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Anatole Niamba, Chef service technique eau et assainissement de la Mairie de Toma : « Les mauvaises habitudes sont difficiles à combattre »

Publié le vendredi 9 mars 2018 à 01h08min

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Anatole Niamba, Chef service technique eau et assainissement de la Mairie de Toma : « Les mauvaises habitudes sont difficiles à combattre »

La mairie de Toma, chef-lieu de la province du Nayala, a, 16 février 2018, lancé un Plan stratégique d’assainissement (PSA), « Un ménage, une latrine », avec pour objectif affiché d’accroître de 75%, le taux d’accès à l’assainissement dans ladite cité et ses environnants, d’ici à 2025. En clair, c’est la réalisation de plus de 1 800 latrines de types confondus et 1700 douches, puisards et bacs à laver au bénéfice des populations qui sont ainsi en ligne de mire comme ambition. Pour approfondir certains aspects liés au sujet, eau et assainissement, nous avons approché le responsable à travers cet entretien.

Lefaso.net : Quelles sont les missions qui sont assignées au service technique municipal eau et assainissement de Toma, dont vous êtes le responsable ?

Anatole Niamba : Ce sont la protection et le nettoyage des cimetières, la sensibilisation des populations en matière d’hygiène et d’assainissement. C’est également le service qui est chargé de délivrer les attestations de salubrité aux promoteurs de restaurants et débits de boisson. Ce service a pour mission également de sensibiliser les populations sur les règles d’hygiène et d’assainissement.

Lefaso.net : Pour le cas des restaurants et débits de boisson…, que faut-il comprendre exactement ? Est-ce dire que toute personne qui désire ouvrir un restaurant et/ou un débit de boisson doit d’abord passer à ce service pour se faire délivrer une autorisation ?

Anatole Niamba : C’est simplement dire que le service a un droit de regard sur les restaurants et débits de boisson qui sont créés dans la commune. Dans notre mission, nous sommes soutenus par le service de la santé avec lequel nous effectuons des sorties de contrôle sur le terrain pour que les promoteurs de ces lieux appliquent les règles d’hygiène pour le bien-être des usagers.

Lefaso.net : Quelle est la périodicité de contrôle ?

Anatole Niamba : Depuis la création du service technique (en 2016, suivi du recrutement du technicien en 2017), nous sortons chaque mois pour inspecter ces endroits. Et jusque-là, nous n’avons pas encore réprimé, parce que nous sommes toujours sur la phase de sensibilisation. Un arrêté a été pris (par le Conseil municipal), donc le service technique est chargé de l’application.

Lefaso.net : Quelles sont les leçons majeures que vous tirées de votre mission sur le terrain ?

Anatole Niamba : Les mauvaises habitudes sont difficiles à combattre, pour ne pas dire que c’est un combat de longue haleine. La première leçon est qu’il y a beaucoup qui ne savaient pas que l’insalubrité pouvait leur poser des problèmes de santé. C’est pour cela nous passons par les ménages et les sensibilisations grand public pour amener les populations à prendre conscience que l’insalubrité est source de maladies et que, par conséquent, elles doivent changer de comportements. Certaines personnes comprennent tout de suite et se ravisent. Par contre, d’autres hésitent encore. Donc, nous allons mettre l’accent sur l’information, l’éducation et la communication. Nous sommes soutenus dans ce sens par la coopération allemande, la GIZ. A ce jour, je pense que le service est bien outillé, notamment en termes de renforcement de capacités et est prêt à accompagner conséquemment la population selon les objectifs que les autorités communales se sont fixés.

Lefaso.net : Avez-vous la ressource humaine pour cela ?

Visite d’une latrine moderne à Kisson, secteur N° 8 de Toma, avec au premier plan, le maire Malick Garané (saluant le bénéficiaire), la représentante de la GIZ, Ida Sylvie Ouandaogo et le représentant de l’ONEA (en bleu et noir)

Anatole Niamba : Bien sûr ! Vous avez tantôt entendu tout de suite (pendant la cérémonie de lancement, ndlr) le représentant de l’ONEA (Office national d’eau et d’assainissement) dire que la maîtrise d’ouvrage communal est désormais assurée par la commune. Maintenant, avec la création du service technique municipal, et le recrutement des techniciens, on peut dire qu’il y a de la matière pour faire le travail sur le terrain. Evidemment, on est accompagné par les services de l’Etat qui sont là (la santé, l’élevage, l’agriculture, l’environnement, l’ONEA...).

Lefaso.net : Il a été effectivement présenté, au cours de la cérémonie, des techniciens de la mise en œuvre du projet. Comment se sont faits le recrutement et la formation ?

Anatole Niamba : Il faut dire qu’au niveau de la commune, nous comptons de nombreuses associations, qui œuvrent dans le domaine de l’assainissement à Toma. Les deux associations qui ont été retenues sont passées par une procédure de sélection. Nous avons lancé un appel et les associations sont passées s’inscrire à la mairie. Ensuite, une commission a été mise en place et c’est cette dernière qui a retenu les deux associations. Désormais, ces organisations vont travailler sous la couple du service technique municipal. Il y a au total dix membres, soient cinq par association. Ces techniciens vont passer de ménage en ménage, et dans les services publics, pour proposer nos gammes de produits en la matière, que l’ONEA peut réaliser pour les publics cibles. Avec les explications des techniciens sur le terrain, l’intéressé passe à la mairie et fait enregistrer son dossier. Il faut noter que les ménages font la demande en fonction de leur moyen et si le dossier est validé, nous mettons à la disposition du demandeur, les techniciens. Ceux-ci vont fabriquer les dalles, les briques, et autres, pour les mettre à la disposition du demandeur qui, maintenant, discute le prix de la construction avec les maçons qui ont été formés par l’ONEA (ils ont été outillés dans la technique de réalisation des ouvrages de l’ONEA).

