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Leadership jeune pour la paix et le développement : « Dans un Etat corrompu, il est difficile d’avoir le développement et la paix » (Flore Somda, directrice exécutive)

Publié le lundi 14 mai 2018 à 22h19min

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Leadership jeune pour la paix et le développement : « Dans un Etat corrompu, il est difficile d’avoir le développement et la paix » (Flore Somda, directrice exécutive)

Mis en place en septembre 2017 à Bobo-Dioulasso et officiellement reconnu en novembre de la même année, Leadership jeunes pour la paix et le développement en Afrique/Burkina Faso (LEJEPAD-BF) est une organisation qui s’est donné pour mission d’œuvrer à la moralisation de la vie publique, notamment par la sensibilisation et la mobilisation des jeunes autour des valeurs de civisme, d’intégrité et de citoyenneté. Convaincus qu’il ne peut y avoir de société de paix et un élan réel au développement sans des valeurs fondamentales, ces jeunes, géniteurs de l’organisation, ont en commun une formation reçue à l’Institut Gorée (Sénégal). Pour en savoir un peu plus sur cette organisation qui fait d’ores et déjà parler d’elle dans l’ombre, nous avons rencontré sa directrice exécutive, Flore Somda. Dans cet entretien, elle présente la vision de l’organisation et informe d’une grande offensive de lutte contre la corruption dont le top de départ sera donné les 17, 18 et 19 mai 2018 à Ouagadougou.

Lefaso.net : Pouvez-vous nous présenter l’organisation, LEJEPAD ?

Flore Somda (F.S.) : C’est une structure à caractère panafricain, qui existe dans plusieurs pays africains dont le Togo, le Sénégal, la Guinée Conakry, la Côte d’Ivoire et le Burkina. C’est une initiative de jeunes, qui ont participé à un atelier sur l’île de Gorée (Sénégal) en 2014, 2015, 2016, 2017, organisé par l’Institut Gorée. C’est de là qu’est née l’idée de mettre en place une structure de jeunes pour la prévention des conflits, la consolidation de la paix, le genre et le développement durable. À l’issue donc de l’atelier, chaque jeune devait réfléchir pour la mise en place de la structure au niveau national (c’est-à-dire dans son pays). Ainsi, la Guinée a été le premier pays à mettre en place sa structure en 2015 et le Burkina a mis en place la sienne en septembre 2017 à l’issue d’une assemblée générale tenue dans la capitale économique, Bobo-Dioulasso.

Lefaso.net : Quelle est la vision de LEJEPAD-BF ?

F.S. : LEJEPAD-BF est convaincu qu’il ne peut y avoir de développement sans paix. Donc, nous allions aussi bien paix et développement, pour avoir des États qui émergent, des États démocratiques, des États prospères. D’où le slogan : Jeunesse citoyenne et solidaire pour un Burkina démocratique et solidaire. Mais on ne peut atteindre ces objectifs sans une formation (c’est la base de la réussite). Raison pour laquelle l’organisation entreprend plusieurs formations, non seulement au profit de ses membres, mais également à l’endroit de l’ensemble des jeunes. Ces formations portent sur les notions de gouvernance, de citoyenneté, de lutte contre la corruption, du genre... bref, sur toutes les notions en relation avec nos objectifs. Nous avons également plusieurs actions et initiatives dans ce sens. Il faut souligner que l’organisation dans chaque pays n’est pas une initiative de l’Institut Gorée, ce sont les jeunes participants aux ateliers qui ont estimé qu’ils pouvaient faire en sorte de pérenniser l’idée, pour que ce qui a été appris lors de ces ateliers ne soit pas un passage à vide.

Lefaso.net : Comment vous vous êtes retrouvés sur l’île de Gorée ?

F.S.
 : C’est l’Institut qui, depuis quelques années maintenant, a pris l’initiative de former 150 jeunes de la sous-région en prévention des conflits et en leadership. Pour mieux comprendre, il faut rappeler que l’Institut Gorée est une organisation panafricaine de la société civile, qui s’est donné pour mission principale de contribuer à la mise en place de sociétés paisibles, justes et autosuffisantes en Afrique, de renforcer le dialogue politique pour la résolution pacifique des conflits, de contribuer à la consolidation des processus démocratiques et des institutions et d’encourager la créativité artistique, sociale et économique.

Lefaso.net : Comment ont été choisis les participants à cet atelier ?

