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Politique nationale de communication : Impulser une nouvelle dynamique de développement

Publié le mercredi 31 décembre 2003 à 17h14min

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Hamado Ouangraoua

Le Burkina Faso a engagé depuis plus d’une décennie, une série de réformes économiques en vue de mettre le pays sur la voie de la croissance pour réduire la pauvreté et assurer un développement durable et intégral de l’homme. Mais nombre de politiques nationales mises en œuvre dans ce cadre présentent des résultats assez limités dus en partie à l’absence d’une communication participative. C’est alors que le 14 novembre 2001, le gouvernement a adopté en Conseil des ministres la Politique nationale de communication pour le développement (PNCD).

Les tenants et les aboutissants de cette politique, son intérêt pour le pays, sa mise en œuvre ... Autant de questions que nous avons évoquées avec le secrétaire général du ministère de l’Information, M. Hamado Ouangraoua.

Sidwaya (S.) : Qu’est-ce que la Politique nationale de communication pour le développement ?

M. Hamado Ouangraoua (H.O.) : La Politique nationale de communication pour le développement (PNCD) est un document cadre de référence qui a été adopté en Conseil des ministres le 14 novembre 2001.

C’est une politique qui affirme la volonté de l’Exécutif d’instaurer un nouveau type de rapport de gestion du monde médiatique. Et cela, avec toutes les populations qui contribuent à l’activité du développement national à tous les échelons. La PNCD se justifie par le fait que les types de communication pratiqués depuis les indépendances n’ont pas permis de provoquer une adhésion massive autour de nos sentiers de développement. Parce que non seulement leurs préoccupations n’étaient pas prises en compte mais aussi leurs avis et opinions n’étaient pas non plus pris en compte. En outre, les expériences déjà acquises par les populations sur le terrain n’étaient pas capitalisées. L’ambition donc de la PNCD, c’est de répondre à ce souci et d’impulser une nouvelle dynamique de développement dans chacun de nous dont la communauté tout entière est comptable du résultat.

S. : Quels sont les moyens dont dispose le ministère pour mettre en œuvre cette politique ?

H.O. : Le premier moyen dont dispose le ministère, c’est le document. Notre ambition constitue notre deuxième moyen parce qu’il faut de la volonté pour réussir toute entreprise. Nous avons des hommes formés, sensibilisés et compétents pour expliquer ce qu’est la communication pour le développement.

Nous avons également des partenaires qui sont disposés à nous accompagner dans la mise en œuvre de la PNCD.

Le programme de mise en œuvre de cette politique répertorie huit catégories d’activités dont le coût de la mise en œuvre est évalué à douze milliards de francs CFA. De façon classique, ce budget doit être composé de 20 % d’apport national et 80 % attendu des bailleurs de fonds. L’apport national se fera, à travers la fourniture de l’expertise, des infrastructures et à travers la prise en charge de la structure de coordination qui sera mise en place. Pour le restant du budget c’est-à-dire les 80 %, nous souhaitons mobiliser autour d’une table ronde des bailleurs de fonds qui sera convoquée au cours du premier trimestre de 2004.

S. : Quels sont les axes d’intervention de la PNCD ?

H.O. : Il y a huit (8) principaux axes d’intervention. Il serait fastidieux de les énumérer tous mais on peut néanmoins citer quelques-uns. Il s’agit de diffuser auprès des différentes composantes de la société, des institutions et acteurs de développement, le document de politique nationale afin que tous les intervenants dans le domaine du développement en soient imprégnés ; de concevoir et exécuter un plan de développement harmonisé des médias et des moyens de communication de proximité pour l’information et l’éducation des populations en zones urbaine et rurale ; de renforcer les capacités des ressources humaines de tous les intervenants par la formation à la communication pour le développement.

Il faut en outre souligner le soutien à la recherche dans le domaine spécifique de la communication pour le développement, et l’institution d’un volet communication dans tous les projets et structures de développement au niveau local, régional ou national afin de créer les conditions d’un retour d’information émanant des communautés de base.

S. : La PNCD ne serait-elle pas une politique de plus quand on sait que des politiques nationales dans d’autres domaines n’ont pas pu être mises en œuvre ?

H.O. : Dans le secteur de la communication, la PNCD ne peut pas être perçue comme une politique parce qu’à preuve du contraire il n’existe pas un document semblable. Il y a des institutions qui œuvrent dans le même secteur que nous comme la DELGI qui est en train de s’investir dans la politique nationale de développement de l’infrastructure de communication.

Cette politique est tout à fait différente de la PNCD qui est l’affirmation d’un nouveau type de rapport et un nouveau type de pratique de la communication. Nous ne faisons pas la promotion d’une technologie mais celle d’une stratégie de communication.

