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« Dans la perspective du vote des Burkinabè de l’étranger, la Côte d’Ivoire est un enjeu capital pour nous » , Aboubacar Balima, président du PS Burkina

Publié le vendredi 13 avril 2018 à 00h26min

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« Dans la perspective du vote des Burkinabè de l’étranger, la Côte d’Ivoire est un enjeu capital pour nous » , Aboubacar Balima, président du PS Burkina

Officiellement crée en septembre 2017, le Parti Socialiste du Burkina (PS Burkina) se veut une organisation pour un renouveau, pilotée par Aboubacar Balima, ancien député du Conseil national de la Transition (CNT), ancien militant du parti au pouvoir (MPP). Sept mois après son lancement, PS Burkina a amorcé un rythme notable pour l’implantation, tant sur le territoire national qu’à l’étranger à travers les pays qui abritent de fortes communautés de Burkinabè. Dans cette dynamique, et de retour de la Côte d’Ivoire, nous avons échangé avec le premier responsable du parti, Aboubacar Balima, non seulement sur cette sortie en terre ivoirienne, mais également sur bien d’autres aspects liés à la vie de son parti et à la nation.

Lefaso.net : Après son lancement en septembre 2017, comment jaugez-vous les premiers pas du PS Burkina sur le terrain ?

Aboubacar Balima : Dès le lancement de notre parti, PS Burkina, nous nous sommes attelés à aller dans tous les arrondissements de Ouagadougou et les six communes rurales rattachées à la capitale où nous avons travaillé à installer des représentants. Après le Kadiogo (qui fait les douze arrondissements et les six communes rurales), nous nous sommes rendus à Bobo-Dioulasso où nous avons fait le même travail (mettre en place des représentations). Après la capitale économique, Bobo-Dioulasso, nous avons mis le cap sur la région du Centre-est où nous sommes actuellement en train de faire le même travail d’implantation du parti (dans certaines communes, le travail est même achevé). Nous sommes également dans la région du Centre-nord, plus précisément à Kaya (chef-lieu de la région) où nous avons également une représentation.

Après ces sorties au plan national, nous avons estimé nécessaire de nous déplacer en Côte d’Ivoire (26 mars au 1er avril 2018), où on compte de nombreux compatriotes. Donc, jusqu’à ce jour, tout se déroule normalement au niveau du PS Burkina.

Lefaso.net : Qu’est-ce qui a motivé la création de votre parti dans une pléiade de partis déjà existants, et alors même que vous auriez pu rejoindre d’autres organisations (politique ou de la société civile) comme l’ont fait nombreux de vos collègues du CNT ?

Aboubacar Balima : Avant que je ne sois membre du CNT, j’ai d’abord été, en 2014, président du Mouvement Brassard Noir. J’ai ensuite créé le Mouvement des droits humains pour la paix et la démocratie, dont j’ai été le président. Puis, je fus membre du bureau politique national du MPP (Mouvement du peuple pour le progrès, parti au pouvoir, ndlr) au niveau de la jeunesse.

Lefaso.net : Etiez-vous donc militant du MPP depuis sa création ?

Aboubacar Balima : Oui, depuis sa création. La loi n’interdisant pas dans toutes les conditions le fait d’appartenir à la fois à un parti politique et à une organisation de la société civile (on ne peut pas seulement appartenir aux instances dirigeantes…). Donc, j’ai milité au sein de ce parti, jusqu’à un moment donné où je me suis dit : pourquoi ne pas oser en tant que jeune ? Ceux qui sont aujourd’hui à la tête du pays ont aussi milité, comme nous, au sein d’organisations de la société civile, de mouvements syndicaux, de structures de partis politiques, etc. C’est donc intéressant souvent de passer par des mouvements de la société civile pour arriver en politique. C’est ainsi qu’près réflexions, j’ai pensé, avec certains camarades de la jeunesse et des sympathisants, qu’il était important d’unir les idées et arriver à un parti politique. C’est comme cela qu’est né le PS Burkina, qui vise à participer à l’animation de la vie nationale, à contribuer au bien-être de la société burkinabè et promouvoir des valeurs cardinales africaines. Aussi, on constate un manque de formation au niveau de la jeunesse pour lui permettre de s’engager en politique. Au-delà de l’aspect politique, c’est la formation même de la jeunesse dans plusieurs domaines de la vie, dont l’entreprenariat, qui se pose aujourd’hui. Et nous voulons, au niveau de PS Burkina, mettre l’accent sur cet aspect lié à la formation ; nous avons mis en place un vaste programme à cet effet.

Lefaso.net : Certains observateurs voient en vous, une manœuvre du parti au pouvoir dans la perspective 2020. Votre commentaire ?

