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« Le tout-numérique pour le Burkina Faso », la grande ambition du ministre du Développement de l’Economie numérique et des Postes, Hadja Ouattara/Sanon

Publié le mercredi 17 janvier 2018 à 09h20min

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« Le tout-numérique pour le Burkina Faso », la grande ambition du ministre du Développement de l’Economie numérique et des Postes, Hadja Ouattara/Sanon

Une femme d’action et non de discours. Ainsi se définissait-elle, lors de son installation, le 23 février 2017, au poste de ministre du Développement de l’Economie numérique et des Postes. Onze mois après, Hadja Ouattara/Sanon a-t-elle insufflé une nouvelle dynamique à la politique du gouvernement en matière de développement des technologies de l’information et de la communication ? Quel est l’état d’avancement des projets et programmes conduits sous le magister de celle qui affectionne tant le concept « digitalisation ». Réponse dans cet entretien réalisé en ligne, le 4 janvier 2018. Lisez !

Lefaso.net : Près d’un an que vous avez été appelée à conduire la politique du gouvernement en matière de développement de l’économie numérique ; dans quel état d’esprit vous trouvez-vous aujourd’hui ?

Hadja Ouattara/Sanon : Il a plu aux plus autorités de notre pays de m’appeler à servir au sein du gouvernement. Je rends grâce au Dieu Tout-puissant et remercie Son Excellence Monsieur le Président du Faso et le Premier ministre pour cette confiance placée en ma personne. Mon état d’esprit reste le même depuis ma prise de service à nos jours. C’est celui d’une femme convaincue de la capacité de notre pays d’aller au tout numérique. Vous savez que le numérique est omniprésent dans notre vie quotidienne. En effet, l’avènement des technologies mobiles a démocratisé l’usage du téléphone et d’internet avec un impact réel sur l’ensemble des activités des Burkinabè.

J’en veux pour preuve le système d’information sur le marché des céréales, les transferts instantanés de devises, les applications de gestion pharmaceutiques, le traitement informatisé des salaires, le circuit intégré de la dépense, etc., toutes choses qui confortent le gouvernement dans sa volonté de faire des TIC un levier de croissance et de développement inclusif.

Titulaire d’un diplôme d’Ingénieur des travaux informatiques et d’un Master professionnel en Réseau informatique et Multimédia, vous êtes vue comme une femme de terrain. D’ailleurs lors de votre installation le 23 février 2017, vous vous êtes définie comme étant une femme d’action et non de discours. Pouvez-vous nous parler des réalisations majeures faites par votre département depuis lors ?

Je vous remercie pour cette question. Je pense qu’il est trop tôt de vouloir dresser un bilan des réalisations du ministère du Développement de l’Economie numérique et des Postes sous mon leadership. Cependant, je voudrais souligner que le ministère dont j’ai la charge a engagé un certain nombre d’actions sur plusieurs fronts de développement.

Primo, en soutien aux acteurs du secteur (que sont les opérateurs, les fournisseurs d’accès Internet, l’administration, etc.), le département contribue à apporter des solutions structurelles aux différents problèmes de connexion et de qualité de réseaux en mettant en place des projets d’infrastructures de communication de base en vue de fluidifier la connectivité intérieure et l’accès à internet.

Rentrent dans ce cadre les projets d’infrastructures réseaux tel que les projets Backbone national des télécommunications et G-Cloud qui visent à déployer un réseau fédérateur en fibre optique à l’échelle nationale avec accès à tous les pays voisins. Les réceptions pour la phase 1 sont prévues au plus tard au 1ier trimestre 2019.

A ces projets s’ajoutent, toujours au profit des acteurs, deux autres projets d’infrastructures complémentaires que sont le Point d’atterrissement virtuel (PAV) qui sera un point unique d’accès à la bande passante internationale et le Point d’échange Internet qui est un « bureau d’échange » pour le trafic Internet. Les réceptions sont en cours et les équipements seront en exploitation d’ici fin février 2018.

Enfin, pour les besoins de l’administration, un certain nombre d’actions sont aussi engagées dont le projet de renforcement et d’extension du Réseau informatique national de l’administration (RESINA) et le projet d’Appui au développement des TIC (PADTIC), afin de doter toutes les composantes de l’administration aussi bien centrale que décentralisée, d’une connectivité et des services de communications de qualité
Secundo, sur le front du développement de plateformes pour appuyer la gouvernance au Burkina Faso, nous avons pu mettre sur orbite un important projet qu’est le projet e-Burkina dont le lancement est intervenu, le mardi 07 novembre dernier, sous le haut patronage de SEM le Premier ministre.

