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Situation nationale : Alain Zoubga assène ses vérités

Publié le jeudi 21 juillet 2005 à 10h07min

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Les 9 et 10 juillet 2005, se sont tenues à Réo dans le Sanguié, les journées parlementaires du groupe parlementaire PDP/PS et apparenté RDEB. A la fin des travaux, nous avons approché Alain Zoubga, secrétaire général national du Parti pour la démocratie et le progrès/Parti socialiste (PDP/PS) et directeur adjoint de la coordination provinciale de la campagne présidentielle pour échanger avec lui sur certaines questions de la vie nationale.

"Le Pays" : Comment appréciez-vous le déroulement des travaux de ces journées parlementaires ?

Alain Zoubga (SGN du PDP/PS) : C’est vrai que je ne suis pas député, mais les journées parlementaires PDP/PS sont des moments forts, parce que nous essayons autant que possible de les tenir à tour de rôle dans différentes localités où l’occasion nous ait donnée de sensibiliser nos militants et sympathisants. Les travaux se sont déroulés sur des questions importantes.

Le thème en lui-même résume l’ensemble des questionnements d’actualité : le processus démocratique, son historique, son évolution, sa tendance actuelle, les perspectives. Un thème qui a retenu l’attention de l’ensemble des participants et qui nous a permis d’avoir une idée claire des missions politiques à travers les différents régimes jusqu’au quatrième. La tendance générale est que c’est une mission qui a évolué à dents de scie.

Mais cette longue traversée du peuple vers la liberté a été marquée par des points forts et nous a conduits au stade où nous en sommes.
Nous n’avons pas aussi, au regard de la situation nationale, perdu de vu ce qui préoccupe nos population : la famine. Il y a une véritable famine dans ce pays. Nous avons pris une motion de recommandation où nous insistons sur la mise en place d’un mécanisme qui puisse permettre aux populations d’avoir accès aux vivres à prix social

Le thème parle de perspective de la démocratie au Burkina Faso. Comment le PDP/PS voit cette perspective quand on voit que l’opposition piétine ?

Il faut voir les perspectives sous l’angle de la lutte. Aucun processus démocratique ne s’établit et ne s’enracine sans lutte. C’est à nous de faire la preuve que unis, nous pouvons mériter la confiance du peuple. C’est à nous de travailler pour mettre en cause la logique des gouvernants d’aujourd’hui qui est une logique d’hégémonisme, qui montre en fait que la démocratie n’est pas totalement acceptée par les tenants du pouvoir. Mais personne n’est dupe. La démocratie est extrême difficile de par la faute de l’ensemble de tous les acteurs et principalement par la faute du régime en place. Mais nous aussi en tant qu’opposants nous avons aussi notre part de responsabilité.

On dit souvent qu’il n’y a pas de vrai opposant. Est-ce que le PDP/PS se sent concerné par cette critique ?

D’abord une telle affirmation est fausse. Que l’on dise que les vrais opposants constituent une minorité compte tenu de la flopée d’opposants fabriqués, ça, c’est une réalité. Mais on ne peut pas dire qu’il n’y a pas de vrais opposants. Il y a une opposition véritable au Burkina. Malheureusement, l’opposition burkinabè, s’est caractérisée depuis des années, par des changements incessants, des retournements de vestes, des conduites inacceptables et aujourd’hui nous sommes en train de récolter les fruits de ces mauvais comportements.

Lorsque vous criez fort que vous êtes de l’opposition et que votre comportement réel montre que vous êtes dans les arcanes du pouvoir, ça décourage la population. Les trahisons sont historiques dans ce pays. Depuis la CFD il y a eu des trahisons qui ont laissé des traces indélébiles. Sous la lutte contre l’impunité, il y a des trahisons. Malheureusement ce sont les mêmes qui trahissent et qui trouvent des ressorts pour revenir à la surface pour faire croire qu’ils sont des vrais opposants. Maintenant chacun sait qui est qui.

Vous avez évoqué la question du chef de file de l’opposition au cours des débats. Est-ce qu’on peut savoir ce qui en a été dit ?

