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Crise dans le secteur éducatif : Qu’est-ce que ça coûte au Gouvernement d’y remédier ? (1/2)

Une tribune de Hamado OUEDRAOGO, Conseiller d’Administration scolaire et universitaire

Publié le samedi 16 décembre 2017 à 21h47min

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Crise dans le secteur éducatif : Qu’est-ce que ça coûte au Gouvernement d’y remédier ? (1/2)

La crise dans l’éducation est devenue structurelle. En effet, la multiplication des réformes éducatives et des politiques de massification ont eu pour effet l’accroissement sans précédent des structures éducatives et des effectifs d’enfants scolarisés.

Parallèlement, les conditions de vie et de travail se sont progressivement dégradées dans ce secteur : classes sous paillotes, effectifs pléthoriques, surcharge de travail pour les uns et sous emploi pour d’autres, manque d’équipements, déficit d’encadrement pédagogique et de formation continue, problèmes récurrents dans le mandatement des agents, les reclassements, etc. Cet état des faits laisse imaginer aisément que l’une des causes de cette précarité réside dans la conception, la planification et la mise en œuvre des politiques publiques éducatives.

À cette précarité des conditions de travail, plus prononcée en milieu rural, il faut ajouter les inégalités salariales et sociales qui sont de plus en plus croissantes aussi bien au sein de la Fonction publique qu’entre les travailleurs du département même de l’éducation.

À l’échelle de la Fonction publique, ces inégalités, nées de l’octroi de statuts particuliers ou autonomes à certains types d’agents exerçant dans des domaines dits de souveraineté ou stratégiques se traduisent aujourd’hui par une frustration légitime en ce sens que les mêmes diplômes, le même degré de pénibilité des tâches et des astreintes similaires dans l’exercice des métiers de la Fonction publique ne donnent pas droit au même traitement lorsqu’on passe d’un secteur à l’autre (on parle de Fonction publique à double vitesse). Ainsi, on peut constater que les indemnités de certains agents (magistrature, finances, sécurité, etc.) doublent le traitement intégral de leurs pairs exerçant dans d’autres secteurs d’activités (éducation, santé, agriculture, administration territoriale, action sociale, etc.).

À cette inégalité, s’ajoutent les avantages divers octroyés à certains types d’agents : fonds communs, ristournes, frais de session ou de missions mirobolants, prises en charge financière de certaines charges telles que le carburant, l’habillement, la santé, les frais ou le moyen de transport, ...).

A l’intérieur du secteur de l’éducation et de la recherche, si certaines inégalités ou iniquités indemnitaires ont longtemps été tolérées du fait de l’appartenance des agents à trois départements distincts, la fusion/juxtaposition des ordres d’enseignement (secondaire, post-primaire, primaire et préscolaire) depuis janvier 2016 a révélé et mis en exergue la face hideuse des écarts injustifiés dans le traitement des agents.

Face à la multiplication des revendications corporatistes et sectorielles, le Gouvernement post-insurrectionnel, trahissant l’esprit de l’insurrection, a opté pour un traitement partiel et parcellaire des problèmes qui lui sont posés selon le rapport des forces en présence. La conséquence qui en découle est l’accroissement des inégalités qui ont longtemps prévalu sous l’ancien régime, d’où la mue des frustrations longtemps refoulées en révolte quasi-ouverte.

Depuis bien longtemps d’ailleurs, la démotivation des agents avait conduit bon nombre à se détourner de leurs obligations professionnelles, le laxisme et le manque d’autorité des pouvoirs publics aidant, pour disent-ils « se chercher » ; c’est à dire entreprendre des activités parallèles, source de revenus substantiels. Il s’agit notamment d’initiatives individuelles ou en groupe, de prestations autorisées ou non dans le privé (agriculture, élevage, enseignement, cours d’appui à domicile, gestion, consultation) et même des activités incompatibles avec le statut de fonctionnaire (commerce, entrepreneuriat) ; les plus chanceux s’étaient agrippés à des positions professionnelles pourvoyeuses de revenus supplémentaires (frais de mission, frais de vacation, ristournes et autres pots-de-vin). D’autres encore doivent leur salut aux postes politiques (nominations, élections) qu’ils ont pu grappiller.

Cependant toutes ces stratégies semblent aujourd’hui saturées ou inopérantes, amenant les uns et les autres à prendre conscience de la nécessité de lutter pour une amélioration de leurs conditions de travail et de rémunération, d’où le lever de boucliers qu’il nous est donné de vivre en cette fin d’année 2017 : sit-in, grèves, marches, mots d’ordre de boycott de certaines activités... Face à une telle situation dont la gravité ne fait aucun doute, on pourrait se demander qu’est-ce qu’il coûte au Gouvernement d’y remédier ? Ou plus exactement comment le Gouvernement PKT pourrait y remédier ?

Ouagadougou, le 14 décembre 2017
Hamado OUEDRAOGO,
Conseiller d’Administration scolaire et universitaire
Tel : 70362290 Email : oued.hamad@gmail.com

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