Aboubacar Balima  : Je pense à ce niveau que chacun est libre de faire ses analyses, on ne peut empêcher quelqu’un de donner son opinion. Nous avons pour idéologie, la social-démocratie et beaucoup de partis politiques sur l’échiquier national, majorité comme opposition, partagent la même idéologie. Pour dire que nous ne travaillons pas pour un parti, nous sommes venus pour apporter notre contribution à l’édification nationale. Nous pensons pouvoir apporter un renouveau politique. C’est pourquoi nous voulons miser sur la formation de jeunesse (comme je le disais plus haute, nous avons un plan stratégique en la matière qui s’étend jusqu’en 2020). Donc, ce n’est pas parce que nous avons la même ligne idéologique que nous travaillons pour ce parti, le MPP. Non. Nous, nous avons nos valeurs qu’on veut promouvoir, nous voulons travailler à consolider la démocratie, la paix et la cohésion sociale.

Lefaso.net : Le PS Burkina s’inscrit dans l’opposition ou la majorité ?

Aboubacar Balima : Pour nous, c’est très tôt de parler d’appartenance à un bord ; parce qu’il faut d’abord travailler à l’implantation de nos bases dans les localités. C’est lorsque nous estimerons que nous sommes bien assis, et au regard du climat politique, que nous pourrons décider d’appartenir soit à l’opposition soit à la majorité. Sinon, pour le moment, c’est très tôt.

Lefaso.net : En une année d’existence, vous avez parcouru des régions du pays, dont les deux capitales. Vous êtes déjà dans une lancée électoraliste, dira-t-on !

Aboubacar Balima : Ce n’est pas exclu. Même si ce qui préoccupe aujourd’hui, c’est d’abord l’implantation du parti et le faire connaître sur l’échiquier national et international. Mais cela peut être évident, parce qu’au regard des réalités qui vont se présenter sur le terrain, si les militants décident que le PS Burkina se présentent, ce sera un droit pour lui. Donc, nous voudrons bien travailler à tout cela, c’est-à-dire à une bonne implantation du parti et pourquoi pas se présenter aux élections à venir.

Lefaso.net : Comment jugez-vous l’accueil que les populations réservent à votre parti sur le terrain ?

Aboubacar Balima : On peut remercier le bon Dieu pour cela ; parce que partout où nous mettons les pieds, il y a une mobilisation. On sent que les populations s’approprient le PS Burkina. Et cela, que ce soit à travers le territoire national que hors des frontières. Beaucoup ont promis également faire leur analyse et nous revenir. Nous avons pu également rencontrer des groupes spécifiques ; associations de femmes, de jeunes, d’artistes, de communicateurs de la diaspora ivoirienne pour présenter la ligne du parti et sa vision pour le Burkina. A la sortie de tout cela, nous pouvons dire que tout est bien parti et nous pouvons rassurer tous les Burkinabè à faire confiance au PS Burkina. Car, c’est un parti qui va vraiment travailler pour le développement du Burkina et l’épanouissement des Burkinabè.

Lefaso.net : On aurait compris que vous fassiez le maximum d’abord sur le plan national avant de mettre le cap sur la diaspora ! Qu’est-ce qui a motivé à la sortie à cette étape déjà sur la Côte d’Ivoire ?

Aboubacar Balima : La Côte d’Ivoire regorge une forte communauté de Burkinabè et sur le plan économique, ce pays est un pilier stratégique pour le Burkina (j’ai même pu visiter la représentation de la Chambre de commerce du Burkina dans ce pays et également échanger avec des opérateurs économiques burkinabè y résidant). De par l’importance numérique de Burkinabè qui vivent dans ce pays, et dans la perspective du vote des Burkinabè de l’étranger, la Côte d’Ivoire est donc un enjeu capital pour nous. Pour nous, c’était donc nécessaire d’effectuer ce déplacement de la Côte d’Ivoire.

Lefaso.net : Comment s’est concrètement organisé ce séjour en Côte d’Ivoire ?

Aboubacar Balima : Nous avons eu plusieurs échanges, notamment avec des organisations de la société civile de femmes, de jeunes. Nous avons également rencontré des personnes individuelles surtout dans le secteur économique, des notables (des responsables coutumiers pour demander leurs bénédictions). Notre objectif était vraiment de rencontrer la diaspora ivoirienne et c’est ce qu’on a fait. Nous avons pu rencontrer le maximum de Burkinabè et nous pensons qu’ils seront à leur tour des ambassadeurs du PS Burkina dans leur zone respective.

Lefaso.net : C’était quoi le principal message sur lequel vous vous êtes appuyés ?

Aboubacar Balima : Notre message a été axé sur quatre points. Il s’agit d’abord du message de prise de contact avec les frères et sœurs de la diaspora ivoirienne, ensuite présenter le parti (les textes fondamentaux, le manifeste…). Nous avons également abordé des questions liées à la vie nationale et un point de divers à travers lequel la communauté nous a fait part de ses préoccupations du moment (la majeure partie de ces préoccupations étant de voir l’effectivité du vote des Burkinabè de l’étranger dès 2020). C’est une première sortie qui a été satisfaisante, d’autres sorties suivront pour la mise en place des structures du parti.

Lefaso.net : De quel élément disposez-vous aujourd’hui pour dire que le PS Burkina promet en Côte d’Ivoire, après votre passage ?

