent pas à draper d’une lourde couche de vernis idéologique. Laurent Bado n’est ni le premier ni le dernier. L’émissaire du Chef de l’État le reconnaît : "Tous les opposants que vous connaissez ont été financièrement soutenus par nous dans ce sens, mais non contents d’utiliser cette aide à des fins personnelles, ils sont les premiers à nous insulter, à dire que le régime est corrompu alors qu’ils sont aussi, sinon plus corrompus que nous...".

L’argent public n’est-il pas nécessaire au fonctionnement de la démocratie ? Dans les démocraties occidentales, seuls les partis officiellement reconnus bénéficient de subventions. Le financement des candidats rend le vote responsable : le citoyen engage son argent autant que son bulletin de vote.

L’affaire Laurent Bado pose en des termes très crus le financement des partis politiques. Car la démocratie ne saurait se résumer en l’organisation réussie des joutes électorales mettant aux prises des Mammouths et des moutons. Le progrès de la démocratie, au Faso serait que des citoyens attirés par un projet ou un homme politique n’hésitent pas à mettre la main à la poche. Et que les bénéficiaires n’hésitent pas non plus à publier le montant et les activités y afférent. L’honnêteté y trouvera son compte. Et les intellectuels qui veulent s’aventurer en politique préserveront ainsi leur intégrité.

Avant la politique, Laurent Bado était pour tous ce que doit être un intellectuel émergé de l’intelligentsia burkinabè. Par des écrits, des interviews et des conférences techniques, inlassablement, le citoyen Laurent Bado cherchait "à éveiller la conscience de [ses] concitoyens". Il démontrait, montrait, pourfendait, bataillait le verbe haut et le propos convaincant.

Il n’hésitait pas à secouer brutalement le consensus ambiant quitte à se mettre à dos une partie de l’intelligentsia. Qu’importe, puisque le peuple aimait, trouvait enfin son porte-parole. Il était le lampion. Celui qui éclaire le chemin du peuple, mais également celui des étudiants. Il vivait comme le peuple. Il était comme eux. Il était eux ! Aujourd’hui, le politique Bado a complètement dilapidé le crédit du citoyen Laurent.

Au Burkina, l’argent est toujours moralement suspect. Et le Professeur de droit constitutionnel Laurent Bado le sait. Mieux que quiconque. N’ayant pas perdu ses facultés d’anticipation et de discernement, il avertit son "petit frère", Émile Paré : "Tu vois, les Burkinabè sont méchants et dès qu’on parle d’argent, ils ne réfléchissent plus. Recevoir de l’aide pour réussir notre ambition, ce sera manger chez Blaise quand ils l’apprendront.

Et ils l’apprendront un jour car, comme c’est écrit, ce qui est voilé sera un jour dévoilé et ce qui est secret sera un jour publié. N’oublie pas que des militaires nous ont vus entrer chez Blaise la nuit ! C’est pourquoi, je prends seul la responsabilité de cette affaire pour que, même si les gens venaient à nous juger sans aucun discernement ni bon sens, toi au moins tu sois épargné".

Somme toute, Laurent Bado, "droit comme un teck de Pabré", a été sous-estimé. Il brille autant dans la lumière que dans l’ombre. Propulsé par la force des choses, leader, il se verrait en Christ se sacrifiant pour que sa parole lui survive.

La vérité étant toute relative, pourquoi le professeur de droit n’aura-t-il pas sa raison ; raison tout simplement ! Après tout, s’il déclare que cette affaire n’est nullement de la corruption, il n’y a donc pas de mauvaises pensées à avoir. Pourquoi les analphabètes en droit remettraient-ils en cause sa parole ? Allez donc savoir ce qui pousse nombre de Burkinabè à chercher des poux sur la tête d’un chauve !

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