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Coupures d’électricité : Des acteurs tirent le diable par la queue

Publié le dimanche 18 mars 2018 à 12h03min

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Coupures d’électricité : Des acteurs tirent le diable par la queue

La direction générale de la Société nationale d’électricité du Burkina (SONABEL) a informé sa clientèle lors d’une de ses conférences de presse qu’elle connaît un déficit de 50 mégawatts (MW) pour la période de pointe de 2018. Cette situation rend difficile le bon fonctionnement de certains secteurs d’activité. Ils sont nombreux, ceux-là qui utilisent l’électricité au quotidien pour leur prestation. Une équipe de LeFaso.net s’est approchée de ces travailleurs pour s’enquérir de leur situation.

Abdoul Halim Zongo, soudeur : « En cette période de délestage, on a beaucoup de difficultés à respecter nos délais de rendez-vous. Malgré qu’on n’ait pas assez de marchés, l’électricité nous fait encore défaut. Si on connaissait au moins le timing des coupures, cela allait nous aider à mieux s’organiser mais hélas. Il y a de fois où nous coupons les fers pour les souder et le courant se coupe. On est donc obligé de s’assoir et d’attendre. Nous avons appris que la SONABEL connaît des pannes techniques actuellement, c’est pourquoi le directeur a informé la population des différentes coupures que nous allons connaître en cette période de chaleur. Malheureusement, les marchés que nous gagnons ne nous permettent pas d’acheter un groupe électrogène, car les bénéfices sont maigres ».

Une vendeuse de glace et de jus de fruits : « Avec ces délestages, nos clients se plaignent beaucoup. Lorsque la glace ou le jus qu’ils achètent n’est pas bien congelé, ils commencent à nous accuser tout en ignorant que c’est la SONABEL qui est à l’origine de cette situation. Certains en profitent pour nous tenir des propos déplacés, mais je suis obligée de garder le silence. Le marché tourne au ralenti. Maintenant, on est obligé de produire les jus de fruits et la glace en petit nombre de peur qu’en cas de délestage, nos marchandises se gâtent ».

Hamidou Ouédraogo, menuisier : « Nous gagnons de petits marchés de temps à autre et il est de notre devoir de respecter le délai afin de gagner la confiance des clients. Malheureusement, les coupures à répétition de la SONABEL nous font défaut. Parmi nos clients, il y a ceux qui nous comprennent mais d’autres par contre, refusent de voir la réalité en face. Je détiens un petit atelier donc je n’ai pas de moyens pour me procurer un groupe électrogène. Contrairement aux différents avis de la population sur la fourniture de l’électricité, la sortie médiatique du directeur de la SONABEL nous a rassurés sur les difficultés réelles qu’ils traversent actuellement. Je pense que la SONABEL doit diminuer sa facture en cette période, car nous n’utilisons pas beaucoup d’énergie ».

Yacouba Ouédraogo, soudeur : « Les coupures perturbent énormément notre travail. Hier par exemple, je devrais livrer une commande mais toute la journée, il y avait coupure donc j’étais contraint. Je n’ai pas de moyen pour acheter un groupe électrogène. Parait-il que la SONABEL a fait sortir un programme où les heures des coupures sont indiquées mais je n’ai pas connaissance de cela. Tout cela explique à quel point c’est difficile pour moi de m’en sortir face à cette situation ».

Omar Compaoré, boucher : « Le marché se passe bien mais lorsqu’il y a coupure, nous n’avons plus de clients. Ils n’aiment pas une viande qui traîne plus d’un jour chez le boucher. Parfois, ils arrivent et nous crient dessus on dirait c’est de notre faute. Nous faisons de notre mieux pour leur expliquer la situation telle que cela se présente. Comme solution, j’économise de l’argent pour acheter une plaque solaire sinon ce n’est pas bon ».

Illias Zongo, soudeur : « Avec ces coupures, vraiment, on ne peut plus travailler. Il arrive de fois où on passe la demi-journée sans électricité donc on ne fait rien. On s’assoit et on se regarde. Si j’avais les moyens, j’allais acheter un groupe électrogène ou installer des plaques solaires afin de tenir le coup mais hélas… ».

Sakinatou Nacoulma, poissonnière : « C’est compliqué en cette période mais on se débrouille comme on n’a pas le choix. Avec ces coupures, on est obligé d’adopter d’autres techniques de conservation. Par exemple ici, on conserve beaucoup les poissons dans la glace et on ne fait plus de grand stock. Pour le programme de la SONABEL par rapport aux coupures, je ne suis pas au courant. Il n’y a pas longtemps, j’ai fait installer des plaques solaires. J’ai investi plus de 4 millions de francs CFA dans cette énergie solaire mais à l’heure où je vous parle, même une seule ampoule ne s’allume pas. Tout est mal installé ».

Boukary Ouédraogo, soudeur : « Comme il y a beaucoup de coupures, dans cet atelier, nous travaillons les nuits. Dans la journée, il peut y avoir trois à quatre coupures donc c’est très difficile pour nous de travailler dans cette condition. Les clients nous mettent la pression pour la livraison de leurs commandes donc cela fait que c’est compliqué pour nous. Les gens de la SONABEL n’ont qu’à voir dans quelle mesure nous aider à bien faire notre travail sinon leur simple communiqué pour nous informer que cette année il y aura assez de coupures, ne nous arrange pas. Si j’avais les moyens, j’allais me procurer un groupe électrogène même si c’est pour une petite capacité, mais ce n’est pas le cas. Les coupures d’électricité pendant les périodes de chaleur ne datent pas d’aujourd’hui, donc il revient à la SONABEL de trouver une bonne solution pour nous ses clients ».

Youssef Yonli, coiffeur : « Avec ces délestages, rien ne va ! Des clients viennent et il n’y a pas d’électricité. Il arrive de fois où ils patientent un peu mais ils sont obligés de repartir. Imaginez de 6h à 15h, il n’y a pas d’électricité alors que c’est la seule activité que j’exerce. Et en cette période, la facture monte plus que lorsque je travaille normalement. Le bailleur se pointe pour prendre son argent. Je ne peux pas lui dire que je n’ai pas travaillé, car je dois respecter ma part de contrat. Cela remonte à plusieurs années qu’à chaque période de chaleur, il y a ce genre de coupure. C’est faute de moyen sinon je veux installer une plaque solaire. En faisant cela, je vais carrément oublier cette histoire d’électricité là même ! »

Propos recueillis par Cryspin Masneang Laoundiki
Lefaso.net

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