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Opinion : Comment éradiquer la pratique de l’excision à zéro franc en cinq ans

Publié le mercredi 3 octobre 2018 à 18h07min

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Opinion : Comment éradiquer la pratique de l’excision à zéro franc en cinq ans

Dans la vie en général et dans toute lutte en particulier, il faut avoir soit du muscle, soit de l’intelligence. En d’autres termes, soit on dispose de suffisamment d’argent pour organiser des ateliers, des conférences, des campagnes de sensibilisation, payer des vélos pour des indicateurs pendant plusieurs décennies pour des résultats mitigés, soit on dispose de peu d’argent et on met à contribution la raison pour atteindre les objectifs fixés.

Dans cette logique, pourquoi doit-on faire appel à la raison et comment peut-on par l’intelligence atteindre les objectifs fixés et à moindre coût ? En effet, depuis l’avènement de la révolution démocratique et populaire en 1983, plusieurs déclarations fortes de personnalités de premier rang ont jalonné toute l’étendue du territoire en faveur de l’élimination de l’excision. Il s’en est suivi une lutte sans merci contre la pratique de l’excision qui a entrainé plusieurs exciseuses et parents de filles en prison sans que ces derniers ne comprennent véritablement la portée de la mesure. En effet, il semblait difficile pour des personnes d’un grand âge, peu instruites de faire la distinction entre la circoncision toujours autorisée chez le garçon et l’excision interdite chez la fille, puisque les thèses d’antant n’arrivaient pas à les convaincre.

Cependant, cette lutte aboutira à la création du SP/CNLE en 1990 et à l’adoption de la loi anti-excision le 13 novembre 1996.
Depuis lors, des activités favorables diversifiées conduites par les Premières Dames et les Ministres en charge de la Santé et du Social ont produit les résultats que nous connaissons aujourd’hui.

C’est dans cette situation complexe que nous avons appris avec consternation l’excision d’une quarantaine de filles à Toudbwéogo à environ seulement 5 kilomètres du SP/CNLE et une dizaine de filles à Kaya au cours de la semaine du 10 au 16 septembre dernier. Au total, une cinquantaine de victimes connues en une semaine, et combien d’autres filles à Ouagadougou, dans les autres villes et villages auraient subi cette pratique horrible clandestinement dans la même semaine ? paradoxalement, de grandes personnalités, instruites, soi-disant éclairées, ont envoyé leurs filles dans leurs villages dans des voitures climatisées se faire exciser sans nul doute à leur demande au vu et au su des populations résignées.

Devant ce paradoxe, comment peut-on éradiquer ce fléau avec une économie de moyens, d’énergie et de temps ? Cela ne sera possible seulement qu’avec une volonté politique soutenue et une application rigoureuse et impartiale du projet de loi que nous vous proposons car selon un adage moaga « le couteau coupe d’abord son fourreau avant de couper autrui ». C’est ainsi donc que nous soumettons au législateur, un possible projet de loi qui devrait permettre d’éradiquer inexorablement la pratique en 5 ans. En voici la substance :

Après l’adoption de cette loi qui préconise que :

Le Président du Faso, les Présidents d’institutions, les Honorables députés, les Ministres, les Conseillers régionaux, les Maires, les Gouverneurs, les Haut-Commissaires, les Préfets, les Présidents et Procureurs des tribunaux et cours, les Directeurs généraux des SE et des EPE, les Directeurs régionaux, les Chefs militaires et paramilitaires, les Directeurs de projets et programmes devront présenter un certificat de visite et contre-visite médicale de leurs filles nées ou susceptibles d’être excisées après l’adoption de la loi du 13 novembre 1996. En effet, ceux qui conçoivent, qui diffusent la loi doivent la respecter pour que celle-ci puisse être respectée par les profanes. En conséquence, tous ceux ou toutes celles dont les filles auront été victimes perdent automatiquement leurs mandats ou leurs postes avec publication de leurs noms au Journal officiel du Faso. Dans la même logique, tous les grands chefs d’entreprises ou grands commerçants qui voudront soumissionner pour des marchés publics devront présenter le même certificat.

