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Paramanga Ernest Yonli : le réformateur de l’Administration burkinabè (1)

Publié le lundi 13 juin 2005 à 07h50min

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Le Burkina Faso se porte plutôt bien. Malgré la perspective d’une présidentielle d’ici la fin de l’année 2005 et les soubresauts sociaux dans lesquels il faut voir l’expression de la bonne santé politique du pays. Les syndicats y sont bien organisés, actifs et combatifs. Les partis politiques y sont vindicatifs. L’opposition s’oppose et le gouvernement gouverne. Normal.

Ajoutons à cela une situation sous-régionale qui trouve son point d’équilibre même si rien, nulle part, n’est réglé : ni en Côte d’Ivoire, ni au Togo (mais la disparition de Gnassingbé Eyadéma supprime un point de friction majeur). Reste que le Mali et le Niger ne sont pas (loin de là) au mieux de leur forme. Mais à Ouagadougou on demeure, plus que jamais, serein et on se prépare à accueillir le prochain sommet de la Communauté des Etats sahélo-sahariens (Cen-Sad) les mercredi 1er et jeudi 2 juin 2005.

Stabilité intérieure + présence internationale = croissance économique. Une équation qui caractérise, depuis bien des années, le Burkina Faso de Blaise Compaoré et des compaoristes. A condition, bien sûr, que la gestion du pays soit sinon exemplaire pour le moins meilleure qu’ailleurs et que les investisseurs soient sollicités et motivés. Pour la motivation, quand on est un pays du Sahel dépourvu de toute richesse naturelle autre que les hommes et les femmes, ce n’est pas facile ; pour la sollicitation, pas de problème, Compaoré et les compaoristes n’hésitent pas à faire le premier pas (et les pas suivants).

Le chef de l’Etat était tout récemment en Asie ; son Premier ministre était en France pour les Journées économiques du Burkina, organisées à Paris (il faudrait songer, aussi, à la province française qui est, sans doute, bien plus motivée et bien moins sollicitée) du 25 au 30 avril 2005. Jean-Pierre Raffarin, Michel Barnier, Xavier Darcos, Michel de Bonnecorse, Abdou Diouf, Vincent Bolloré, Gilles Peltier, etc. Yonli a fait le tour du tout Paris-Afrique.

Et dans la conjoncture morose qui caractérise l’Afrique de l’Ouest, le dynamisme de la classe politique burkinabè et un bilan politico-économique plutôt flatteur, ont permis au Premier ministre Yonli de se déclarer satisfait de ce déplacement en France. Même si le niveau des investissements français au Burkina Faso n’est pas exactement ce qu’il devrait être.

Paramanga Ernest Yonli est, dans un pays où la discrétion est érigée en qualité suprême, plus discret encore que le reste de la classe politique burkinabè. C’est d’ailleurs un homme relativement neuf sur le devant de la scène politique.

Pas encore quinquagénaire (il est né en 1956), originaire de Tansarga, dans la province de la Tapoa (dans l’extrême est du pays, à 25 kilomètres au sud de la capitale provinciale, Diapaga) en pays gourmantché, Yonli va faire ses études en Haute-Volta puis au Togo et en France. Economiste du développement, c’est à Paris qu’il va rencontrer la jeune Kadidiatou, sa cadette de quelques années qui étudie le droit à Paris XII. Ils vont rentrer ensemble en Haute-Volta avant de se marier (il y a une quinzaine d’années).

Yonli est déjà engagé dans le combat politique ; il milite au sein de la glorieuse Fédération des étudiants d’Afrique noire en France (Feanf), qui a alors beaucoup perdu de son prestige des années 1950-1960 mais au sein de l’Association des étudiants voltaïques en France on parle toujours de révolution alors que Ouaga en est encore au temps des coups d’Etat militaires.

Le 25 novembre 1980, le colonel Saye Zerbo a pris le pouvoir et un Comité militaire de redressement pour le progrès national (CMRPN) a été mis en place. Pour beaucoup, c’est un soulagement après les années de règne du général Sangoulé Lamizana (qui était au pouvoir depuis 1974). Saye Zerbo n’est pas qu’un officier supérieur ; il a été ministre des Affaires étrangères en 1974.

Il ne va gouverner la Haute-Volta que moins de deux ans (il sera renversé le 7 novembre 1982) ; mais va marquer durablement l’histoire de son pays : c’est lui qui, en septembre 1981, a fait entrer dans son gouvernement le capitaine Thomas Sankara au portefeuille de secrétaire d’Etat à l’Information. Après son renversement, la Haute-Volta va entrer dans une période de fortes perturbations politiques qui aboutiront à la révolution du 4 août 1983.