Ce sont des ouvrages homologués, qui permettent aux ménages de préserver leur santé. Grâce à ce lancement, les ménages doivent abandonner le recours aux latrines traditionnelles. Aujourd’hui, à Toma, sur 100 ménages, vous avez seulement un ménage qui a une latrine homologuée. Toutes les latrines qui sont actuellement dans les ménages sont traditionnelles, à ciel ouvert, les mouches entrent et ressortent comme elles veulent ; ce qui provoque des maladies pour les populations elles-mêmes. Mais avec ces nouveaux produits qui viennent d’être lancés, ça va contribuer à la promotion de la santé dans la ville de Toma.

Lefaso.net : Il y a également que pour les populations, ce genre de constructions tiennent compte de certaines réalités sociales… Avez-vous tenu compte de tous ces paramètres ?

Anatole Niamba, présentant ici les nouveaux produits d’assainissement aux populations

Anatole Niamba : Effectivement, ces réalités traditionnelles sont bien présentes sur le terrain. Nous en avons tenu compte et c’est pourquoi également nous comptons miser sur l’information et l’éducation. Nous comptons également mettre en place des cellules dans les écoles, pour que ces élèves soient des relais auprès de leur famille. Donc, il faut maximiser sur la communication. Si nous arrivons à atteindre cela, nous pensons que la population va désormais revenir vers notre service et demander des ouvrages. Mais, une chose est de réaliser, une autre est de l’utiliser à bon escient. Donc, nous allons expliquer aux populations, comment entretenir ces latrines. C’est vrai, il faut avoir des latrines homologuées, mais encore faut-il bien les utiliser. Sinon, il ne sert à rien d’utiliser une latrine homologuée et sortir ne pas laver les mains au savon avant d’aller manger.

Lefaso.net : Oui, c’est intéressant, tout ce que vous dites, mais est-ce que vos produits sont accessibles à l’habitant moyen de Toma ?

Anatole Niamba : C’est vraiment étudier, de sorte que c’est en fonction de la capacité du ménage qu’on choisit le type d’ouvrage. Mieux, en fonction du type d’ouvrage, c’est encore subventionner à coût raisonnable pour permettre aux ménages de pouvoir acquérir ces latrines. A ce niveau également, je pense qu’il n’y a vraiment pas de problème. Quand nous nous sommes rendus à Ouagadougou en juillet 2017, c’était pour mobiliser des ressources pour pouvoir construire des latrines au profit des ménages démunis très vulnérables. C’est donc demander que tous les filles et fils s’impliquent, contribuent, un tant soit peu, à offrir une latrine à une personne de leur choix dans la commune.

Lefaso.net : C’est donc un appel aux ressortissants de la commune résidant dans les autres grandes villes du pays et à l’étranger ?

Anatole Niamba : Effectivement, et même ceux qui sont sur place ici à Toma et qui ont les moyens d’offrir une toilette à une personne/famille de leur choix. C’est en quelque sorte une chaîne de solidarité que nous demandons ici. Il faut venir en aide aux autres. C’est donc un appel à tous, à tous ceux qui peuvent mettre la main dans la poche, à ne pas hésiter...

Lefaso.net : Une chose est d’avoir des latrines, mais une autre est de pouvoir assurer la vidange. Avez-vous prévu ce service d’usage ?

Anatole Niamba : Effectivement, c’est la filière même de l’assainissement. Dans la filière, tout cela est prévu. Des vidangeurs manuels ont été formés pour cela. Nous sommes ici dans l’assainissement non collectif (ANC), ce sont des latrines réalisées dans les ménages. Donc, ce sont des vidangeurs manuels qui vont vider ces latrines. Ces derniers, avec l’appui de la coopération allemande, ont été formés à cette technique. Aujourd’hui, la liste de ces vidangeurs est disponible au niveau du service technique de la mairie. Donc, nous pensons que la page des latrines vidées et déposées juste à côté du mur est tournée. Un site a été identifié pour y déverser les excréments ; la mairie a prévu des dispositions pour cela. Dans cette dynamique, nous avons besoin de moyens de transport (tricycles) et s’il y a des bonnes volontés pour nous appuyer dans ce sens, elles sont les bienvenues.

Lefaso.net : Pour terminer … ?

Anatole Niamba : Je demande à la population d’adhérer à ce plan, le plan stratégique d’assainissement de la commune de Toma (qui vient d’être lancé). C’est en adhérant qu’on va préserver la santé de tous et lorsque nous sommes en bonne santé, on peut espérer avoir tout ce qu’on souhaite. Mais quand on est malade, on ne peut rien faire, on ne peut mener des activités économiques. C’est donc appeler à la responsabilité et à la solidarité de chacun afin que ce projet atteigne ces objectifs pour le bien-être de tous.

Entretien réalisé par O.L
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