Nous avions déjà notre position sur cette question. Nous avons fait la preuve que cette question a été tranchée à la tète du client. Pour ce qui nous concerne, nous disons que la notion de chef de file de l’opposition est un acquis de la lutte démocratique de notre peuple. Bien entendu, ce sont des acquis qu’il faut préserver et ne pas se confiner dans la conception actuelle qu’a le pouvoir de la notion de chef de file de l’opposition.

La lutte doit être ouverte pour que ce soit un véritable chef de file de l’opposition avec la possibilité de faire changer un certain nombre de positions et faire prendre conscience au peuple que l’opposition a des positions à défendre.

L’ADF/RDA soutient la candidature du président Blaise Compaoré à la présidentielle. Quelle est votre appréciation ?

D’abord l’ADF/RDA est un parti souverain. Elle a la liberté de soutenir qui elle veut mais c’est quand même gros. Je m’attendais à ce que cela arrive, mais je reste jusque là surpris. Ce soutien arrive au moment où au niveau de la classe politique, la tendance générale est de créer des conditions pour qu’il y ait un changement. Cela montre véritablement que le chef de file de l’opposition a travaillé depuis pour empêcher l’opposition d’accéder au pouvoir. C’est comme si la fameuse couronne qu’on lui a donnée c’est pour faire ce travail. Ce qui s’est passé fait honte à l’opposition, à la classe politique et même au pouvoir. Parce que, qu’on le veuille ou non, le pouvoir a travaillé pour cela.

Je crois que ce n’est pas bien pour le pouvoir d’un point de vue éthique politique d’accepter ce soutien. Ils apporteront quoi au chef de l’Etat aujourd’hui ? A mon avis sans l’ADF/RDA, le régime tel qu’il fonctionne aujourd’hui va aboutir aux résultats qu’il recherchait, pour la simple raison que la transparence ne sera pas de mise. Dans ces conditions ADF ou pas ADF il y aura fraude

Votre ancien compagnon Emile Paré se trouve en plein dans une crise au sein de l’OBU. Votre analyse.

L’affaire Emile Paré, Paren, OBU, MPS, c’est un peu un volet de ce que j’appelle la semaine folle. Personnellement, je suis gêné et peiné pour plusieurs raisons. Je ne suis pas à l’aise parce que j’ai connu Emile Paré à l’université. Nous avons travaillé ensemble à l’université à Dakar puis ici au Burkina. Nous avons été des militants de la révolution. Sur ce, ce n’est pas facile que quelqu’un que vous avez connu, aimé, estimé et soutenu se retrouve dans la tourmente.

Cela dit, il y a un certain nombre de faits qui m’ont inquiété, malheureusement. Emile Paré à son âge, n’avait plus besoin de l’aide de qui que ce soit pour évoluer en fonction de sa vision des choses. Déjà, avec la crise au PDP/PS, ma conviction profonde est qu’il a posé des problèmes réels. Ça , je le dis, sans tourner autour du pot. Mais, la façon dont il a posé le problème et surtout les solutions qu’il apportait, toutes les méthodes de lutte qu’il a utilisées n’étaient pas justes. Elles confirment même aujourd’hui que c’était la destruction du PDP/PS qui était en préparation. Je pars du principe que dans ce contexte, les arguments qu’il développait ne peuvent plus tenir.

Nous avions à l’époque, dès les premières rencontres réglé la question. Emile paré était devenu tête de liste. C’était d’ailleurs le premier dossier et c’était la première solution apportée. Certes, l’argument qui est toujours brandi, est qu’au-delà de cette décision, il y avait une machine qui était montée quelque part pour l’empêcher de passer. Mais ça c’est de bonne guerre. Si vous arrivez à faire prendre en compte votre position et qu’on vous prend comme tête de liste, ceux qui sont contre vous vont travailler à vous empêcher de passer.

C’est à vous de développer une stratégie pour que votre décision se transforme en victoire. Donc je ne comprends pas pourquoi, il a persisté et signé. C’est peut être aujourd’hui qu’on commence à se poser des questions. Moi même à l’époque j’ai été brimé. J’aurais dû faire la même chose. Mais je n’ai pas le droit de mettre en avant ce qui a été contre moi et pour briser mon parti qui est mon instrument et arme de lutte.