L’objectif poursuivi est d’encourager une meilleure gouvernance dans le secteur public à travers l’adoption par l’administration publique de plateformes numériques et de services partagés pour améliorer les échanges de données entre les unités gouvernementales et la population. Le projet entend également promouvoir le partage de l’information, les innovations et les effets d’échelle pour accroître les revenus, la résilience et les emplois dans les principaux secteurs économiques du pays.

A ce projet, vient s’ajouter le projet de mise en place d’une plateforme G-Cloud au profit de l’administration, des entreprises et des citoyens. Les objectifs phares de ce projet est de permettre notamment le stockage des données, le partage des actifs numériques avec les développeurs, les propriétaires de bases de données et une plateforme e-learning

Tertio, mon département œuvre au développement de l’industrie numérique dans notre pays. Dans ce cadre, il est institué des marathons de développement de logiciels dénommé « hackathons ». C’est une plateforme permettant aux jeunes développeurs de vendre leurs produits et leurs talents. Ces jeunes sont ensuite placés au sein de structures de soutien et d’accompagnement pour les inciter à libérer leur génie et proposer des solutions TIC novatrices à haute valeur ajoutée. D’ailleurs, c’est comme je l’avais dit à ma prise de fonction : je compte m’appuyer « fortement sur la jeunesse et en osant des politiques innovantes et ambitieuses ».

Enfin, mon département, dans le souci de professionnaliser l’entrepreneuriat dans le secteur du numérique et d’y instaurer la culture de l’excellence, a mis en place un agrément technique en matière informatique dont le lancement des activités de délivrance est intervenu le 27 décembre 2017. Je salue au passage son appropriation par les acteurs du secteur qui s’est traduite par leur présence massive à la cérémonie de lancement. Cet agrément est un label de qualité attribué aux entreprises du numérique, suite à un examen minutieux de leur personnel, leur outillage technique et leur environnement de travail.

Parmi les grands programmes d’infrastructures de votre département figure en bonne place le projet backbone national des télécommunications lancé à Gaoua à l’occasion des festivités du 11 décembre 2017. Quels sont les enjeux d’un tel projet ?

Le Conseil des Ministres en sa séance du 31 mai 2017 a décidé de mettre en œuvre la première phase du projet backbone national des télécommunications, et le lancement est intervenu précisément le 10 décembre dernier à Gaoua sous le très haut patronage de SEM le Président du Faso. Cette première phase d’une longueur de 2001 km de câble à fibres optique a un délai d’exécution de 14 mois et permettra de connecter une cinquantaine de chefs-lieux de communes.

A terme, avec plus de 10 000 km de longueur, le backbone national des télécommunications sera un réseau de communications fédérateur en fibres optiques à l’échelle nationale, reliant tous les 351 chefs-lieux de communes et tous les six pays voisins contribuant ainsi à l’amélioration de la connectivité nationale et internationale en large bande par une infrastructure en fibre optique mutualisée. Ce sera un réseau qui va servir de support aussi bien pour les opérateurs, les fournisseurs d’accès Internet, que pour l’administration etc.

Ce projet contribuera donc à résoudre le problème de capacité, de fiabilité, de disponibilité de réseaux et partant de la qualité de services.
En somme, il vise à doter le secteur de l’économie numérique d’une infrastructure de communication de base susceptible de supporter les services de nouvelles générations présents et à venir afin de permettre à notre pays de profiter efficacement de tout le potentiel du numérique pour son développement.
C’est donc un important projet pour notre pays car comme l’a dit un de mes collègues « les TIC c’est l’autre nom du développement ».

Approuvé le 19 juin 2013, en conseil des ministres, le projet a pourtant accusé un retard avant son démarrage. Qu’est-ce qui peut bien expliquer une telle situation ?

Effectivement, le Conseil des ministres en sa séance du 19 juin 2013, avait autorisé la signature d’un contrat entre l’Etat burkinabè et la société de droit singapourien HUAWEI INTERNATIONAL PTE LIMITED pour la réalisation de 5 443 Km de dorsal de télécommunications (backbone) en fibre optique. N’ayant pas géré le dossier en son temps, je ne puis vous donner les raisons de ce retard.

Mais, je peux simplement relever que le gouvernement actuel estime et avec juste raison, que le numérique est un puissant facteur de modernisation de l’Administration, de promotion de la bonne gouvernance sous toutes ses formes et d’appui à la production de richesses. Au regard donc de tous ces bienfaits qu’offre le numérique, le gouvernement accorde une place importante au numérique. C’est pourquoi en lieu et place de 5 000 km de fibres optiques initialement prévus, nous sommes actuellement à une projection de 10 000 km pour mailler l’ensemble du territoire national. C’est ce qui justifie aussi, l’inscription du développement du numérique dans la liste restreinte des priorités nationales avec la mise en œuvre effective de la première phase du Backbone national.

