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Projet « Target Malaria » : Une véritable catastrophe pour la santé et l’environnement, selon la Coalition pour la protection du patrimoine génétique africain

Publié le lundi 8 octobre 2018 à 23h30min

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Projet « Target Malaria » : Une véritable catastrophe pour la santé et l’environnement, selon la Coalition pour la protection du patrimoine génétique africain

Venues de neuf pays de l’Afrique de l’Ouest, des représentants d’organisations locales étaient réunies du 2 au 4 octobre 2018 à Ouagadougou dans le cadre du 13ème Forum régional annuel. Ils ont réfléchi autour du thème : « Accaparement des terres, nouvelles générations d’organismes génétiquement modifiés (OGM) et biopiraterie : quelles menaces sur l’agriculture familiale et l’agro-écologie paysanne et quelles solutions durables ? ». La cérémonie de clôture est intervenue jeudi 4 octobre 2018 via une conférence de presse au cours de laquelle, les responsables ont décliné les grandes lignes des travaux et réitéré leur appel à mettre fin au projet « Target Malaria » (http://lefaso.net/spip.php?article83429).

L’échange avec la presse a été conduit par le secrétaire exécutif, Jean-Paul Sikéli, entouré d’Ali Tapsoba (COPAGEN Burkina) et Pauline Zei (point focal COPAGEN régional). Selon ces conférenciers, les communications, témoignages et échanges ont permis de relever que malgré les dénonciations constantes sur l’accaparement des terres, par les mobilisations citoyennes et les mouvements de contestation dans le monde, ce fléau entretenu en grande partie par les investisseurs privés, avec la complicité des décideurs, gagne du terrain dans les pays. Pourtant, les conséquences de cet accaparement des terres sont désastreuses pour les communautés africaines qui vivent de l’agriculture familiale, soulignent-ils.

Il ressort également des travaux qu’en dépit des performances des OGM dans l’agriculture et l’alimentation africaines, mises en évidence par l’échec retentissant du coton Bt (OGM, ndlr) au Burkina, la situation reste préoccupante. « En effet, non seulement la liste des pays africains gagnés par la fièvre des OGM ne fait que s’allonger au fil des ans, de plus, on assiste progressivement à la transformation de l’agriculture vivrière en agriculture biotechnologique », soutiennent les conférenciers.

Selon les explications de Jean-Paul Sikéli, les manipulations génétiques actuelles portent sur des cultures et des produits agricoles aussi stratégiques que le niébé, le manioc, le sorgho, le mil, le riz et le maïs. Ces expérimentations transgéniques constituent donc une « atteinte grave » à la souveraineté alimentaire des peuples africains et ne peuvent être considérés comme des solutions viables. « Les défis auxquels l’agriculture est confrontée peuvent être relevés par des systèmes alimentaires durables qui reposent sur l’agro-écologie et les semences paysannes, lesquels ont par ailleurs montré leur capacité de résilience aux aléas climatiques des millénaires », soulignent les conférenciers.

Un autre constat est que, pendant que la question des OGM classiques pousse les populations à s’engager dans un débat qui cristallise les tensions et accentue les clivages. Les chercheurs acquis à la cause des firmes de l’agro-business développent désormais d’autres types d’OGM dits de nouvelles générations, issus du forçage génétique ou mutagénèse (les organismes obtenus par mutagenèse sont bel et des OGM).

« Le plus redoutable, c’est le projet ‘’Target Malaria’’ qui prévoit le lâcher imminent de dix mille moustiques génétiquement modifiés, dans l’environnement du Burkina Faso pour soi-disant lutter contre le paludisme », rappellent les participants, précisant que le même projet concerne le Mali et l’Ouganda.
« Il faut regretter le fait que plutôt que d’investir dans des solutions endogènes, simples, pratiques, efficaces et durables pour booter le paludisme hors de l’Afrique, la recherche dans nos pays, préfère s’orienter vers des solutions hasardeuses et à haut risque, à travers des projets pharaoniques financés à coups de milliards par des organismes et des institutions prétendument philanthropes. Le projet ‘’Target Malaria’’ soutenu par la Fondation Bill et Melinda Gates est une véritable catastrophe pour la santé et l’environnement dans nos pays, du fait de l’imprévisibilité des mutations génétique dans la nature », décrient-ils.

Ali Tapsoba qualifie le projet de « histoire clandestine », l’opinion n’ayant pas été informée du processus. Malgré le refus de la société civile, les auteurs ont continué le croisement à Bobo-Dioulasso. « Aujourd’hui, on a constaté, avec amertume, regret, que l’agence nationale de biosécurité a donné l’occasion de lâcher (les moustiques). Nous avons appris le 6 septembre, que c’est depuis le 12 août qu’ils ont reçu l’autorisation de lâcher et nous avons automatiquement manifester pour montrer notre désarroi face au comportement de l’Agence nationale de biosécurité, qui est sensée être une agence de régularisation, qui ne doit pas avoir de parti pris », déplore M. Tapsoba. Il n’y a qu’un groupuscule simplement manipulé qui croit au projet, les communautés de base, elles-mêmes, sont sceptiques et comprennent certains enjeux, affirme le point focal COPAGEN Burkina.

« C’est comme un combat de David et Goliath. Mais dans l’histoire des combats, David gagne toujours ; parce qu’il a avec lui, la raison, la justice », jauge-t-il, convaincu qu’on ne peut jamais gagner un combat devant un peuple déterminé.

C’est instruit de la situation que, les participants à ce forum régional exigent « l’arrêt immédiat des dépossessions des terres » des communautés par les investisseurs privés et la criminalisation des défenseurs des droits humains qui soutiennent la lutte contre les injustices de tout genre.

La COPAGEN a réitéré aussi son appel à un arrêt immédiat sur le lâcher dans la nature de moustiques génétiquement modifiés. A ce sujet, l’organisation a annoncé qu’elle s’engage à suivre l’évolution de ce projet et à mettre en place un dispositif et un mécanisme de veille citoyenne et d’entreprendre toute action légale à cet effet.

Les participants au forum appellent en outre les pouvoirs publics à privilégier la protection de la vie humaine en mettant la promotion de l’agro-écologie paysanne et des semences paysannes, dans leurs priorités, dans les politiques de développement agricole. Ils mettent également en garde les auteurs et promoteurs de ces nouvelles technologies, contre toutes les conséquences qu’elles pourraient engendrer sur la santé, l’environnement et des droits des populations en général et des communautés en particulier, sur les ressources vitales.

Outre le plaidoyer, la COPAGEN fait de l’accompagnement en matière de pratiques agricoles (par la proposition de solutions durables, notamment l’agro-écologie paysanne et les semences paysannes).

O.L.O
Lefaso.net

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