S. Quel changement concret peut-on attendre de la PNCD ?

H.O. : Nous attendons un changement de comportement de la population, une libération de la parole à la base, une participation plus consciente et plus massive de tous les acteurs du développement à tous les échelons de la société à la construction de leur propre développement. Cela veut dire que si tout le monde prend conscience et adhère à la PNCD, chacun en initiant une activité doit tenir compte de la nécessité d’intégrer la communication. C’est une communication qui doit être participative, c’est-à-dire que l’on ne peut plus aller faire de l’information. Tout le monde doit être considéré comme communicateur potentiel et détenteur de message que nous devons prendre en compte.

S. : Le ministère de l’Information a organisé récemment à Ouahigouya un séminaire où une vingtaine d’agents ont été formés en matière de plaidoyer dans le cadre de la PNCD. Quelles sont les missions assignées à ces désormais spécialistes ?

H.O. : Ils ne sont pas que des spécialistes mais aussi des avocats de la PNCD. Ils sont devenus des agents vulgarisateurs, des formateurs et des démarcheurs auprès de tous ceux qui peuvent contribuer à la mise en œuvre de la PNCD. Leurs tâches n’est donc pas ponctuelle mais permanente. Ils sont dépositaires d’une mission de très longue durée. Il y a un défi permanent à relever parce que nous aurons toujours besoin de faire de la communication participative pour faire valoir nos opinions dans la société.

S. : Après Ouahigouya, quelle est la prochaine étape ?

H.O. : Les bénéficiaires de la formation devront pouvoir mettre à profit les enseignements qu’ils ont reçus auprès des autres et pouvoir évaluer au fur et à mesure leurs contributions individuelles au plaidoyer en faveur de la PNCD. C’est un travail de longue haleine et il doit commencer au niveau individuel, familial, villageois et enfin national.

S. : Au sein du ministère même, la PNCD ne semble pas être connue. N’est-ce pas là une défaillance ?

H.O. : Le constat est juste et légitime mais ce n’est pas pour autant que c’est une défaillance. Parce que le document n’a pas été élaboré par les agents du ministère, mais par les agents du développement sur une sélection de plusieurs acteurs répérés à travers les régions du Burkina. C’est déjà ça la différence. Dans la démarche de conception, nous ne nous sommes pas assis dans un bureau avec des experts et consultants pour rédiger le document. Nous avons organisé treize ateliers régionaux et travers toutes les régions du pays et nous avons mis à contribution, par atelier, au minimum une vingtaine de personnes qui étaient les acteurs de développement les plus représentatifs dans chaque région. Et ce sont les contraintes, les difficultés, les solutions proposées par ces personnes qui ont permis de réaliser la PNCD. Ce n’est pas un document fait par des agents du ministère, il est donc normal qu’ils ne le connaissent pas. Mais, maintenant que nous sommes tenus de suivre et de coordonner sa mise en œuvre, il est devenu un devoir prioritaire pour l’ensemble des agents du ministère d’être les mieux informés sur la PNCD.

S. : Peut-on dire que l’échec de certaines politiques est imputable à la non intégration de la communication participative dans leur programme ?

H.O. : Lors des assises-bilans de la mise en œuvre du premier cadre stratégique de lutte contre la pauvreté, lors du bilan d’appréciation de la mise en œuvre de la première phase de la politique nationale de bonne gouvernance, le constat a été que ces politiques n’ont pas pris en compte au départ le volet communication. Les résultats atteints ont donc été relativement limités. La relecture de l’ensemble de ces politiques prend désormais en compte la communication. Ce qui veut dire qu’au-delà de ce que nous prêchons, d’autres acteurs ont pris conscience de la nécessité de prendre en compte la communication dans toute activité de développement. Au-delà du Burkina, l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture a constaté que pour qu’un projet de développement atteigne des résultats excellents, il faudra dès le départ intégrer la communication participative. Il faut également que ce projet consacre 15 à 20% de son budget à la promotion d’une communication qui va durer trois, cinq, dix ans. Ce n’est pas de la littérature, ce sont des constats scientifiques.

S. : Quelles sont vos attentes pour la prochaine table ronde des bailleurs de fonds ?

H.O. : Nous pensons pouvoir trouver l’argumentaire nécessaire pour provoquer une adhésion massive à la PNCD. Cela doit se traduire par des contributions concrètes financières, par un plaidoyer auprès d’autres personnes que nous n’aurons pas touchées à l’occasion de la table ronde, afin qu’au terme des cinq ans de mise en œuvre du programme planifié, nous soyions à mesure de concevoir un autre programme quinquennal ou décennal parce que le développement ne doit pas s’arrêter en chemin.

P. Pauline KABORE (E.mail : kapaulie@yahoo.fr)
Sidwaya

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