Le coup d’Etat du 7 novembre 1982 a bouleversé la vie de Kadidiatou. Elle est la fille du colonel Saye Zerbo. Son père a été mis aux arrêts. Elle stoppe ses études de droit pour une formation courte lui permettant de trouver rapidement un emploi : elle sera secrétaire de direction. Le jeune couple rentre au Burkina Faso en 1986 ; la scène politique est plus que jamais en effervescence. Le 15 octobre 1987, la "Révolution dévore les révolutionnaires".

Le Burkina Faso, sous la conduite de Blaise Compaoré, entre dans l’ère du Front populaire puis de la
"rectification". En 1989, Yonli, qui milite dans un de ces groupuscules qui pullulent alors à Ouagadougou, va rejoindre l’Organisation pour la démocratie et le progrès-Mouvement du travail (ODP-MT). En février 1996, l’ODP-MT, encore très imprégnée d’idéologie révolutionnaire, va donner naissance, par fusion avec quelques groupuscules, au Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP) dont il sera, par la suite, membre du secrétariat exécutif national.

Le 9 février 1996, Kadré Désiré Ouédraogo est nommé Premier ministre ; ce n’est pas un politique : il était vice-gouverneur de la BCEAO.

Paramanga Ernest Yonli va obtenir la direction du cabinet du nouveau Premier ministre. Un an plus tard, il sera élu député de la Tapoa lors des législatives de mars 1997. Le 1l septembre 1997, il entre au gouvernement. Il se voit confier le portefeuille de ministre de la Fonction publique et du Développement institutionnel.

Au Burkina Faso, la modernisation de l’administration n’est pas qu’un mot creux. A l’automne 1993, alors que Youssouf Ouédraogo était Premier ministre, avait été initiée la Conférence annuelle de l’administration publique (CAAP). Un travail considérable avait été mené pendant ces cinq longues journées de débat et de confrontation dont j’ai pu suivre alors le déroulement de bout en bout (le reportage que j’avais rédigé sur ces journées dépassait les soixante pages, un record pour un seul sujet !).

Qui devrait trouver son aboutissement alors que Yonli prenait en charge la fonction publique. Du 27 novembre au 5 décembre 1997, la deuxième session du Conseil économique et social (CES) avait pour thème : "Quelle administration pour le Burkina à l’aube du XXlème siècle. La réforme globale de l’administration publique" tandis que du 18 au 21 décembre 1997, 600 participants allaient débattre du "rôle et des missions de l’Etat" au cours d’assises nationales.

Yonli va s’attacher à mettre en place une réforme en quatre temps :
- 1) répartition des domaines d’intervention et de compétences (qu’il appelait le volet macro-organisationnel) ;
2) gestion adaptée des ressources humaines ;
- 3) bonne gouvernance ("induire de nouveaux comportements basés sur la possibilité de créer les conditions de lisibilité des institutions, de la transparence à l’intérieur des structures de l’Etat, de l’action des autres acteurs du développement et aussi la possibilité de faire participer au maximum les couches sociales de notre pays, depuis la campagne jusqu’à la ville") ;
- 4)valorisation de l’expertise nationale.

Le 7 novembre 2000, Blaise Compaoré décidera de nommer Paramanga Ernest Yonli au poste de Premier ministre. Il a 44 ans. Il est le premier chef de gouvernement non mossi de l’histoire du Burkina. Et hérite d’une situation politique, économique et sociale difficile. Son gouvernement est" d’ouverture" mais il lui faut faire face à la grève des étudiants, à l’affaire Zongo, au ralentissement de l’activité économique, au déficit agricole, à la fermeture des entreprises industrielles symboliques de la période "révolutionnaire", etc.

Jean-Pierre Béjot
La Dépêche Diplomatique

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Vos commentaires

  • Le 5 juillet 2005 à 18:37, par Mm BARRAZZA. francaise d’origine burkinabè En réponse à : > Paramanga Ernest Yonli : le réformateur de l’Administration burkinabè (1)

    bonjour !

    En quoi cet article a avoir avec le titre "PARAMANGA ERNEST YONLI : le réformateur de l’admistration burkinabè"

    je ne comprend pas tros.

    merci.

    • Le 25 mai 2007 à 15:54, par kgb En réponse à : > Paramanga Ernest Yonli : le réformateur de l’Administration burkinabè (1)

      Quelle reforme ? A t-on maintenant cesse de payer les mille francs au petit fonctionnaire du ministere chaque fois qu’on doit faire un dossier ? A-t-on regle la question des absenteisme dans l’administration ? Peut-on avoir son dossier traite dans les delais sans bras-long ou sans payer des dessous de table ? De quelle reforme parle t-on alors si la souffrance du citoyen n’a pas diminuee ???? Les reformes sont sur papier et nous on vit au Faso (reel)

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