Dorénavant, les dossiers de candidature à la magistrature suprême, à la législature, aux Conseils municipaux, aux Directions générales devront comporter un certificat de visite et de contre-visite dont les modalités pratiques seront convenues après l’adoption de la loi. Désormais, les Conseillers municipaux et/ou les députés, œuvrant de concert avec les chefs de villages devront dénoncer toutes velléités d’excision qu’ils n’arriveront pas eux même à empêcher. La non-dénonciation conduira automatiquement à la perte du mandat.

Dans la même logique, une formule de portée générale doit être trouvée pour que la République ne fasse plus honneur par des décorations ou autres distinctions à des parents dont les filles ont été excisées.

Toutefois les dîmas ou d’autres dignitaires dont le respect des coutumes exige que la première fille soit une exception aura une autorisation spéciale pour le respect des coutumes.

NB :
1. Tout médecin ou professionnel de santé qui délivre un certificat complaisant sera radié de son ordre avec interdiction définitive d’exercer le métier.

2. Le SP/CNLE devient le Conseil national de l’observance de l’application de la loi.

SEDEGO Hamado Jérémie
Kinésithérapeute/ Cadre de Santé

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Vos commentaires

  • Le 3 octobre 2018 à 20:50, par jeunedame seret En réponse à : Opinion : Comment éradiquer la pratique de l’excision à zéro franc en cinq ans

    Belle proposition de lutte active Jérémie. Mais qui va établir ces papiers ? Parce qu’à partir du moment où tu faisais ces propositions, sache que les grands ont déjà parcouru les voies de magouille ou corruption. Et il y a même eu à Ouaga des hommes de santé complices ou auteurs d’excision et d’avortement dans les CMA contre CFA. Attention aux services de garde la nuit ; attention aux consultations des maternités. Attention aux lieux de délivrance de papiers connus d’avance. Au Faso, tout ce qui est papier est trichable. Moi j’ajoute même que le jour de la présentation des papiers, les filles concernées tiennent ces certificats en mains, et se fassent vérifier les sexes par une autre équipe étrangère ou locale formée en dernière minute, pour confirmer. Et au moment du recrutement scolaire, on fasse des opérations de visite de sexe et vérification de certificat dans les écoles pour connaître les récidivistes. Répétez les mêmes examens aux filles de moins de 15 ans dans toutes les situations de vie ; avec des certificats renouvelés ou confirmés plusieurs fois.

  • Le 4 octobre 2018 à 04:45, par Maiga En réponse à : Opinion : Comment éradiquer la pratique de l’excision à zéro franc en cinq ans

    Vous êtes vraiment sérieux ? VOUS SAVEZ DE QUOI VOUS PARLEZ :"Toutefois les dîmas ou d’autres dignitaires dont le respect des coutumes exige que la première fille soit une exception aura une autorisation spéciale pour le respect des coutumes.". Il n’ya aucune excuse pour cette pratique. AUCUNE.
    .
    Quant à vos premières propositions, elles sont bien. Toutefois :
    Ce n’est pas le manque de loi qui empêche certains changements, c’est le manque d’application des lois. Et Jeune dame seret a tout dit.

    • Le 4 octobre 2018 à 10:33, par Yacoub En réponse à : Opinion : Comment éradiquer la pratique de l’excision à zéro franc en cinq ans

      M Hamado je te fais une autre proposition,vu que c,est le matériel utilisé et la non maitrise de l,acte par les exciseuses, autorisons l’excision mais dans des centres de santé avec des agents bien formés.Ainsi toute personne appréhendée sera punie et on peux même se faire des millards en faisant payer 25000 fr par exemple par fille et même plus.

  • Le 4 octobre 2018 à 09:34, par Sereine En réponse à : Opinion : Comment éradiquer la pratique de l’excision à zéro franc en cinq ans

    Bonjour,
    M. Sedego, pourquoi violer l’intimité de jeunes filles pour vérifier si elles ont été excisées ou pas serait une solution ? C’est carrément remplacer une violence par une autre. Avant de proposer une solution mettez-vous toujours à la place des personnes qui seront concernées. Vous êtes kinésithérapeute ; soyez certains que tous ceux que vous soignez, font violence sur eux-mêmes pour dévoiler des parties de leur corps pour recevoir vos soins. N’imposez rien à ces filles qui n’ont pas demandé à leurs parents d’occuper des postes.
    En plus vous n’allez pas au bout de votre logique. Si vous trouvez que l’excision est vraiment une violence faite aux femmes qui en porteront les séquelles toute leur vie, pourquoi permettre des exceptions aux dignitaires ? Cela ne tient pas débout.