Vous l’avez dit, le Projet « E-Burkina » est aussi l’un des plus grands projets de services de votre gouvernement qui sera orienté vers le développement des services en ligne. Et qui dit services en ligne dit également connectivité et surtout sécurité. Vu les récentes attaques de sites gouvernementaux burkinabè, quelles assurances donnez-vous que la sécurité sera au cœur de ce vaste projet ?

Avant tout commentaire, permettez-moi de saluer le professionnalisme des équipes techniques qui ont permis de circonscrire le champ de nuisance de ces cybercriminels et de réhabiliter les différents sites attaqués. Aucune administration n’est à l’abri de ces cybercriminels. Le défi qui nous est ici lancé est de travailler à minimiser ce phénomène.

Dans le domaine du numérique, plus de 80% des attaques informatiques découlent d’une erreur humaine. Pour y faire face efficacement, il faut mobiliser environ 80% de procédures et 20% d’outils. Ainsi, le Gouvernement, à travers l’Agence Nationale de Sécurité des Systèmes d’Information (ANSSI) et l’Agence Nationale de Promotion des Technologies de l’Information et de la Communication (ANPTIC), travaille profondément sur cette problématique pour garantir une sûreté maximale aux services et plateformes en ligne qui seront développés dans le cadre du projet e-Burkina. Aussi, un référentiel de management de la qualité et un référentiel général de sécurité des systèmes d’information avec la contribution des normes de sécurité informatique comme la famille ISO27000 seront implémentés pour garantir la disponibilité, l’intégrité, la confidentialité et la non-répudiation des transactions électroniques.
L’autre pan de la question est la répression des cybercriminels.

Sur ce plan, notre pays dispose de la loi 010/2010 relative à la protection des données à caractère personnel en complément au code pénal et au code de procédures pénales qui sont en relecture pour prendre en compte les nouvelles infractions liées au numérique. Les instruments juridiques communautaires et internationaux comme la Convention de l’Union Africaine (UA) sur la Cybersécurité et la protection des données à caractère personnel et la convention de Budapest sur la cybercriminalité seront bientôt internalisés pour renforcer davantage notre dispositif juridique national.

« Favoriser la naissance et l’émergence de PME/PMI structurantes, innovantes et viables à travers un mécanisme nouveau de financement adapté à l’auto-emploi », tel est l’objectif du projet Burkina’ Start-up lancé par votre gouvernement au second semestre de 2017. Où en êtes-vous avec ce projet ?

C’est un projet qui est mis en œuvre par le département en charge des finances et du développement. Il prend en compte tous les domaines de développement socio-économiques y compris celui du numérique. Ma collègue sera mieux placée pour répondre à cette question avec beaucoup plus de précisions. Cependant, il convient de souligner qu’il s’agit d’un projet profondément digitalisé, en ce sens que l’intégralité des opérations du processus de soumission et de traitement des idées de projet est opérée en ligne.

Pour ce qui est de votre domaine, le numérique, que faut-il pour que les start-up soient de véritables opportunités pour les jeunes pour s’autoemployer et lutter contre le chômage ?

L’apport principal de mon département ministériel c’est de créer les conditions nécessaires à la mise à disposition des usagers (individus, entreprises, Administration publique) de services digitalisés de qualité et abordables. C’est cela qui permettra à tous de profiter du potentiel des télécommunications/TIC.

Des initiatives sont développées notamment dans le domaine de la formation, de la détection et l’accompagnement des talents, de la mise en place d’incubateurs particulièrement à travers le projet de TECHNOPOLE TIC.

Je note également avec satisfaction l’émergence d’acteurs qui œuvrent dans la promotion des startups. Il s’agit des incubateurs mis en place par des acteurs privés. Ces dernières années nous avons noté la création de ce type d’entreprises qui offrent des conditions favorables au développement des startups et avec lesquelles mon département coopère.

En somme dans le domaine du numérique, nous devons œuvrer à mettre à disposition des services de qualité et un environnement approprié pour le développement des startups.

Pour Koura, une association qui lutte pour un entrepreneuriat innovant, il n’existe pas véritablement de startups au Burkina au regard des quatre critères d’une start-up à savoir la temporalité, le business plan, l’industrialisation/reproductivité et la scalabilité. Partagez-vous leur analyse ?

Je suis d’avis que dans ce domaine nous sommes à un stade embryonnaire. Comme je le disais tantôt, pour profiter réellement du potentiel du numérique, il faut qu’il y ait des réseaux et des services de qualité (service téléphonique et services de données).
Bien que nous ayons fait des progrès depuis les réformes entreprises à la fin des années 1990, des défis demeurent. C’est tout le sens des actions que mène le gouvernement à travers mon département actuellement.Lire la suite sur faso-tic.net

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