Pour ce qui est des faits, je pense que Emile Paré ne doit pas être surpris. Il ne doit pas être surpris parce que, l’analyse qu’il fait du régime, il la connaît depuis des années, depuis le mouvement estudiantin, et même depuis 1989. 1989, c’est l’année où nous étions dans la lutte après les événements du 15 octobre 1987 où nous avions été éjectés. Je crois honnêtement que dans la situation où Paré se trouvait, il devait dire autre chose.

Ça ne sert à rien d’utiliser ce genre de style. Il faut absolument poser les vrais problèmes. Si Emile Paré a l’information pourquoi ne pas rendre publique cette fameuse liste qui indique le nom des éléments de l’opposition qui ont soupé avec le pouvoir ? Ça va le grandir et grandir l’opposition. Il n’avait pas intérêt à utiliser des demi-vérités. Il n’a qu’à aller jusqu’au bout.

Ensuite l’envoyé, il sait qui c’est. Qu’est ce qui l’empêchait de dire, c’est tel élément que le pouvoir a envoyé pour me contacter ? Tout le monde sait aujourd’hui que c’est Salif Diallo selon la presse. Qu’est ce qui l’empêche de dire honnêtement ce qui s’est passé ? Et mieux, lorsqu’il parle de rencontre privée entre Bado et le président, là encore ce n’est pas juste.

Si c’est privé comme il le dit, qu’est ce qu’il a à aller dans cette rencontre ? Je suis convaincu que si Emile Paré avait échangé avec ses camarades du MPS, on lui aurait dit que cette manœuvre n’est pas une bonne chose. Son style, sa méthode de défense laissent apparaître des interrogations, des sous-entendus, des suppositions et parfois des contradictions. Je crois que si Emile veut véritablement rebondir parce que rien n’est perdu, il doit dire la vérité au peuple et il sera tranquille.

Donc, sur le plan personnel je ne suis pas à l’aise. Sur le plan de l’opposition je ne suis pas à l’aise non plus par ce que cela fait croire que l’ensemble de l’opposition est concerné. II ne faut pas voir Emile Paré seul. Ceux là qui ont travaillé à le corrompre n’ont pas fait une bonne chose. lis donnent une mauvaise image de la démocratie. La tendance générale est de construire la démocratie.

Vous croyez donc qu’Emile Paré a pris l’argent avec Blaise Compaoré ?

Je ne suis pas là pour croire. Tous les faits, toutes les analyses montrent qu’il a pris l’argent. Je crois sans doute que Paré n’a pas reçu l’argent des mains du Président. Je crois à ce qu’il a dit. Mais il est clair que sans qu’il ait dit ça, il donne l’impression que l’argent du Président a été utilisé par lui pour les activités du parti. Qu’il ait pris directement ou que ça ait servi à l’OBU de fonctionner, c’est le même résultat.

Vous êtes un des leaders du PDP/PS dans le Boulkiemdé. Mais il semble que le parti se comporte très mal dans la province. Qu’en dites-vous ?

Oui, si je dis que le PDP/PS se comporte très bien dans la province, j’aurai menti. Mais ne croyez pas que nous sommes les seuls à nous comporter mal dans le Boulkiemdé. Beaucoup de partis sont mal à l’aise dans le Boulkiemdé. C’est pourquoi nous prenons des mesures pour que régulièrement il y ait des renouvellements de structures.

N’est-ce pas la crise entre vous et M. Guissou qui a créé des problèmes au Boulkiemdé ?

Je ne sais pas, s’il y a eu une crise entre Guissou et moi. II y a peut-être des problèmes de compréhension. Le seul moment qu’il y a eu crise entre Guissou et moi c’était pendant le choix entre les candidats aux législatives de 2002. Pour le reste Guissou moi, nous continuons de travailler.

Propos recueillis par Noraggo Paul HIRY
Le Pays

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