    • Le 4 octobre 2018 à 15:26, par Une femme au foyer En réponse à : Opinion : Comment éradiquer la pratique de l’excision à zéro franc en cinq ans

      Je partage votre point de vue ! Qu’elle est cette idée de toujours voir la femme comme un objet ? Utiliser les femmes pour perdre des postes et autres avantages à des personnes véreuses ! J’ai été choquée de lire cet article. Une fille qui a été excisée, elle doit encore subir une visite médicale qui va encore lui rappeler ce qu’elle subit : Ensuite il faut publier le le nom de son père ou de sa mère dans le journal officiel, et bien sûr par la même occasion dire à tout le monde qu’elle a été excisée ! Franchement !!!!!!!C ’est quoi cette idée ? Choquante ! Avez vous quand même réfléchi à proposer qu’on demande leur avis avant de faire une publication sur leur état sexuel.
      En plus vous parlez d’exception ????!!!! Qu’elle exception ? C’est la preuve que vous même auteur de l’article n’êtes pas convaincu de l’éradication de l’excision.
      Ce qui est peut être faisable, c’est demander aux filles majeures de ces hommes politiques et leaders religieux qui ont subit l’excision de les dénoncer. En ce moment, elles sont responsables de leur actes et assument tout.

  • Le 4 octobre 2018 à 10:21, par le paysan En réponse à : Opinion : Comment éradiquer la pratique de l’excision à zéro franc en cinq ans

    Jeunedame c’est vrai. Lors d’une intervention à Ziniaré par Mme SANGARE sur ce problème (avant qu’elle ne soit ministre) entre 2007 et 2009, je l’ai abordé en disant que l’état ne veut pas mettre fin à cette pratique. Je l’ai proposé que lors des rentrées scolaires, qu’une visite médicale soit faite sur tous les élèves afin de déceler quelques anomalies que portent certains enfants et profiter voir si la petite fille détient toujours son clitoris. Vous recensez ces filles et vous mettez un comité en place qui va faire appel aux différents parents pour comprendre pourquoi depuis que la loi soit votée depuis les années 90 vous continuez à exciser vos filles ? Vous comprendrez leur mode défense et vous profiterez donner des avertissement à ses parents. Elle m’a dit que l’enfant a des droits et on ne peut pas faire ça parce que c’est interdit. J’ai dit si c’est ça le SP/CNLE ne va pas atteindre ses objectifs. Vous voulez faire des omelettes sans casser les œufs, ça va être difficile.
    C’est comme le cas de la consommation de la drogue actuellement. Voyez comment des foyers souffrent parce que leurs fils ou filles sont devenus accros et ces foyers cachent même le mal à la société. Voter une loi qui va permettre à des laboratoires mobiles de sillonner les lycées et universités pour prélever les urines et sang pour analyse. Si c’est positif, immédiatement la famille de l’enfant est informée et des mesures disciplinaires doivent être prises pour dissuader le fameux consommateur de drogue. Des parents iront aviser la police ou la gendarmerie, au lieu de trouver une solution aux parents, elle dit qu’elle fait des enquêtes pour connaitre sa source d’approvisionnement. Pendant ce temps l’enfant s’enfonce dans la merde.
    Vous savez que certaines même de la structure SP excise leurs filles ? Même des responsables pas possible le font dans ce pays. Les faits sont visibles. Draguer une fille des années 95 et vous constaterez le catastrophe surtout chez nous les musulmans.

  • Le 4 octobre 2018 à 14:48, par Neekre En réponse à : Opinion : Comment éradiquer la pratique de l’excision à zéro franc en cinq ans

    Il y a des gens , c’est vrai aidés par l’ignorance qui ont l’oreille dure. Même quand tu es toi même convaincu que la pratique est néfaste, il faut reconnaître que notre organisation sociale est telle qu’il faut vraiment être décidé pour prendre le risque d’aller contre "tout le monde" et pouvoir les faire entendre raison. Je pense que la lutte commence en famille individuellement avant d’être une affaire d’Etat. Je ne suis pas passé par 4 chemins pour faire comprendre aux tantes, cousines et belles mères que sur ce sujet, je ne rigole pas : et le résultat est là. Mais je suis conscient qu’il y a des familles ou des environnements ou tout le monde regarde dans la même direction (j’espère que me fais comprendre).

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