Aboubacar Balima : D’abord, l’accueil chaleureux qui nous a été réservé. Ensuite, les gens sont venus d’eux-mêmes, de différentes localités du pays, pour échanger avec nous et des questions pertinentes ont été soulevées sur notre vision pour le pays (y compris la diaspora). Nous avons d’ores et déjà un représentant (point focal) qui va travailler à élargir l’assise du parti à travers les communes d’Abidjan et dans les autres villes du pays. C’est un point focal très déterminé que nous avons laissé en Côte d’Ivoire. Pour nous, c’est déjà un grand pas très important.

Lefaso.net : Après la Côte d’Ivoire, c’est quoi la suite ?

Aboubacar Balima : Nous allons mettre le cap sur d’autres pays qui abritent de fortes communautés burkinabè à l’image du Mali, le Sénégal, le Ghana, le Niger… Nous avons aussi en perspectives des pays européens comme l’Italie, la Belgique, la France, etc. C’est donc un programme que nous allons dérouler progressivement.
Lefaso.net : Qui dit parti politique dit énormes moyens financiers… Vous avez, en si peu de temps, parcouru des régions du Burkina et effectué une sortie en Côte d’Ivoire.

Quel projet se cache derrière PS Burkina ?

Aboubacar Balima  : Nous allons remercier Dieu le Tout Puissant de nous donner cette force. C’est vrai que le fonctionnement d’un parti politique demande beaucoup de moyens financiers, et que la réalité au Burkina est que les cotisations des militants ne peuvent pas faire vivre un parti, mais dans une organisation (qu’elle soit de la société civile ou politique), il y a toujours la part du premier responsable. C’est à lui qu’incombe plus le fonctionnement du parti, c’est lui qui doit travailler à tout mettre en œuvre pour la visibilité du parti. Donc, je travaille et je fais en sorte à planifier mes revenus pour faire fonctionner le parti. Aussi, Dieu merci, il y a des camarades du parti qui contribuent également et cela nous permet d’exécuter les activités du parti. C’est vrai qu’en politique, ce sont les moyens financiers, mais c’est avant tout aussi la volonté, la détermination, la vision et les hommes. C’est pourquoi, nous travaillons à ce que tous les militants puissent s’approprier la vision et le combat du parti pour participer à l’animation de la vie du parti. Même si pour le moment, on ne peut pas dérouler tout notre programme, du fait que les ressources financières sont effectivement limitées, nous fonctionnons selon nos moyens. Nous voulons travailler pour que les Burkinabè comprennent que nous ne sommes pas venus racketter l’argent du contribuable, mais plutôt pour les aider à aller au développement.

Lefaso.net : Vous prônez « un Burkina plus solidaire », mais aujourd’hui les questions de justice semblent diviser les Burkinabè. Quelle lecture votre parti fait de ces questions ?

Aboubacar Balima : Nous sommes clairs sur cette question ; il faut aller à une vraie justice et envisager une vraie réconciliation. Nous sommes tous les filles et fils de ce pays, on peut à un moment donné commettre des erreurs, ça arrive. Mais quand on faute, il faut aussi reconnaître ses erreurs, accepter d’être jugé et à partir de là, on s’assoit pour aller sur des bases nouvelles. Quand nous avons été approchés par la presse sur le procès en cours, nous avons dit qu’il faut une vraie justice ; une justice équitable et juste, pour ensuite aller à la réconciliation nationale. Il faut donc une justice qui va répondre aux aspirations de toutes les populations.

Lefaso.net : Au regard des réalités actuelles, êtes-vous sûr qu’on puisse arriver à cet idéal ?

Aboubacar Balima : Nous évitons de nous prononcer sur des sujets qu’on ne maîtrise pas, nous nous contentons juste de suivre l’actualité. Tout ce que nous allons demander aux autorités judicaires, c’est de travailler vraiment à une justice équitable, libre et transparente pour tous les Burkinabè. Aujourd’hui, les Burkinabè n’attendent que cela. Nous pensons que s’il y a une vraie justice, il y aura une réconciliation. Mais si on saute de coq à l’âne, ce n’est pas évident (si les familles des victimes n’ont pas la justice pour les soulager, ça va être difficile). Si on escamote les choses, on aura toujours les séquelles et les gens vont vouloir toujours se venger des faits. Nous pensons donc que c’est maintenant que les autorités judiciaires doivent se mobiliser pour évacuer certains dossiers pendants.

Lefaso.net : Qu’avez-vous en conclusion ?

Aboubacar Balima : C’est pour dire que nous voulons vraiment plaider et travailler à l’effectivité du vote des Burkinabè de l’extérieur. Nous plaidons auprès des autorités compétentes et encourageons la Commission électorale nationale indépendante dans ce sens car, nous pensons que tout Burkinabè, vivant au Burkina ou ailleurs, doit bénéficier de ses droits civiques et la possibilité du vote est un minimum dans ce sens. Même s’il est difficile de faire voter les Burkinabè de toutes les diasporas, il faut déjà commencer avec des pays où nous comptons de nombreux ressortissants ; ça va galvaniser les Burkinabè. Le vote des Burkinabè de l’extérieur est un enjeu important pour le Burkina.

Entretien réalisé par O.L
Lefaso.net

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