F.S. : C’est par candidature. De 2014 à 2017, c’est environ une dizaine de jeunes burkinabè qui ont bénéficié de ces ateliers. Sur un ensemble de 150 jeunes formés, 20 ont été retenus en juillet 2017 pour une formation de formateurs. Ces derniers sont considérés comme des points focaux dans leurs pays respectifs. J’ai eu l’opportunité de participer à cette formation qui s’est tenue en juillet 2017 à Dakar.

Lefaso.net : LEJEPAD Afrique regroupe combien de pays ?

F.S. : Le Burkina, la Côte d’Ivoire, la Guinée, le Sénégal, le Mali et le Togo sont les pays qui ont, à ce jour, une structure opérationnelle. Le Bénin et la Guinée-Bissau sont en voie de mettre en place leur organisation.

Lefaso.net : Combien de jeunes burkinabè ont à ce jour pu bénéficier de cet atelier de Gorée ?

F.S. : Nous devrons être au nombre de huit (si je ne m’abuse) : trois représentants en 2014, trois en 2015 et deux en 2016. En 2017, pour la formation des formateurs dont je vous parlais plus haut, deux participants du Burkina ont été retenus (un participant de la première promotion, 2014, et moi-même).

Lefaso.net : Qui peut faire partie de l’organisation ?

F.S. : Tout jeune qui embrasse la vision de l’organisation, à savoir promouvoir la paix, la bonne gouvernance, le développement durable. Donc, elle est ouverte à tout jeune.

Lefaso.net : Comment êtes-vous organisés au plan national ?

F.S. : Nous avons une coordination de sept membres, qui fait office d’exécutif avec à sa tête la directrice exécutive que je suis.

Lefaso.net : À ce jour, quelles sont les actions qu’on peut mettre à votre actif ?

F.S. : En décembre dernier, nous avons renforcé les capacités de nos membres en plaidoyer et élaboration de plan d’action. Nous avons également outillé plus d’une trentaine de jeunes sur l’analyse des conflits. Le 1er mai dernier, nous avons formé des jeunes aux violences basées sur le genre.

Lefaso.net : LEJEPAD prône des valeurs inhérentes au développement... Que faites-vous pour intéresser les autres jeunes burkinabè ?

F.S. : Un des grands projets qui nous tiennent à cœur dans ce sens, c’est de lancer une plateforme pétitions citoyennes, notamment sur la participation des jeunes à la gouvernance. C’est de faire en sorte que les jeunes comprennent et prennent la mesure qu’ils ont un grand rôle à jouer dans la quête de la bonne gouvernance. D’où l’idée d’une pétition, quand bien même nous savons que les règles en la matière au Burkina sont difficiles. Nous sommes en train de travailler dans cette optique. Dans cet esprit, l’action majeure que nous voyons, c’est la lutte contre la corruption, car dans un État corrompu, il est difficile d’avoir le développement et la paix. Et nous sommes sur un projet qui va se dérouler dans les jours à venir, à travers une activité en destination de plusieurs jeunes de toutes les régions. Il s’agira d’une activité qui va se dérouler autour du thème de la corruption. Que la jeunesse sache qu’elle a un rôle très capital à jouer dans la lutte contre ce phénomène. Il s’agira de voir les enjeux d’impliquer les jeunes dans cette lutte.

Lefaso.net : Et c’est quand cette activité et quelle sera son contenu ?

F.S. : C’est pour les 17, 18 et 19 mai 2018. Elle se tiendra à Ouagadougou et va réunir des jeunes des régions environnantes. Après la capitale politique, nous allons mettre le cap sur la capitale économique, Bobo-Dioulasso, où la même activité sera tenue les 24, 25 et 26 mai et elle va aussi réunir les régions environnantes. Donc, à travers cette répartition, il s’agit de toucher les jeunes de toutes les localités du pays. Le thème central de cette activité, c’est « Rôle et implication des jeunes dans la lutte contre la corruption pour un développement durable au Burkina ». De ce thème principal découlent plusieurs sous-thèmes dont la question même de l’éducation civique dans cette lutte, la participation citoyenne, la corruption électorale.

Lefaso.net : Comment se fera le choix des participants dans les régions du pays ?

F.S.  : Nous avons décidé d’inviter les représentants d’associations (pas des personnes à titre personnel), parce que l’objectif ici c’est de pouvoir impacter plusieurs jeunes. Donc les représentants qui viendront à cette activité seront tenus de faire des restitutions aux structures qui les a mandatés. En clair, il est attendu d’eux qu’ils organisent à leur tour des cadres de restitution dans leur localité. Vous aurez à ce séminaire donc des associations qui œuvrent dans les domaines qui entrent en droite ligne des objectifs poursuivis par LEJEPAD, qui évoluent dans le même champ d’action et auxquelles cette formation peut apporter beaucoup.

Lefaso.net : On comprend que vous voulez engager les participants à travers leur organisation. Mais quels vont être les critères de choix de ces associations dont les membres vont être retenus ?

F.S. : C’est d’abord de voir quelles sont les actions qu’elles mènent à leur niveau. Donc nous allons travailler à ce qu’il y ait non seulement des partages d’expérience, mais également à ce qu’il y ait un retour.

Lefaso.net : Quels sont les mécanismes que vous prévoyez pour rassurer que le contenu de la formation sera restitué par les participants ?

F.S.
 : Il y aura un suivi-évaluation sur le terrain. Les participants auront à renseigner des fiches avec un certain nombre d’informations qui vont permettre de suivre cette étape. Qu’au-delà de la restitution, l’on sente que la formation a servi aux participants.

Lefaso.net : Qui seront les formateurs ?

F.S. : Nous avons contacté des personnes-ressources auprès du REN-LAC (Réseau national de lutte anti-corruption, ndlr), de l’ASCE-LC (Autorité supérieure de contrôle d’Etat et de lutte contre la corruption, ndlr) qui sont des institutions crédibles qui pourront donner de la matière aux participants.

Lefaso.net : Quelle est votre vision à travers cette initiative précise ?

F.S
. : Il s’agit de pouvoir prendre en compte la question des élections par la lutte contre la corruption électorale, les élections étant un moment propice au développement des pratiques liées au phénomène. À l’issue donc de l’activité que nous sommes en train de préparer, nous allons, ensemble, voir quels sont les types de projets à mettre en place pour cela. L’objectif est que les jeunes aient une attitude citoyenne et qu’ils puissent faire prendre conscience à d’autres personnes pour ne pas se laisser prendre au piège de la corruption électorale. Nous envisageons également un volet enfants à travers les enseignants qui vont servir d’axe d’intervention. Ce sont des activités qui vont permettre d’inculquer aux enfants, les valeurs d’intégrité. C’est pour dire que l’activité qui démarre dans quelques jours va offrir plusieurs possibilités dans ce sens. Je dis possibilités, parce que ce ne sont pas des activités toutes faites que nous voulons imposer, ce sont des actions qui seront discutées et arrêtées ensemble avec les participants.

Lefaso.net : Qui dit corruption électorale ne peut s’empêcher de voir les acteurs de premier plan, à savoir les politiques. Avez-vous des actions spécifiques à leur endroit ?

F.S.  : L’idée de la pétition évoquée ci-haut entre dans cette dynamique. Il faut pouvoir travailler aussi bien avec ceux qui sont considérés comme corrupteurs qu’avec ceux perçus comme corrompus. Il faut qu’on arrive à un moment où les gens seront convaincus qu’on doit voter à cause de la qualité de l’offre politique et non parce qu’on a donné un tee-shirt ou un sac de riz à quelqu’un. Donc, nous allons travailler avec les politiques dans ce sens. Et pour éviter cette pratique qui nuit à la démocratie, il faut que les politiques aient un programme à présenter aux populations et au peuple. Mais, combien de politiques ont un programme ? Ce qui est dommage est que les intellectuels s’abstiennent de voter, parce que nombre d’entre eux ne croient pas au changement. Ils laissent les autres, qui ne comprennent pas grand-chose, qui sont exposés aux pratiques de corruption, décider à leur place. Donc, c’est un travail vraiment transversal, qui concerne tout le monde, que chacun fasse sa propre rétrospection et voit comment il peut œuvrer pour le changement.

Lefaso.net : A quelques jours de cette activité, êtes-vous satisfaits du niveau de mobilisation de vos partenaires ?

F.S. : Nous en sommes très satisfaits, parce que c’est d’abord une initiative de jeunes, qui a ensuite eu l’accompagnement de nos partenaires qui ont cru à notre combat. Nous espérons que ce soit un départ avec ces partenaires et bien d’autres structures qui veulent aussi œuvrer dans ce sens.
Lefaso.net : Vos propos de fin ?
F.S. : C’est de vraiment dire merci à l’ensemble de nos partenaires. Ensuite dire aux jeunes qu’au lieu de passer tout le temps à blâmer, il faut se mettre en action, apporter sa contribution à l’action pour la bonne gouvernance (aussi minime soit-elle). Nous devons tous avoir pour souci d’apporter notre contribution à la lutte contre la corruption.

Propos recueillis par O.L
Lefaso.net

Adresses LEJEPAD-BF
Mobiles : 71 08 36 33 / 76 07 86 06
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